"Je serai employé à temps plein"



Dans un café, situé non loin de la gare des Brotteaux (Lyon), Serge Ravanel assiste à une rencontre au cours de laquelle ses trois amis de Libération (André Helbronner, Jacques Bergier et Alfred Eskenazi) tentent d’obtenir, d'un certain M. Jacques, un moyen de gagner Londres. Il se souvient : « Tout négligemment, ce dernier s’est tourné vers moi me demandant si je voulais moi aussi gagner l’Angleterre. Je lui répondis : Oh non, il y tant de choses à faire ici » (1).
Après avoir interrogé Ravanel sur ses activités et ses intentions, il lui propose « d’abandonner ses projets et de venir travailler avec lui ». Considérant que cette offre suppose « une prise de position complète dans sa vie, il lui demande une semaine de réflexion » (2). Ravanel finit par accepter : « Je serai employé à temps plein » (3) à compter du mois de septembre.

Alors que sa scolarité à Polytechnique s’achève, Ravanel consacre l’été 1942 à des activités intellectuelles et sportives. Très préoccupé par « les problèmes sociologiques » et le fonctionnement d’un État, il participe à un stage à l’école des cadres d’Uriage où il espère approfondir, à partir des grands débats, ses réflexions et trouver des réponses à ses questions. Il y fait la connaissance de Dunoyer de Segonzac qu’il retrouvera au cours de l’été 1944. Ses vacances s’achèvent dans le Briançonnais où il retrouve son groupe de haute montagne et s’adonne avec discipline et ténacité à l’alpinisme.

Sources : (1) Interview de Ravanel par Christine Lévisse-Touzé (07/11/98). (2) Op cit. (3) Serge Ravanel, L’Esprit de Résistance, Editions du Seuil, 1995.


                           «I was fully committed» 

In a cafe not far from the Gare des Brotteaux in Lyon, Serge Ravanel met with three friends from the Libération movement (André Helbronner, Jacques Bergier et Alfred Eskenazi) and M. Jacques who was offering them a way to join de Gaulle in England. Ravanel remembers: «Totally casually, M. Jacques turned to me and asked if I wanted to go to England too. I replied: Oh no, there is too much to do here » (1).


After interrogating Ravanel about his activities and his reasons, M. Jacques proposed that Ravanel «drop everything, come and work for him. » Needing time to consider such an offer, «Ravanel asked for a week to think about such an important position» (2). He decided to accept: «I was fully committed » (3) starting in September.

Having graduated from Polytechnique, Ravanel dedicated the summer of 1942 to studying and sports. Troubled by «sociology questions» and how the government was being run, he took courses at the Executive School of Uriage, hoping to learn more and to find answers. There he met Dunoyer de Segonzac who he would meet again in the summer of 1944. He ended his vacation in Briançonnais where he devoted himself to mountain climbing and hiking with his characteristic discipline and tenacity.


Traduction : Catherine Lazernitz

Auteur(s): Emmanuelle Benassi

Plan de l'expo

Crédits

Bibliographie

Officier de liaison et collaborateur de « M. Jacques » haut ▲



Serge Ravanel se présente le 1er septembre 1942 à 09h00 « conformément aux instructions », à la porte d’un appartement près de la rue du Guesclin. Là, il est accueilli par Maurice Cuvillon qui ignore tout de sa venue et lui redonne rendez-vous le surlendemain. A la fois surpris et inquiet par l’absence de son contact, Ravanel s’exécute et se présente, de nouveau, le 3 septembre à la même adresse.
M. Jacques, cette fois-ci présent, le confie à Maurice, son secrétaire général qui, bien que surpris par ce « très jeune homme à l’allure bourgeoise et non résistante portant des cols empesés, des manchettes et des gants, lui donne quand même du travail : des missions d’officier de liaison qui nécessitaient quelqu’un qui ait une bonne allure » (1). On l’envoie en province pour porter des courriers confidentiels à des personnalités (hommes d’affaires, fonctionnaires, responsables de chemins de fer et, en retour parfois, rapporter des messages Il devient en quelque sorte « un collaborateur de la direction du mouvement Libération mais un collaborateur sans grade qui faisait toutes les petites tâches qu’on lui demandait » (2).

Sources : (1) Interview de Ravanel par Christine Lévisse-Touzé (07/11/98). (2) Serge Ravanel, émission de Mireille Dumas, Bas les masques, « Je veux changer de nom » (31/01/96).



                               Liaison Officer and assistant to «M. Jacques»

On September 1st, 1942 at precisely 9 am, Serge Ravanel presented himself at the door of an apartment close to rue du Guesclin «exactly as instructed. » The door opened, revealing Maurice Cuvillion, who told him to come back the day after next, in spite of what Ravanel had been told. Surprised and worried because there had been no sign of M. Jacques, Ravanel nevertheless faithfully returned on September 3rd.

M. Jacques was there this time, and sent him to Maurice, his general secretary. Maurice, though surprised by the «young, well-off man who didn't look like a membert of the Resistance, and who wore tight clothes and gloves, still offered him a job: the position of liaison, a post where a pleasant appearance was necessary» (1). They sent him around the province delivering confidential letters to people important to the Resistance (business men, factory owners, railroad administrators) and often, he would deliver messages back. He became a kind of «liaison for the Libération, but also simply a messenger who did any task that needed doing » (2).


Traduction : Catherine Lazernitz

Auteur(s) : Emmanuelle Benassi

Direction nationale du mouvement Libération haut ▲



Au cours de ces premières missions, Ravanel ignore encore pour quel groupe il travaille et, comme il se doit, ne pose aucune question sur les tenants et aboutissants de leurs activités.

A la fin du mois de septembre 1942, de plus en plus troublé par les activités de M. Jacques qui ne semblent pas correspondre aux activités qu’il imaginait, il « lui demande entrevue » et des explications. Il découvre alors que ce Jacques Brunschwig Bordier, ancien sous-préfet révoqué du fait de sa condition juive, travaille pour le mouvement Libération qui, avec Combat, Franc-Tireur et le Front National, est l’un des quatre mouvements dominant la scène de la Résistance en zone Sud en cette fin d’été 1942.

Sans hésitation, Serge Ravanel décide de s’employer pleinement pour Libération dont il vient de découvrir l’existence. Au sein du mouvement, Ravanel est un « envoyé du comité directeur », chargé de transmettre des instructions aux dirigeants régionaux ou maintenir des liens avec des personnalités. Seul Jacques connaît sa véritable identité et son adresse. Cette nouvelle fonction est pour lui l’occasion de rencontrer de nombreuses personnalités dont les fonctions au sein des huit directions départementales et des différentes ramifications du mouvement sont d’une importance considérable : Lucie et Raymond Aubrac, Pierre Hervé, Jean Rochon, Georges Zérapha, Yvon Morandat… Puis il est intégré au service des faux-papiers et, à sa demande, il est chargé de s'occuper des groupes d'action.

En cette fin d’été 1942, Serge Ravanel comprend désormais l’ampleur du développement de la structure de la Résistance et de ses principales organisations en zone Sud comme en zone Nord. Par hasard, il apprend à cette même période que le responsable de Libération est un dénommé Bernard.




                                     The Libération Movement

 

During his first couple of missions, Ravanel had no idea what group he was working for, and he didn't ask because he had been forbidden to question anyone involved in these operations.

By the end of September 1942, more and more troubled by the reasons behind the activities M. Jacques asked him to do, Ravanel asked «for information» and explanations.  He discovered that Jacques Brunschwig Bordier, a former minister who had been fired because he was Jewish, worked for the Libération movement.  This movement, along with Combat, Franc-Tireur, and the Front National were the four biggest sectors of the Resistance in the Free Zone as of the summer of 1942. 

Without hesitation, Ravanel dedicated himself totally to the Libération mouvement.  At the heart of the movement, Ravanel became a «dispatch for a chief director» and was charged with delivering instructions to local leaders as well as maintaining communication with members.  Only Jacques knew his real name and address.  This new job gave him the chance to meet important members across all eight departments and sections of the movement: Lucie and Raymond Aubrac, Pierre Hervé, Jean Rochon, Georges Zérapha, Yvon Morandat… When moved to the service for creating false papers, Ravanel requested to be the leader of an operation.

By the end of the summer 1942, Serge Ravanel understood how much the structure and organization of the Resistance had developed, and the different Resistance networks in both the Free Zone and the North Zone.  It was simply by chance that he learned that the man in charge of the Liberation was known as Bernard.

 

 Traduction : Catherine Lazernitz

Auteur(s) : Emmanuelle Benassi

Première arrestation, première évasion (4-8 novembre 1942) haut ▲




Le 4 novembre 1942, Serge Ravanel doit se rendre à Marseille pour examiner « avec les responsables locaux s’il était possible de créer des groupes de sabotage ». Le 5 au matin, un rendez-vous est fixé au bar Napoléon, rue Scotto, près de la Canebière avec un correspondant local qui « sera là avec, devant lui, une pipe et une boîte d’allumettes » (1). Mais, c’est la police qui l’accueille, informée de sa venue grâce à l’arrestation, la veille, d’un agent de liaison qui portait sur lui des documents sur lesquels figurait la venue de Ravanel.
Sur le chemin qui le conduit au siège de la police, boulevard d’Athènes, à l’Évêché, il parvient à se débarrasser des documents compromettants. Après avoir inventé une histoire qui paraisse vraisemblable en adoptant une tactique consistant à faire l’imbécile, le naïf, il propose à l’inspecteur de taper à la machine son propre rapport en créant un climat de détente et d’innocence (2). Serge Ravanel est conduit, après deux interrogatoires successifs, au fort Saint-Jean, ancienne fortification militaire du quartier du Vieux Port, appelé « petit dépôt ».
Le 6 au matin, après une nuit au cours de laquelle il « découvre le monde carcéral », Ravanel est de nouveau conduit par le commissaire lui-même au siège de police. Venu seul et sans menottes le chercher, il ne saisit pas, de suite, l’occasion de s’échapper que lui offre délibérément le commissaire de police sur le trajet qui les conduit au commissariat. « J'ai mis plus de 24h à comprendre qu'il voulait que je fiche le camp, j'étais naïf » (3). Il ne se fait pas avoir une seconde fois quand « de façon invraisemblable, on le laisse seul dans les locaux, sous la surveillance d’un unique policier qui tient le standard téléphonique » (4). Prétextant une envie urgente, il gagne tranquillement la sortie du commissariat sans éveiller le moindre soupçon.

Après avoir trouvé refuge chez une connaissance de Mme Eskenazy, dont il a mémorisé le nom (Poirier) et un début d’adresse (rue Madagascar), puis modifié sa physionomie, il regagne Lyon par un itinéraire détourné.

Sources : (1) Serge Ravanel, L’Esprit de Résistance, Editions du Seuil, 1995. (2) Serge Ravanel, interview de Christine Lévisse-Touzé, le 7 novembre 1998. (3) Interview de Serge Ravanel par Alain Vincent.


                                             First Arrest, First Escape (4-8 November 1942)

On November 4th 1942, Serge Ravanel was supposed to go to Marseilles to discuss «the possibility of organizing sabotage groups with the locals.» The morning of September 5th at the Napoleon bar on rue Scotto, Ravanel was supposed to meet with a local correspondent who «would be sitting with a pipe and a box of matches in front of him» (1). But it was a police officer instead who was there to meet him, tipped off by a captured liaison who had the documents with the details of the meeting when he was captured.

On route to the police station on Boulevard d'Athènes, Ravanel tried to destroy the compromising papers he had with him. Having come up with a plausible story, Ravanel decided to play dumb and try to seem as innocent and naive as possible. During the interrogation, he joked that the interrogator should record his own story, making them both laugh (2). After successfully pulling off two more interrogations, Serge Ravanel was driven to what was known as the «little depot» which was Fort Saint-Jean, an ancient military base in the Vieux Port neighborhood.

The next morning, November 6th, having «discovered what incarcerated life was like», Ravanel was driven to police headquarters by the police chief himself. Ravanel did not realize that by bringing him in alone and without handcuffs the police chief was trying to give Serge the chance to escape. «I had had more than twenty-four hours to figure out that he wanted me to escape, I had no idea» (3). He did not think he would have another chance when «the chief unpredictably left me alone with one other officer who was on the telephone» (4). Pretending he needed going to the privy, Ravanel quietly but urgently exited the building and was free.

Having found refuge thanks to one of Mrs Eskenazy's acquaintances whose name (Poirier) and address (rue de Madagascar) he had memorized,  Ravanel headed to Lyon, disguised for his next mission.


Traduction : Catherine Lazernitz

Auteur(s) : Emmanuelle Benassi

Un tournant de la guerre, les missions de Ravanel changent de cap haut ▲



L’enchaînement des derniers événements, depuis novembre 1942, marque un tournant décisif dans l’organisation de la Résistance intérieure qui entre, en ce début d’année 1943, dans une phase de « maturation accélérée ». Alors que les principaux dirigeants des mouvements et organisations de la Résistance travaillent à l’unification de leurs forces, leurs compagnons poursuivent ardemment, et dans un environnement où règnent répressions et persécutions, leurs tâches respectives. Ainsi, dans le cadre de ses missions, Serge Ravanel va être le témoin « d’un certain nombre d’étapes de ce processus continu d’unification de la Résistance ».

Au cours de cet hiver 1942-1943, il enchaîne successivement quatre missions d’ordre différent :
- en novembre 1942, la dissolution de l’armée d’armistice rend urgente la récupération d’armes dans les dépôts clandestins : Raymond Aubrac, inspecteur de la nouvelle armée secrète demande à Ravanel de « mettre sur pied une équipe pour en déménager quelques-uns avant qu’ils ne tombent aux mains des Allemands » ;
- en janvier-février 1943, face à l’effervescence générale que suscite l’affaire Giraud/de Gaulle, Pascal Copeau, alias Salard, bras-droit du chef de Libération, envoie Ravanel en mission auprès des responsables de région afin de s’assurer de leur soutien au général de Gaulle ;
- en février-mars 1943, suite à l’instauration du Service du travail obligatoire (16 février), Serge Ravanel est envoyé en mission à Chambéry afin de « sonder les responsables locaux » et trouver une solution permettant de cacher les jeunes réfractaires au STO et, dans la mesure du possible, les intégrer ;
- enfin, du 12 au 14 mars, il accomplit une mission de repérage de terrains de parachutage d’armes pour les maquis.

 


                                         A Defining Moment in the War, Ravanel's Missions Diversify

The series of events from November 1942 marked a significant change for the Resistance. The beginning of 1943 saw a period of «rapid development» for the organization. While the leaders of the movement worked to unify the Resistance effort, other members persevered and continued completing their missions in spite of a more and more hostile environment. As the leader of his group, Serge Ravanel witnessed «the steps the Resistance was making in order to unify.»

During that winter, Ravanel completed four successful and diverse missions:

-in November 1942, as the Resistance's secret army was about to be dissolved, it needed to recover arms from their hidden bases: Raymond Aubrac, its new chief, asked Ravanel to «gather a team together and get the supplies before they fall into German hands.»

-In January and February of 1943, the impressive, right-hand of the Libération movement, Pascal Copeau, the liaison officer to Giraud and De Gaulle—alias Salard—asked Ravanel to ensure communications between local Resistance leaders and de Gaulle.

-In February and March of the same year, just after the STO was implemented, Ravanel was sent to Chambéry to «find out which trustworthy locals» could help to hide young men avoiding the STO, and if possible, to bring them into the Resistance.

-Then on March 12th to the 14th, he accomplished the mission of finding suitable locations for bases for the Resistance army.

Traduction : Catherine Lazernitz

Auteur(s) : Emmanuelle Benassi

Mission « exploratoire » en Haute-Savoie haut ▲




Implanter et armer des maquis


Le 12 mars 1943, Raymond Aubrac charge Ravanel de repérer des terrains en Haute-Savoie, dans le secteur d’Annecy, permettant l’implantation de maquis et le parachutage des armes aux jeunes réfractaires.
Maurice Kriegel-Valrimont et Alfred Malleret Joinville, respectivement adjoint et collaborateur d’Aubrac, participent à cette mission : le premier dans l’Isère, le second en Savoie également. « Nous avons tous les trois, chacun dans un secteur géographique, essayé de déterminer les possibilités et le développement qu’on pouvait donner à ces choses-là » (1). Serge Ravanel et Alfred Malleret Joinville quittent Lyon le 13 mars. Arrivés à Chambéry, ils se séparent et Ravanel poursuit seul vers Annecy où il passe la nuit.
Le lendemain, 14 mars, il retrouve son contact : Valette d’Osia, chef départemental de l’armée secrète. Confié à l’un de « ses jeunes collaborateurs, également officier de carrière, ils localisent avec une relative aisance des zones géographiques pour l’implantation des maquis. En revanche, celles « favorables à la réalisation de parachutages » sont plus difficiles à établir. Il faut tenir compte des zones trop accidentées, se méfier de celles dont la configuration ne permet pas d’évacuer facilement les armes et éviter la proximité des axes de circulation » (2).
Après deux heures d’études, penchés sur des cartes Michelin, « nous repérons six ou sept zones que nous baptisons d’un nom de code, en notant pour chacune d’elles des indications qui permettront aux avions de les aborder dans les meilleures conditions ». La mission de Ravanel est remplie. Charge « aux techniciens du BCRA [Bureau central de renseignement et d’action] de prendre maintenant l’affaire en main ». Le 14 au soir, Ravanel est de retour à Lyon. Le 15 au matin, il rend compte de sa mission à R. Aubrac et à Yves Farge mais doit leur remettre les cartes l’après-midi au 7 rue de l’Hotel de ville. C’est sur ce lieu de rendez-vous que R.Aubrac, Ravanel et Kriegel-Valrimont sont arrêtés.

Sources : (1) Extrait Kriegel-Valrimont, Le refus (14/05/95) France 2. (2) Serge Ravanel, L’Esprit de Résistance, Editions du Seuil, 1995.



                                             An «exploratory mission» in Haute-Savoie

Establishing and Arming the Secret Army

March 12th 1943, Raymond Aubrac gave Ravanel the task of finding landing sites in Haute-Savoie, in Annecy, for the settlement of new resistance fighters and the airdrop of arms.

Maurice Kriegel-Valrimont and Alfred Malleret Joinville, both partners of Aubrac, also participated in the mission: Kriegel-Valrimont went to Isère, Joinville to Savoie. «The three of us each had our own sector where we scouted locations and possibilities for landings» (1). Serge Ravanel and Alfred Malleret Joinville left together from Lyon on March 13. They went their separate ways when they got to Chambéry, Ravanel heading alone to Annecy where he spent the night. The next day, he made contact with Valette d'Osia, a department chief in the Resistance Army. Along with «a young member, also an officer, they easily found good locations for establishing bases. On the other hand «finding landing sites for the parachuters» was more difficult. They had to take into consideration the kind of landscape, how easily men could be evacuated, and the proximity to major roads» (2).

After two hours of looking, with the help of Michelin maps, «we found six or seven zones, gave them code names, and noted which ones would work best as runways.» Ravanel's mission complete, he «went to the technicians at the BCRA to give them the information.» The night of the 14th, Ravanel returned to Lyon. The next morning, he informed Aubrac and Yves Farge that he had completed his mission, but he needed to meet them that afternoon at 7 rue de l'Hôtel de Ville to give them the maps. At that meeting, Aubrac, Ravanel, and Kriegel-Valrimont were arrested.


Traduction : Catherine Lazernitz

Auteur(s) : Emmanuelle Benassi

Deuxième arrestation, deuxième évasion (15 mars au 24 mai 1943) haut ▲



Le 15 mars 1943, Ravanel se rend comme convenu au 7, rue de l’Hôtel de Ville. Tout lui semble normal. Raymond Aubrac et Kriegel sont arrêtés les premiers. L’arrestation de Ravanel survient ensuite.
Contrairement à ses camarades, qui n’ont sur eux aucun papier compromettant, il a en sa possession des « cartes Michelin crayonnées de bleu », ce qui rend sa « situation plus délicate ». Il tente de s’échapper mais en vain. Après une brève mais violente et sanglante poursuite dans la cage d’escalier de l’immeuble, « genre mêlée de rugby au cours de laquelle, j’ai, je crois, coupé le doigt de l’un et abîmé la clavicule de l’autre » (1), la police neutralise le « fou furieux qu’il est devenu » (2) et l’embarque dans une traction avec ses deux compagnons Aubrac et Kriegel en direction du commissariat de police, quai Perrache. Ravanel est interrogé le jour de l’arrestation par la police française au commissariat. Il applique le même stratagème que celui utilisé lors de sa première arrestation qui consiste à « échafauder une tactique d’aveu ». « L’idée de Résistance m’est indifférente. L’argent seul me motive ». La réussite du stratagème repose sur l’invention de scénarios vraisemblables très détaillés et insignifiants ; l’assurance que personne ne soit préjudiciable ; la capacité à trouver des techniques de mémorisation lui permettant « de répéter ses aveux autant de fois qu’il le faut, et sans erreur ».
Le 22 mars, après six jours passés au petit dépôt, dans les sous-sols du Palais de Justice, Ravanel est transféré à la prison Saint-Paul dans la cellule D54 qu’il partage avec quatre compagnons : Raymond Aubrac, Kriegel, François Morin et R. Hego. Il y passe près de deux mois et n’en conserve, malgré une « menace permanente de l’arbitraire…, aucun mauvais souvenir » (3). « Une dizaine de jours après son arrivée dans la prison, on le conduit à l’hôtel Terminus, siège provisoire de la Gestapo où il subit un interrogatoire de deux à trois heures. Une parfaite maîtrise et un sang-froid déconcertant, lui permettent de « gagner la partie ». Il est reconduit dans sa cellule.

Le comité directeur de Libération décide une opération d’évasion des cinq membres. Bien que n’étant pas un responsable important, le nom de Ravanel figure sur la liste. Avec la complicité de l’abbé Marty, aumônier de la prison, du médecin et de quelques infirmières, Mme Monod-Laffargue, responsable des visiteuses de prison et son avocat Me Claps, un plan d’évasion est rapidement mis en place. A l’occasion de visites, ces derniers leur transmettent les consignes par le biais de cigarettes dans lesquelles se trouvent des « messages minusculement écrits sur de minces feuilles de papier à cigarette ». Grâce à « leur aide et celle de nos camarades de la Résistance qui étaient dehors, nous avons réussi à nous faire porter malades les uns après les autres, pour que cela n’attire pas l’attention, à l’hôpital de l’Antiquaille réservé aux prisonniers malades et dont les salles étaient gardées par des gendarmes ». Après Aubrac, Kriegel et Morin, vient le tour de Ravanel le 14 mai. L’action commando se déroule le lundi 24 mai. Le groupe-franc constitué de neuf personnes et équipé de trois voitures, « se présente comme étant de la Gestapo ; porteurs de faux papiers bourrés d’un tas de croix gammées confectionnés à partir d’imprimés et de tampons complètement fantaisistes » (4). Ainsi, malgré « l’intervention du directeur de l’hôpital qui s’interpose fermement », ils pénètrent, dans les bureaux de l’Administration prétextant le transfert de trois prisonniers. En trente minutes, « Forestier, Kriegel et moi retrouvons la liberté ».

Sources : (1) Serge Ravanel, interview de Christine Lévisse-Touzé (7 novembre 1998). (2) Op cit. (3) Op cit. (4) Serge Ravanel, Le refus (14 mai 1995) France 2.


                        Second Arrest, Second Escape (March 15th to May 24th, 1943)

March 15th 1943, Ravanel arrived at 7 rue de L'Hôtel de Ville. Everything seemed normal until Raymond Aubrac and Kriegel were arrested. Ravanel was next.

Unlike his comrades, Ravanel was carrying «maps with blue crayon all over them», which would be «difficult to explain.» He tried to escape but in vain. In a brief but extremely violent and bloody fight in the building's elevator, Ravanel was finally arrested after «going berserk»: «It was like a rugby match. I think I cut one man's finger off and broke the other's collarbone» (1).


He was sent to the police station at Quai Perrache with Aubrac and Kriegel. There, he was interrogated by a French police officer. He decided to use the same tactic as before: «make up a confession». «The Resistance didn't interest me at all, only money did.» The strategy only worked because Ravanel was able to come up with stories that were detailed, but forgettable enough to be convincing. He needed to seem neutral and be able to remember his story so he could «repeat it over and over as many times as necessary without making a mistake.»

March 22, after six days in the little depot in the basement of the Palais de Justice, Ravanel was transferred to the prison at Saint-Paul into cell D54 which he shared with four others: Aubrac, Kriegel, F. Morin, and R. Hego. He spent almost two months there without «anything bad happening...and no bad memories» (3). «A dozen days after he arrived, Ravanel was taken to the Hôtel Terminus, a Gestapo headquarters, for a three- hour interrogation. Because of his perfect calm and cool head, he was able to «convince them he was innocent.» He was taken back to his cell.

The head of the Libération movement decided to launch an operation to free the five members. Even though he wasn't an important figure, Ravanel's name was still on the list. With the help of the Father Marty, a doctor, some nurses, Mme Monod-Lafargue—in charge of visitors to the prison—and her lawyer, M. Claps, the Libération movement was able to put together an escape plan quickly. Each time a member visited, they would leave cigarettes that had «tiny messages hidden in the cigarettes' paper.» Thanks to «the Resistance's members' help from the outside, we knew how to pretend to be ill. And so, one after the other, so as not to attract attention, we were sent to the hospital in Antiquaille that was reserved for prisoners. The rooms were guarded by the police.» After Aubrac, Kriegel and Morin, it was Ravanel's turn on May 14th. The commando operation began Monday, May 24th. The GF had a team of nine people in three cars and when «they presented themselves to the Gestapo, they were prepared with false papers that were covered in made up stamps and symbols» (4). And even though «the hospital director tried to interfere, » they managed to get to the administration pretending that they were there to sign paperwork to transfer three prisoners. In thirty minutes, «Forestier, Kriegel, and I were free.»


Traduction : Catherine Lazernitz

Auteur(s) : Emmanuelle Benassi