Gaby Reynier

Légende :

Actif sédentaire du réseau de Buis-les-Baronnies, clandestin au camp FTP de La Lance où il devient CE, incarcéré et torturé à la prison d’Avignon.

Genre : Image

Type : Photo

Producteur : Inconnu

Source : © Les maquis des Baronnies, collectif du cinquantenaire, 1994. Droits réservés

Détails techniques :

Photographie argentique en noir et blanc.

Date document : Vers 1950

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme - Montélimar

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Analyse média

Gaby Reynier est dans la cinquantaine quand le cliché a été pris. L‘époque de la Résistance qu’il a vécue avec tant d’intensité est déjà derrière lui depuis longtemps.

Mais la mémoire de quelques-unes de ses luttes a été conservée et fait partie des témoignages recueillis lors du Cinquantenaire des maquis des Baronnies, en 1994.

Gaby Reynier est né à Buis-les-Baronnies le 25 janvier 1908, de parents modestes exploitants agricoles. Il réussit le CEP, aide ses parents à la cueillette du tilleul, des olives, … travaille l’hiver dans l’un des moulins à huile du Buis. Mais, cadet d’une famille de trois enfants, il se lance dans un apprentissage, la coiffure pour dames, d’abord au bourg même, puis à Marseille. Il contracte une pleurésie : il est dès lors fragilisé du côté pulmonaire.

C’est sans doute après le service militaire qu’il ouvre un salon au Buis ; il se marie avec Yvonne en 1932 ; le couple aura trois enfants. Dans cette période, il doit se soigner d’une deuxième pleurésie. Appelé sous les drapeaux en 1939, il est démobilisé en 1941, ne rouvre pas son salon et se consacre au travail des champs.

Lié très jeune au parti communiste, c’est dans cette dernière période qu’il devient un des principaux animateurs des résistants sédentaires de Buis-les-Baronnies.


Auteurs : Claude Seyve et Michel Seyve

Contexte historique

Le réseau de sédentaires de Buis-les-Baronnies, outre Gaby Reynier, comprend notamment M. Delhomme, Espérandieu, Saint-Donat, Louis Borel, de Beauvoisin, un village proche, Aimé Buix…

Dès le printemps de l’année 1943, Gaby Reynier reçoit des jeunes – soit des Baronnies, son pays, soit d’autres régions de la Drôme ou du Vaucluse voisin, soit de tout autre région de France – refusant de partir au STO. Il les conduit alors, de nuit, au camp FTP de la Fournache, leur procure parfois des faux papiers, participe à leur approvisionnement, leur équipement. Il faut aussi des armes pour combattre.

C’est dans ce cadre, par exemple, qu’il récupère, loin de chez lui, au cours d’une équipée audacieuse, dans le jardin public de Montélimar, selon le récit d’Yvonne son épouse, des armes camouflées par d’anciens militaires de l’Armée française dissoute lors de l’Armistice de juin 1940.

Se sentant menacé, il s’impose une vie semi clandestine jusqu’à ce que le camp de la Fournache soit investi par les Italiens dans la nuit du 9 au 10 août 1943. Le foyer familial doit également obéir à cette exigence – les enfants sont séparés et vivent chez des parents. La répression déclenchée contre le maquis se poursuit dans la population civile du pays : quatre des principaux membres du groupe de sédentaires buxois sont arrêtés, jugés et emprisonnés en Italie. Gaby Reynier échappe d’un rien à cette rafle.

Denis Arlaud, un des maquisards de la Fournache, dans ses "Souvenirs", fait part du récit de la fuite réussie de Gaby Reynier. « Gaby Reynier, chef du réseau, put échapper à l'officier allemand mandaté pour l'arrêter. Ils échangèrent plusieurs coups de feu à travers la porte de la maison qui en a gardé trace très longtemps ; mais Gaby put s'échapper par les toits. Il descendit quelques maisons après la sienne par une cheminée. La bonne dame, qui était en train de faire son café prit peur en voyant le chef de la Résistance arriver chez elle dans de telles conditions, alors que les soldats italiens circulaient dans la rue. Gaby Reynier, qui était blessé à l'épaule, rassura la bonne Buxoise : il allait bien vite partir ! Après s'être nettoyé, il prit une pioche et un cageot mussy sur l'épaule, descendit dans la rue où il rencontra plusieurs patrouilles. Aucune ne l'arrêta, pensant qu'il s'agissait d'un paisible travailleur. Ainsi, tranquillement, (si l'on peut dire) il se perdit dans la nature. »

Dès lors, il est totalement clandestin ; après s’être fait soigner discrètement par le docteur Claude Bernard acquis au maquis, qui lui confie une boîte de pansements fabriquée aux USA, parachutée et récupérée par les résistants, il gagne le maquis FTP de la Lance. Après l’attaque du 1er juillet 1943, le camp s’est en effet reconstitué. Il y est rejoint par son épouse, Yvonne. Il y devient CE (commissaire aux effectifs).

Le 10 décembre 1943, il fait partie des 23 maquisards des camps de La Lance et des Cailles (Mirabel-aux-Baronnies) qui attaquent un train de militaires allemands à Portes-lès-Valence. Nous rencontrons ainsi Gaby Reynier sédentaire, paisible paysan-coiffeur à Buis-les-Baronnies, agissant au sein du réseau local le jour, mais également Gaby Reynier, aidant les opposants au STO, de nuit, à gagner les camps de la résistance dans la montagne. Enfin se dessine un soldat volontaire de 35 ans, tantôt dans la fonction de responsable des effectifs de son maquis, tantôt choisi pour participer, à une centaine de kilomètres de son camp, à l'attaque d'un convoi ferroviaire.

Ce ne sont là que quelques bribes de ses activités. Mais, à travers ce cas particulier, nous devinons la souplesse et l'efficacité de la résistance méridionale, que nous retrouvons bien sûr plus ou moins ailleurs.

À nouveau malade, il doit quitter La Lance et se reposer dans une ferme à Malaucène (Vaucluse), où il se cache en compagnie d’Yvonne. Mais, dénoncé, il y est arrêté et conduit, en compagnie des fermiers, à la prison d’Avignon. Après des sévices et tortures, jusqu’à deux fois par jour pendant un certain temps (il est tabassé à coups de câble électrique ; il a plusieurs cotes cassées…), il parvient à s’échapper et à regagner le Buis : sa détention a duré 44 jours.

« En un quart d’heure, dit sa fille Janine qui, étant enfant à l’époque, se souvient bien de la scène, tout le Buis est là pour accueillir mon père devant un café – actuellement le Café Saint-Julien ! »

Il termine la guerre, en 1944, lieutenant dans les FFI.

Atteint de tuberculose, il doit se soigner. Aidé par un ami, il remplit un dossier attestant en particulier ses états de service, sa blessure, les tortures subies : il obtient une pension d’invalidité.


Auteurs : Claude Seyve et Michel Seyve
Sources : Dvd-rom La Résistance dans la Drôme et le Vercors, éditions AERI-AERD, 2007.