Objets retrouvés 57 ans après par André Mérandat, déporté à Neuengamme

Légende :

Les nazis aimaient l’ordre : ils obligeaient les déportés arrivant au camp à déposer tous les objets, bijoux, documents,… qu’ils avaient sur eux et rangeaient ceci dans une pochette à leur nom.

Genre : Image

Type : Objet

Producteur : Cliché Robert Serre

Source : © Collection André Mérandat Droits réservés

Détails techniques :

Une enveloppe en papier kraft (21 x 29,7 cm ?), un portefeuille en cuir, une licence de la Fédération française de boules (document papier vert), un brevet de natation (docume&

Date document : 2003

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme - La Roche-de-Glun

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Analyse média

Ces objets, déposés par André Mérandat à son entrée au camp de Neuengamme le 18 juillet 1944, ont été retrouvés aux Pays-Bas et ont été renvoyés à Mérandat par la Croix-Rouge néerlandaise en 2001.

On apperçoit sur la photographie : son portefeuille contenant sa licence de la Fédération française de boules, son brevet de natation, des photos, en particulier celle où il manoeuvre sa barque sur le Rhône, autant d’objets oubliés depuis 1944 et qu’André Mérandat ne pensait jamais revoir.


Auteurs : Robert Serre

Contexte historique

André Mérandat, de La Roche-de-Glun, a été arrêté le 1er juin 1944 et déporté le 15 juillet avec son frère Roger et son père au camp de concentration de Neuengamme.
Bien que de petite constitution et handicapé à une jambe, son voisinage avec le fleuve en avait fait un enfant du Rhône, qu’il traversait sans problème à la nage. Mais la navigation en barque n’avait pas plus de secret pour lui (photo). Cela explique sa participation, alors qu’il n’a que 16 ans, au convoyage de résistants qu’il faisait passer de l’autre côté du fleuve en Ardèche ou amenait en Drôme. Mais cette activité clandestine, en dépit des précautions, finit par être connue. La famille est dénoncée.
Parti de Compiègne le 15 juillet, le convoi, chargé de 1 528 hommes, dont 34 Drômois, arrive le 18 après deux jours et demi de voyage coupés par un peu de ravitaillement à Coblence le 17, des bombardements alliés et des tentatives d’évasions.
Le déporté, dès son arrivée, est dépouillé de ses bagages, vêtements et objets personnels. Il doit remettre ses bijoux, montres, alliances, bagues, ses objets de piété, chapelets, médailles, livres et autres, son argent. « Ici, il n’a pas cours », lui dit-on pour justifier cette dernière saisie. La liste de ses objets est méticuleusement dressée, et le tout est empaqueté. Puis il est enregistré, immatriculé, douché, rasé, désinfecté, habillé. Ce n’est pas qu’une simple formalité administrative, comme elle pourrait se faire pour tout nouvel arrivant dans une structure collective. Ici, on dépouille de tout et on vole. On uniformise : tous les détenus sont semblables pour les cheveux, les vêtements. On ridiculise : après s’être trouvés tous nus, ils sont affublés de tenues ridicules, vêtements dépareillés, barbouillés d’un large coup de pinceau ou charcutés, coupe de cheveux et coiffure clownesques. On dépersonnalise : plus de nom, mais un numéro, plus d’objet personnel. C’est ainsi qu’André Mérandat a été délesté de tout ce qu’il avait sur lui.
En février 2001, une lettre de la Croix-Rouge française lui fait savoir que, « au cours de recherches effectuées dans les archives du Ministère des Affaires Sociales des Pays-Bas, il a été retrouvé une caisse contenant des possessions de personnes emprisonnées en Allemagne pendant le deuxième guerre mondiale ». Cette caisse et une liste de personnes, dont Mérandat, ont été transférées à la Croix-Rouge néerlandaise. Avertie, la Croix-Rouge française, par des recherches poussées, a reconstitué le parcours d’André Mérandat et retrouvé son adresse de l’époque. Heureusement, celui-ci habite toujours au même endroit. Et le colis contenant ses quelques biens lui parvient peu après.


Auteurs : Robert Serre
Sources : AD Rhône, 3808 W 354, enquête à La Roche-de-Glun 25 et 28 octobre 1945 par la brigade de Tain (déclarations Madame Mérandat Juliette, née Serve, 42 ans, épicière, Mérandat André, 18 ans, électricien, Gerbet Fernand, 40 ans, boucher à La Roche-de-Glun),  Robert Serre, De la Drôme aux camps de la mort, les déportés politiques, résistants, otages, nés, résidant ou arrêtés dans la Drôme, éd. Peuple Libre / Notre Temps, avril 2006. Fondation pour la mémoire de la déportation, le Livre-Mémorial des déportés de France arrêtés par mesure de répression et dans certains cas par mesure de persécution 1940-1945, Paris, éditions Tirésias, 2004. tome I, 1 446 pages, tome II, 1 406 pages, tome III, 1 406 pages, tome IV, 1 282 pages.