Plaque de la "grotte du parachutiste"

Légende :

Dans la forêt de Noisy-sur-Ecole, non loin du monument du réseau Publican, une plaque en bronze est apposée à l'entrée de la Grotte de Rochebelle, devenue Grotte du Parachutiste, située à la Justice de Chambergeot. C'est là que furent entreposées les armes parachutées pour le réseau PUBLICAN. 

Genre : Image

Type : Plaque commémorative

Producteur : Louis Broch

Source : © Collection Louis Broch Droits réservés

Détails techniques :

Photographies numériques en couleur

Lieu : France - Ile-de-France - Seine-et-Marne - Noisy-sur-Ecole

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Analyse média

La plaque en matériau synthétique remplace celle en bronze qui fut volée. Elle signale la grotte où furent cachées les armes et munitions provenant des parachutages sur la Vallée close au début de l’année 1943. Orné de lauriers stylisés et d’une croix de Lorraine, la plaque porte la mention :


"GROTTE DU PARACHUTISTE
ICI
EN 1943
FURENT CACHÉS
DES ARMES ET EXPLOSIFS
POUR LA LIBÉRATION
DE LA FRANCE

RÉSISTANCE 1940 – 1944"


Contexte historique

Le 23 mars 1943, Marcel Fox, agent du SOE, est parachuté en France avec les lieutenants Marcel Rousset et Jean Bouguennec. L'objectif de sa mission est de mettre en place un nouveau réseau, le réseau Publican, dans la région de Meaux (Seine-et-Marne). Il est prévu que le réseau recevra du matériel de destruction qui lui permettra de procéder à des sabotages. Fox rejoint Paris et entre en contact avec le réseau Prosper. Alfred Suttill lui fait rencontrer un certain Maurice Braun qui va devenir son adjoint.
Au début du mois de mai 1943, Fox et Braun rejoignent la Seine-et-Marne dans le but d'organiser le réseau. Leur prospection les conduit dans le sud du département. Ils établissent le PC du réseau Publican, chez Marie et Emile Bouchut, au Sud de Fontainebleau. Une équipe locale est constituée. Braun fixe le secteur géographique du réseau : la Croix-Saint-Jérôme dans la "Vallée Close" (massif des Trois Pignons), entre Arbonne et Noisy-sur-Ecole, site malaisé que les Allemands ne parviendront jamais à identifier. Le terrain, destiné à la réception de parachutages, est rapidement aménagé par le garde-chasse et gardien de la maison de "Bois-Rond", Benjamin Destré, accompagné d'Emile Bouchut, forestier, qui connaît tous les sentiers et qui a eu l'idée de ce site. Ils sont aidés par le jeune Lucien Sarroul et le maçon Raphaël Bourdin. A ces premiers fidèles s'agrègent d'autres agents. Il en est ainsi du capitaine Eugène Defontaine, ancien des Dardanelles, industriel de profession, qui prend la tête de cette équipe. Il propose la grotte dite de Rochebelle qu'il a dans sa propriété à Noisy-sur-Ecole pour camoufler les armes dont on attend l'envoi de Londres.

La logistique repose sur des agents recrutés localement à l'instar de Paul Barril, entrepreneur, dont les camions sont mis à la disposition de l'organisation. Le groupe de Noisy est le plus important. Sous la direction de Marcel Fox, Maurice Braun s'efforce de développer le réseau dans le département. Publican est présent à Meaux avec Debonne et un couple de dentistes, Camille et Thérèse Morin. Cette dernière met Braun en relation avec des agents et ingénieurs de la SNCF qui lui fournissent des plans de voies ferrées et de postes d'aiguillage. Publican s'implante également dans le sud de l'Oise, autour de Brégy et de Versigny où le docteur Marcel Gilbert met Braun en relation avec le maire de cette dernière commune, le comte Jacques de Kersaint, qui possède un poste de radio. Un terrain de parachutage est aménagé dans la propriété du maire. Le même Dr Gilbert présente l'entrepreneur mécanicien François Soret à Braun. Soret dirigera à Crépy-en-Valois (Oise) une équipe de sabotage des voies ferrées. Braun s'appuie aussi sur des agents parisiens. Fox l'a effectivement mis en relation avec Madeleine Clayssen qui travaille au Ministère de l'Agriculture. Ils peuvent aussi compter sur Yvonne et Bernard de La Rochefoucault qui hébergent un radio et son matériel. Un agent, André Pion, ajusteur à la SNCF, est le chef d'une équipe de sabotage oeuvrant à la gare de Lyon (archives SOE). A Juvisy et Villeneuve-Saint-Georges, Braun a recruté dans les milieux des cheminots.

Les états de service des agents du réseau Publican font apparaître différentes actions et activités : des sabotages commis sur des voies ferrées (Théo Marty à Juvisy, Albert Violette à Thomery, le gendarme Robert Prévost…) la confection et la dissimulation d'explosifs (Hervé Gosseau, Jeanne Charbonnet, Jean Manoury…), l'aide aux réfractaires (Eugène Thaillier, Jean-Marcel Baillou…).
La principale action du réseau Publican fut la réception d'un parachutage en juin 1943 et le stockage des armes parachutées. Ce parachutage, le seul réussi -un second avion fut abattu-, se déroule en effet dans la nuit du 21 au 22 juin 1943. Fox et Braun assurent les signaux lumineux. Les sources du BCRA donnent la composition des dix containers larguées : 32 stens (mitraillettes), 24 pistolets, 100 grenades incendiaires, 216 "abrs", 30 mines anti-véhicules, 120 "HE". Van den Kinderen, un charretier recruté par Madeleine Destré, et Lucien Sarroul se chargent du transfert des armes vers le lieu prévu à cet effet (la grotte de Rochebelle). Les armes et les explosifs seront ensuite distribués. A Juvisy, par exemple, c'est Albert Malgat qui approvisionne en armes et munitions les résistants de la gare de Villeneuve-Saint-Georges.
Néanmoins, comme tant d'autres organisations, le réseau ne traverse pas sans encombre l'été et l'automne de 1943. Dès juillet 1943, Yvonne de la Rochefoucault est arrêtée. Elle sera déportée à Ravensbrück. Les Allemands frappent bientôt à la tête : le 7 septembre 1943, Marcel Fox, son radio Marcel Rousset et cinq autres agents sont arrêtés. Déporté, le chef de Publican sera pendu à Flossenbourg (Allemagne). De rudes coups sont aussi portés au secteur de Noisy-sur-Ecole le 10 septembre. Parmi les victimes des arrestations, Lucien Sarroul, Eugène Thailler, les époux Bouchut et Destré. Tous seront déportés.
Après la chute de Fox, Braun prend la direction du réseau et tente de mettre à l'abri l'équipe de l'Oise dont les membres échapperont de fait aux Allemands (à la suite du démantèlement du Publican, certains agents se retrouvent dans le réseau Alliance). Braun est lui-même finalement arrêté le 20 septembre 1943 sur le pont Mirabeau. Interrogé sous un faux nom ("Barde") rue des Saussaies et avenue Foch, sa véritable identité passe inaperçue aux yeux des Allemands qui recherche un anglais du nom de "Brown" : la direction de Fox a peut-être entretenu une confusion chez les services allemands qui auraient anglicisé le patronyme de son lieutenant. Après plusieurs mois passés à Fresnes, celui-ci sera déporté, en août 1944, à Buchenwald et versé dans un Kommando affecté à une usine d'optique et de mécanique.
A l'automne 1943, les arrestations se poursuivent en Seine-et-Marne. Selon Braun, dans un témoignage d'après-guerre, Defontaine aurait pris la direction du réseau à sa suite. Il semble bien cependant que Publican ne se soit pas relevé des arrestations de la fin de l'été, Defontaine, menacé, ayant rejoint la Seine-et-Oise (Maison-Laffitte) où il apporte sur place une aide aux aviateurs alliés.
Le nombre d'agents du réseau Publican a pu être estimé à soixante. Le réseau fut mis en place à une époque où la répression se durcissait. Les agents se heurtèrent aux coups redoublés des forces allemandes. Publican ne put mener les actions qui lui étaient destinées dans le cadre de sa mission. Ainsi, des objectifs avaient été signalés à Fox, parmi lesquels la gare de triage de Vaires, l'usine Gnome et Rhône de Ponthierry ou encore l'usine Westinghouse de Noisy-le-Sec…

Comme de nombreux réseaux, Publican paya un lourd tribut : 17 agents furent déportés, essentiellement à Buchenwald et à Ravensbrück. Six survécurent à la déportation après leur retour dont Maurice Braun. Cinq rentrèrent effectivement mais décédèrent rapidement des mauvais traitements qu'ils y avaient subis. Six disparurent en Allemagne.
A Noisy-sur-Ecole, un monument commémoratif a été érigé. Trente noms d'agents y ont été gravés. On peut y lire la mention suivante : "Ici, le 22 juin 1943 eut lieu le premier parachutage d'armes du réseau de résistance "Publican" pour la libération de la France". L'efficace logistique qui s'était localement mise en place n'avait hélas pu aller au delà de ce premier parachutage.


Emmanuel Debono, "Le réseau Ernest-Publican" in DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004

Sources et bibliographie :
Archives nationales, 72 AJ 39, (Réseau Publican. Témoignage d'Eugène Defontaine recueilli par Mme Patrimonio le 29 juin 1947. Témoignage de Maurice Braun recueilli par Mme Patrimonio le 21 juin 1947), 171 Mi 95 (BCRA, parachutages).
Archives privées de Mme Paulette Ward, fille de Marcel Fox.
Archives privées de M. Badaire (Section F du SOE). Dossiers des agents du réseau Ernest-Publican.
E. G. Boxshall, Chronology of SOE operations with the Resistance during world war II, non publié.
Le réseau Publican, Cahiers de la Résistance Seine-et-Marnaise, n°4.
Témoignage de M. Braun in Icare, n°148 du premier trimestre 1994, pages 82-85.
Plaque sur socle du monument du réseau, Noisy-sur-Ecole, Vallée-Close