En mémoire des victimes des massacres à Die en juillet-août 1944

Légende :

Plaque apposée à Die à la mémoire des victimes des massacres en juillet-août 1944. Pendant 15 jours, les Allemands et des miliciens y font régner la terreur, massacrant 24 personnes.

Genre : Image

Type : Plaque

Source : © AERD, fonds Alain Coustaury Droits réservés

Détails techniques :

Photographie argentique couleur.

Date document : Sans date

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme - Die

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Analyse média

Le monument se situe dans une rue secondaire de la cité. Il est constitué d'un mur réalisé en blocs calcaires. La plaque porte les noms des fusillés bien lisibles. Il est à remarquer de la responsabilité de l'assassinat est imputée uniquement à la Milice à la solde des Allemands : « lâchement assassinées par des miliciens à la solde de l’Allemagne ». Un écusson tricolore supporte les drapeaux lors des cérémonies anniversaires.

La ville de Die, où la mémoire des événements de 1944 est fortement marquée, comporte de nombreuses stèles et plaques. Une portion de la rue principale porte le nom de Camille Buffardel. Elle prolonge l'avenue de la division du Texas qui a libéré la ville en août 1944.


Auteurs : Robert Serre

Contexte historique

Malgré les efforts de la Résistance dans la vallée de la Drôme, les Allemands du « Kampfgruppe Zabel » composé d'un bataillon de la 9e division blindée et d'un « Ostbataillon », approchent de Die. Le convoi des blessés de l'hôpital du Vercors, venant de Saint-Martin, arrive à Die dans la nuit du 21 au 22. La mère supérieure de l'hôpital signale l'arrivée imminente des Allemands, ce qui oblige le groupe à retourner sur le massif se réfugier à la grotte de la Luire. Au cours de la nuit, le docteur Rigal et les infirmières religieuses évacuent de l’hôpital tous les malades transportables.
Le 22 juillet, les Allemands pénètrent dans Die.

Pour créer et entretenir un climat de terreur, ils circulent dans la ville et tirent à tout moment, même la nuit. Le couvre-feu est instauré, on ne peut sortir dans la cité qu’avec un laissez-passer. La population est affolée, redoutant les représailles, les prises d’otages et leur exécution. Monsieur Petit et l'abbé Muller, deux Lorrains, servent d'interprètes et cherchent à apaiser les occupants. Des avions allemands mitraillent Die et lâchent quatre bombes ; l'une tue mademoiselle Germaine Elluin, 30 ans.

Le dimanche 23 juillet à 10 h, Camille Buffardel, du réseau Buckmaster Roger, industriel et adjoint au maire, est fusillé sur la place Saint-Pierre et sa cave de Clairette est pillée. Le même jour, son frère Édouard est abattu à Aix-en-Diois. Le docteur Paul-Élie Kroll (Kraul ?) et son fils Maurice, juifs réfugiés à Die, sont abattus sur la placette, Pierre Chérissol, 22 ans, près de la Barrière. Au bord de la rivière Drôme, ils tuent le sous-lieutenant Victor Vermorel ("Vallin"), blessé à Vassieux, qui avait tenté de fuir, mais avait été facilement repris, le menuisier René Brugier, le bûcheron Pierre Basset, et Hubert Laheurte, 20 ans. Le corps de Léon Livache, exécuté alors qu’il essayait de rentrer chez lui à Romeyer, sera écrasé par plusieurs véhicules allemands. André Plumel, sculpteur sur bois, est abattu au pont de la Griotte à Die.

Le lundi 24 juillet, un détachement allemand et un peloton de la Milice investissent l'hôpital où ils arrêtent deux Juifs réfugiés à Die, Menahem Skelly Cohen, commerçant de Marseille, et Alexis Feldman, ainsi que Albert Froment, marchand de vêtements de Romans, Marcel Jeanneret, maquisard du Vercors, et Claude Lieber, Résistant juif de Grenoble, 22 ans, qu'ils massacrent à la prison avec le juif Albert Peters pris au château de Salières. Ce dernier, âgé de 51 ans, d'origine autrichienne, ancien artiste lyrique et chef d'orchestre à Berlin, venu en France dès 1933, interné au 352e GTE (Groupement de travailleurs étrangers) de Crest, avait été détaché à l'usine de meubles Audra à Die. Il est abattu par le tueur de la Milice "Georges", qui avait pour habitude de saisir rapidement son appareil photo pour prendre un cliché de sa victime en train de s'écrouler.
La secrétaire de l'hôpital, Yvette, a pu sauver à l'aide de faux papiers trois blessés qui y étaient restés, mais le quatrième, un blessé de la compagnie Brentrup originaire de Crest, Jean Rousset, 19 ans, blessé le 20 juillet à Vaunaveys, et évacué sur l’hôpital de Die. martyrisé par les miliciens, avoue son appartenance à la Résistance : il est abattu quelques heures plus tard d'une balle dans la nuque sur l'ordre d'Halperson, le dentiste de La Motte-Chalancon habillé en officier allemand, qui se révèle ainsi comme un traitre infiltré jusqu’alors dans la Résistance. Les religieuses de l'hôpital, compromises, sont soumises à interrogatoire, puis, alignées devant un mur, elles attendent longtemps leur exécution, évitée in extremis grâce à la négociation de l'abbé Bossan et de son vicaire l'abbé Muller. Elles sont enfermées et ne seront libérées que le lendemain soir.
Toute la population de Die de plus de 14 ans est convoquée sur la place de l'Évêché. À 14 h, devant les officiers allemands se promenant leur badine à la main, le chef milicien "François" fait un discours : « Je suis père de quatre enfants, mon père est mort à la guerre de 1914-18, j'ai fait la guerre de 1939-40, donc je suis un bon Français... je ne suis pas pour les Allemands, je suis avec les Allemands, contre les Juifs, les communistes, les terroristes ». Il jette l'anathème sur Die, ville rebelle, ville coupable. Et il invite à emboîter le pas pour l'ordre allemand.

Le 27 juillet, deux résistants juifs sont exécutés à leur tour par les miliciens : Vidal ou Nadal Ramis, 24 ans, originaire de Vienne (Isère), et Charles Touch-Laberche, originaire de Nice arrêté au Pont-de-Quart et emprisonné à Die.

30 juillet : Des affiches apposées dans Die avertissent la population : « Tous ceux qui par leur activité ont favorisé le maquis verront leurs biens confisqués, leur maison détruite, leur vie menacée ».

 31 juillet : à la prison les miliciens exécutent quatre jeunes maquisards pris à Romeyer où ils se cachaient, après l’ordre de dispersion du Vercors : Alphonse Canovas, 22 ans, Henri Gagnol, Jean Ordassière, 21 ans, et Humbert Pedoyat, 20 ans. L'un d'eux n'étant pas mort sur le coup, un milicien s'acharne sur le corps en criant : « tu ne veux pas mourir, sale Espagnol ! » car le pauvre diable a avoué au cours d'un interrogatoire que sa mère était espagnole. Les miliciens collent sur les murs de la ville une affiche qui commence ainsi : « les terroristes continuent à combattre » et poursuit par des menaces.

Ce climat de terreur dure quinze jours : le 7 août, les Allemands et les miliciens s'en vont de Die.


Auteurs : Robert Serre
Sources : AN, B.C.R.A, 3AG2/478, 171 Mi 189. SHAT, bobine 173, journal de la 9e Pz. ADD, 9 J 1, 255 W 89, 711 W 76-7 / 4 M 7. Pour l’Amour de la France. Drôme terre de liberté. Combats pour le Vercors et pour la liberté. Ladet, Ils ont refusé de subir. Abbé Bossan, Témoignage manuscrit. Claude Arnoux, Maquis Ventoux. Le Vercors raconté... Veyer Jean, Souvenirs sur la Résistance dioise. Collectif, Die, histoire. H. Faure, Éphéméride. Jean Cathelin et Gabrielle Gray, Crimes et trafics de la Gestapo française, tome 2, Historama, 1972. Archives Paul Arthaud : notes de Robert Noyer sur la Résistance dioise.