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Germaine Tillion et la Commission d'enquête internationale contre le régime concentrationnaire

Légende :

Le numéro 29, mai-juin 1951, du journal "Voix et visages", bulletin mensuel de l'association des déportées et internées de la Résistance (ADIR) consacre deux pages à la Commission d'enquête internationale contre le régime concentrationnaire.

Genre : Image

Type : Journal associatif

Source : © Département AERI de la Fondation de la Résistance Droits réservés

Détails techniques :

Journal imprimé

Date document : Mai-juin 1951

Lieu : France

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Contexte historique

Le 12 novembre 1949, David Rousset, ancien déporté de Buchenwald et Neuengamme, lance dans le Figaro littéraire un appel aux anciens déportés des camps nazis. Arrêté en 1943 pour avoir organisé dans l'armée allemande des groupes de soldats antinazis, David Rousset écrit après son retour de déportation deux témoignages essentiels : L'Univers concentrationnaire et Jours de notre mort. Faisant état de textes du "Code sociétique du travail correctif" et de nombreux témoignages, David Rousset pose la question de l'existence d'un système concentrationnaire en URSS et demande aux anciens déportés des camps nazis de se charger de connaître la vérité. Il propose alors, non d'affirmer que l'univers concentrationnaire existe en URSS mais d'"ouvrir le dossier" et de constituer une commission d'enquête. Elle serait composée d'anciens déportés politiques éprouvés, de toutes tendances politiques, y compris des communistes, et demanderait au gouvernement soviétique de mener une enquête sur place dans les camps de Russie. 

Cet appel de David Rousset a été accueilli avec intérêt par un grand nombre de déportés. Des hommes très différents, tels que Jean Cayrol (agent de la CND, déporté NN à Mauthausen-Gusen, poète et romancier), Edmond Michelet, le professeur Mazeaud (alors président de la FNDIR), le Père Riquet lui ont envoyé leur adhésion. Louis Martin-Chauffier (journaliste, rédacteur en chef du journal Libération en 1942, déporté à Neuengamme puis Bergen-Belsen) accepte de faire partie de la commission d'enquête, approuve qu'elle commence ses recherches par l'URSS mais demande que l'enquête soit ensuite étendue "à tous les pays où l'homme perd sans équivoque sa liberté ou sa vie sous les coups d'une répression politique politique, raciale ou sociale". D'autres déportés, comme Claude Bourdet (membre du comité directeur de Combat, déporté à Neuengamme et Sachsenhausen), n'acceptent le principe d'une commission d'enquête sur les camps de déportés que si tous les pays en sont l'objet, sans distinction, y compris l'URSS, mais sans priorité.

Enfin, la proposition de David Rousset est rejetée avec indignation par d'autres déportés, en particulier pour les anciens déportés du parti communiste.
La FNDIR accepte de participer à la commission de David Rousset tandis que la FNDIRP, par l'entremise de son comité directeur, refuse (ce qui provoque quelques démissions dont celle du Père Riquet). Cependant, certaines sections de province envoient leurs adhésions à David Rousset. 
Quant à l'ADIR, son conseil d'administration décide à l'unanimité de demander à participer à la commission d'information et élit le 19 décembre 1949 pour représenter l'association : Agnès Götschel, Marguerite Billard, Gabriel Ferrières, Germaine Tillion et Hélène Maspero. Les membres de la commission devant tous être d'anciens déportés, Gabriel Ferrières, internée mais non déportée, démissionna et céda sa place à Elizabeth Ingrand. 

Le 24 janvier 1950, la commission d'enquête française nomma par élection trois secrétaires généraux : Alfred Balachowsky, Louis Martin-Chauffier et Germaine Tillion. Lorsque la commission internationale contre le régime concentrationnaire fut constituée à Bruxelles en octobre 1950, les trois secrétaires généraux devinrent délégués internationaux pour la France. 

La première tâche de la commission fut de désigner les pays que leurs opposants accusaient d'entretenir chez eux un régime concentrationnaire. Ces pays étaient l'Espagne, la Grèce, l'URSS et la Yougoslavie. Quatre commissions d'enquête furent alors créées et Germaine Tillion fut nommée présidente de la commission d'enquête sur la Yougoslavie. 
Germaine Tillion fut également élue, avec Alfred Balachowsky, déléguée française au sein du jury international de la commission d'enquête sur l'URSS, présidée par Elizabeth Ingrand.


Voix et Visages, n°23, janvier 1950 et n°29, mai-juin 1951.