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Croix de guerre dite de Londres

Légende :

Croix de guerre ayant été décernée à Michel Legrand. Ce modèle dit "de Londres" se distingue par l'absence au revers d'un millésime (voir recto) et conserve le ruban utilisé en 1939. Sur le ruban sont fixées 6 palmes et deux étoiles. 

Genre : Image

Type : Médaille

Source : © Musée de l’Ordre de la Libération Droits réservés

Détails techniques :

Croix en bronze à patine sombre, sans millésime au revers, ruban.
Hauteur: 47 mm - Largeur: 38 mm

Lieu : Angleterre

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Analyse média

Quelques jours après la déclaration de guerre de septembre 1939, Albert Lebrun décide dans un décret-loi du 26 septembre de créer une croix dite "Croix de guerre", honorant les citations individuelles pour faits de guerre, à l'ordre des armées de terre, de mer et de l'air. Cette décoration peut être décernée à des unités, des militaires, des civils français ou des étrangers. Elle se distingue de celle de la Première Guerre mondiale dans la partie centrale du revers qui porte le millésime "1939" ainsi que par son ruban de couleur rouge avec au centre quatre bandes verticales vertes.

Cependant, l'histoire de cette décoration reflète les vicissitudes traversées par la France à cette époque. Il y eut en effet plusieurs modèles de Croix de guerre. Après l'armistice de juin 1940, le général Weygand, constatant le non respect des prescriptions d'attribution de la Croix de guerre 1939, demande une révision de toutes les citations acquises lors des combats de juin 1940 pour éviter une dévalorisation de cette décoration. Cette instruction aboutit au décret du 28 mars 1941 qui instaure le remplacement de la Croix de guerre "1939" par une nouvelle Croix. Identique dans sa forme à la précédente, elle porte les dates "1939-1940". Le ruban est vert et noir en signe de deuil rappelant celui de la médaille commémorative de 1870. Cette instruction reste effective jusqu'à la Libération de 1945.

Parallèlement, la France Libre continue d'attribuer des citations donnant droit au port d'une Croix de guerre. Ce modèle dit "de Londres" se distingue par l'absence au revers d'un millésime et conserve le ruban utilisé en 1939. Par ailleurs, dans une décision du 11 mars 1943, le général Giraud adopte pour l'Armée d'Afrique une décoration dont la croix ne porte plus en son centre une effigie de la République mais deux drapeaux tricolores croisés et au revers la date "1943". Fabriquée localement, cette distinction disparaît sous l'effet de l'ordonnance du 4 janvier 1944.


Extrait du site Chemins de mémoire

Contexte historique

Michel Legrand est né le 13 juin 1918 à Villerville dans le Calvados. En novembre 1936, il s'engage pour trois ans au 8e Régiment de Cuirassiers. Il est nommé brigadier en 1937 puis brigadier-chef en 1938. La même année, il opte pour les troupes coloniales et arrive à Brazzaville en avril 1939. Caporal-chef au Bataillon de Tirailleurs sénégalais, il est stupéfait par l'armistice. Il contribue, le 28 août 1940, au ralliement de la garnison de Brazzaville à la France libre et s'engage immédiatement dans les Forces françaises libres. Avec le Bataillon de Marche n° 1, sous les ordres du chef de bataillon Delange, il prend part aux combats de ralliement du Gabon. Le 1er novembre 1940, sergent depuis deux mois, il parvient à conduire avec succès une patrouille de reconnaissance en pirogue, et malgré la rencontre d'un ennemi supérieur en nombre qui le prend à partie, il poursuit sa mission et ramène toute sa patrouille au complet. Ceci lui vaut une première citation.

A la mi-mars 1941, le Bataillon est dirigé vers la Palestine et Michel Legrand prend part comme chef de section avec le BM 1 à la campagne de Syrie contre les troupes vichystes. Il est blessé par balle le 15 juin 1941 au Djebel Kelb. Promu sergent-chef, il est admis à suivre les cours des élèves aspirants de Damas. Il se porte volontaire, en mai 1942, pour servir comme parachutiste sous les ordres du commandant Bergé. Au sein du French Squadron, intégrée à la Special Air Service Brigade (SAS brigade) britannique, l'aspirant Legrand participe à des coups d'éclats en Libye avec comme camarades d'autres jeunes officiers, tels Zirnheld ou Martin. Les parachutistes français mènent en jeep des raids contre les aérodromes allemands. Il est à nouveau blessé par balle en combat rapproché le 12 juillet 1942 sur l'aérodrome de Fuka 16, lors de sa seconde mission, sous les ordres du capitaine Jordan. En Tunisie, les parachutistes sont chargés de harceler les arrières allemands. Lors d'un raid d'un mois début 1943, le sous-lieutenant Legrand, chef de patrouille, participe à la destruction de six camions transportant des troupes allemandes et de la voie ferrée Gabès-Sfax. Encerclé le 27 janvier, il échappe à l'ennemi au cours d'un furieux combat au corps à corps et ramène sa patrouille dans les lignes alliées après trois jours de marche dans la montagne.

Les parachutistes français sont ensuite envoyés en Grande-Bretagne. En avril 1943, lors d'une inspection à Camberley, Michel Legrand est décoré de la Croix de la Libération par le général de Gaulle. C'est ensuite en Écosse, au sein du 4e Bataillon d'Infanterie de l'Air sous les ordres du commandant Pierre-Louis Bourgoin, qu'il s'entraîne activement en vue des parachutages qui accompagneront le débarquement de juin 1944. Son séjour en Angleterre lui donne l'occasion de rencontrer sa future épouse, Margaret Page, qu'il épouse le 1er décembre 1943.

Il est parachuté en Bretagne, au-dessus des Côtes d'Armor, dans la nuit du 7 au 8 juin 1944. Il participe à la désorganisation des troupes allemandes : il fait sauter la voie ferrée reliant Loudéac et Saint-Méen le 10 juin et prend une part importante dans l'organisation des maquis et des actions des FFI dans les départements de Côtes-du-Nord et d'Ille-et-Vilaine, partageant leur danger quotidien pendant deux mois. Début août, pendant la débâcle allemande, le lieutenant Legrand défend avec une poignée d'hommes le village de Merdrignac contre un fort contingent de S.S. et leur inflige des pertes sévères. Il est grièvement blessé d'une balle dans la poitrine durant l'action.

Une fois la Bretagne libérée, avec son unité devenue le 2e Régiment de chasseurs parachutistes (2e RCP), il poursuit les combats de la libération jusqu'en février 1945 et notamment dans les Ardennes belges (opération Franklin) lors de la contre-offensive de von Rundstedt. Il mène des patrouilles audacieuses, au mépris du danger ou d'un ennemi supérieur en nombre pour renseigner le commandement américain sur le dispositif allemand. Entre-temps, le 11 novembre 1944, sur la place de l'Etoile, le 2e RCP est décoré de la Croix de la Libération par le général de Gaulle lui-même, et c'est Michel Legrand qui a l'honneur de porter le drapeau de son régiment. Il continuera de le conserver sous sa garde lors de chaque défilé.

Mais la guerre n'est pas finie, et le 8 avril 1945, il est une nouvelle fois parachuté en Hollande et devra faire face pendant une dizaine de jours (au lieu des 2 ou 3 prévus) aux troupes allemandes lors d'affrontements très violents. Sa bravoure lui vaut des félicitations de la part des Anglais.

La guerre terminée, le lieutenant Legrand reste chez les parachutistes et est envoyé en Indochine, en février 1946. En septembre 1947, tombé dans une embuscade avec son peloton de jeeps blindées, il parvient à regrouper les survivants du convoi et à repousser les violents assauts ennemis jusqu'à l'arrivée des renforts. L'opération lui coûte une quatrième blessure par balle, et prouve une fois de plus ses magnifiques qualités de soldat. Il est promu capitaine en mars 1948 et en juin de la même année il est de retour en France. Un deuxième séjour en Indochine de décembre 1950 à février 1953 le voit participer à toutes les opérations de son unité. Il fait à nouveau preuve d'esprit d'abnégation et de sacrifice. Enfin, en février 1954, il retourne en Indochine une dernière fois où il participe notamment au sein de la colonne Crèvecœur à l'opération visant à recueillir les éventuels rescapés du siège de Dien Bien Phû.

Après la fin des hostilités, il devient instructeur commando et transmet avec brio son expérience : sa compagnie d'instruction obtient vite les meilleurs résultats. Mais Michel Legrand se dépense sans compter, et doit rentrer à l'hôpital le 19 février 1955 extrêmement fatigué, malade, affaibli. Malgré les soins qui lui sont prodigués à l'hôpital militaire Grall de Saigon, il meurt le 29 mai 1955 dans un état d'épuisement complet, imputable au service. Michel Legrand est inhumé au cimetière de Bagneux.