La mémoire d'un réseau de résistance

Légende :

Plaque à la mémoire de l'action et de la répression des membres du réseau Jean-Marie Buckmaster, apposée sur la mairie de Joigny, quai-du-1er-Dragon (Yonne)

Genre : Image

Type : Plaque

Source : © Cliché Thierry Roblin Droits réservés

Détails techniques :

Photographie numérique en couleur (2004).

Date document : 2004

Lieu : France - Bourgogne - Franche-Comté (Bourgogne) - Yonne - Joigny

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Analyse média

Cette plaque a été financée suite à la collecte organisée par l'Union nationale du réseau Jean-Marie Buckmaster, et inaugurée le 15 juin 1966. C'est une plaque de marbre noir gravée en lettres dorées, posée sur le mur de façade de la mairie de Joigny, Quai du-1er-Dragon.

Le texte de l'inscription est long et précis :

« 1940 - 1944 Résistance
Le réseau Action Jean-Marie (5 000 agents),
sous les ordres de Henri-Paul Frager, arrêté le 2 janvier 1944, exécuté à Buchenwald le 3 octobre 1944,

engage la lutte dès 1940 Paris - Bouches-du-Rhône - Côte d'Azur - Côte d'Or - Dordogne - Ile-de-France - Isère - Jura - Loire - Loiret - Lorraine
- Monaco - Normandie - Oise - Pyrénées - Saône-et-Loire - Savoie -  Yonne
parachutages d'armes et d'explosifs - renseignements - sabotages - coups de main
209 tués et fusillés
275 déportés, dont 112 périrent
185 blessés

1944 - 1945 Ire armée française
À la Libération, les survivants forment à Joigny le 1er régiment des volontaires de l'Yonne
Le 7 novembre 1944, le 1er RVY rejoint la Ire armée française devant Belfort
et se bat - l'Alsace, le Rhin, la forêt Noire, le Danube
Le 8 mai 1945, 68 tués, 221 blessés
Passant, souviens-toi de ceux qui tombèrent pour la patrie et la liberté »

Il concerne l'ensemble de l'organisation de ce réseau et énumère tous les départements ou régions où il fut actif durant l'Occupation. Il cite les types d'actions accomplies par ses membres (parachutage, renseignement, sabotage, « coups de mains ») et dresse un bilan précis de la répression (tués, déportés, blessés). Il se compose de deux parties, la seconde concernant les maquisards de ce réseau dans l'Yonne qui constituèrent, à Joigny, le 1er régiment des Volontaires de l’Yonne, unité qui combattit au sein de la Ire Armée française. Un bilan précis des pertes de cette unité est également établi.

Il s'agit d'une plaque informative à vocation pédagogique et mémorielle. Elle témoigne de la mémoire d'une organisation fortement enracinée dans la ville de Joigny. Il y avait, dans cette ville et dans ses environs, un groupe local fortement structuré autour d'une famille et de son chef, Paul Herbin, qui s'affilia simultanément au mouvement Libération-Nord et au réseau Jean-Marie Buckmaster. D'autres lieux mémoriels ainsi que les noms de plusieurs rues témoignent de l'attachement de la ville à cette mémoire.


AuteursJoël Drogland et Thierry Roblin

Sources : 

CD-ROM La Résistance dans l'Yonne, AERI - ARORY, 2004.

C. Delasselle, J. Drogland, F. Gand, T. Roblin, J. Rolley, Un département dans la guerre. Occupation, Collaboration et Résistance dans l’Yonne, Paris, éd. Tirésias, 2007.

Contexte historique

Le principal réseau implanté dans le département de l’Yonne est le réseau Jean-Marie Buckmaster. Du nom du colonel Maurice J. Buckmaster, le réseau Jean-Marie Buckmaster constitue un des nombreux réseaux développés en France et en Europe. Ils dépendent du SOE (Special Operations Executive, service du ministère britannique de la Guerre économique), mis en place le 19 juillet 1940 par Churchill et ont pour principaux objectifs le renseignement, le sabotage, l’évasion de pilotes tombés chez l’ennemi et la réception ainsi que le stockage des armes parachutées.

Henri Frager est à l’origine de la création du réseau Jean-Marie Buckmaster. Dès l’été 1941, il est en contact avec André Girard, qui a formé un réseau SOE nommé Carte dans le Sud de la France. À partir de décembre 1942, en conflit avec Carte, Frager décide de fonder son propre réseau. Il l’appelle Jean-Marie ou Donkeyman. Plusieurs antennes sont créées dans presque toute la France : de Marseille, le réseau remonte la vallée du Rhône (et même davantage) jusqu’à Annecy, où un PC est installé en mars 1943 à Saint-Jorioz. Le réseau s’étend à travers tout l’hexagone grâce à des antennes créées en Normandie, dans l’Oise, dans le Jura, à Paris (où habite la sœur de Frager) et, bien sûr, dans l'Yonne.

Dans l’Yonne, le réseau est implanté dans un premier temps dans le nord du département, à Michery, par Bernard Furet et Marc Bizot, mais il a pris davantage d’ampleur dans le Jovinien et l’Aillantais où il fut implanté par Alain de la Roussilhe et Pierre Argoud, vétérinaire à Aillant-sur-Tholon.

Les agents du réseau disposent de moyens matériels importants : armes, émetteurs radio, argent, grâce aux nombreux parachutages réceptionnés. Au total, ce sont près de quatre-vingts parachutages qui ont été recensés après la Libération, dont plus d’une vingtaine dans l’Yonne. Après le débarquement de Normandie, le réseau Jean-Marie crée des maquis.

Au cours du printemps 1944, les cadres du réseau Jean-Marie Buckmaster, estimant ne dépendre que de l’état-major allié, refusent de s’intégrer dans les FFI. Le 26 octobre 1944, ils forment le 3e bataillon du 1er régiment des Volontaires de l'Yonne (RVY). Le 7 novembre 1944, sous la conduite du commandant Jacques Adam, le 1er RVY quitte Joigny en direction des Vosges et de l'Alsace. Affecté à la 2e division d'infanterie marocaine de la Ire Armée française, le 1er RVY participe aux combats de Belfort fin novembre, à celui de Michelbach début décembre, et prend part à la bataille pour la libération de Colmar en janvier 1945. Peu après, le 1er RVY est intégré dans le 35e régiment d'infanterie, avec qui il franchit le Rhin, le 18 avril 1945. Il progresse à travers la Forêt Noire jusqu’au Danube. Par Rastadt, Schweningen, Villingen, les hommes de l'ex-1er RVY arrivent le 6 mai 1945 à Stülingen.
Le 14 juillet 1945, des unités du 1er RVY participent au grand défilé de la victoire à Paris devant le général de Gaulle, les états-majors alliés et le Sultan du Maroc.


Auteurs : Joël Drogland et Thierry Roblin

Sources : 

CD-ROM La Résistance dans l'Yonne, AERI - ARORY, 2004.

C. Delasselle, J. Drogland, F. Gand, T. Roblin, J. Rolley, Un département dans la guerre. Occupation, Collaboration et Résistance dans l’Yonne, Paris, éd. Tirésias, 2007.