Inauguration d'une allée Jack-Marsden

Légende :

Inauguration d'une allée Jack-Marsden dans les bois de Chalonge, sur le territoire de la commune de Dixmont, le 9 mai 2009 - Cette allée forestière a été baptisée du nom d'un aviateur anglais, Jack Marsden, réfugié au maquis et blessé durant l'attaque de celui-ci, le 15 mai 1944
À gauche, la veuve de Jack Marsden, Marjorie Marsden, et sa fille, Janet, présentes à l'inauguration et, pour Marjorie, chaque année pour les commémorations, témoignent des activités de leur père et époux

Les 9 et 10 mai 2009, sur une initiative de Jean-Luc Prieur, les municipalités des villages des Bordes et de Dixmont ont organisé des cérémonies à la mémoire des deux maquis Bourgogne, implantés dans les bois proches. Le samedi 9 mai, plusieurs routes et chemins ont été baptisés du nom des maquis et de celui d'un maquisard tué au combat

Genre : Image

Type : Panneau

Source : © Collection Janet Marsden Droits réservés

Détails techniques :

Photographie numérique en couleur (2009). Voir aussi l'album photo lié.

Date document : 9 mai 2009

Lieu : France - Bourgogne - Franche-Comté (Bourgogne) - Yonne - Dixmont

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Analyse média

Un piquet métallique sur lequel est fixée une plaque de couleur bleue portant une inscription en lettres blanches « Allée Jack Marsden », est fixé à l'intersection d'un chemin vicinal goudronné conduisant au hameau de Chapitre puis à Villeneuve-sur-Yonne, et d'une allée forestière s'enfonçant dans les bois de Chalonge, à deux kilomètres du village de Dixmont.

Le petit maquis FTP Bourgogne était installé à 500 mètres à l'intérieur des bois quand il fut attaqué le 15 mai 1944. Le maquisard André Dussault fut tué au cours de l'attaque et une stèle à sa mémoire fut construite en 1946, au même endroit. Elle est l'objet, chaque année en mai, d'une cérémonie organisée par l'ANACR du Sénonais et la municipalité de Dixmont.

L'aviateur Jack Marsden, dont l'avion avait été abattu et qui s'était réfugié dans ce maquis, fut gravement blessé au cours de l'attaque et fait prisonnier par l'ennemi. Un mois plus tard, un groupe FTP parvenait à le faire évader de l'hôpital de Sens où il était soigné.

Jack Marsden était revenu dans l'Yonne dans les années 1970, et depuis sa mort, son épouse Marjorie et sa fille Janet assistent presque chaque année aux cérémonies commémoratives. Janet a entrepris de minutieuses recherches pour reconstituer la totalité du périple qu'a suivi son père après avoir été recueilli par un maquis de l'Yonne. Le 9 mai 2009, en compagnie de sa mère, elle retrace cette aventure pour le public qui vient d'assister à l'inauguration de cette allée.

Dans le bois, une pierre non gravée indique exactement l'emplacement du maquis. Le chemin vicinal goudronné a reçu le nom de « Route André Dussault ». En 2013, un des neuf panneaux répartis sur les chemins de randonnée « Sur les pas des maquis Bourgogne » a été implanté près de la plaque de l'allée Jack-Marsden. Un texte expose au randonneur l'histoire du maquis et celle de l'aviateur.

Ce lieu est donc significatif de l'importance de la mémoire des maquis dans cette région de la forêt d'Othe.

[Voir l'album photo lié.]


Auteur : Joël Drogland

Sources :

CD-ROM La Résistance dans l'Yonne, AERI - ARORY, 2004.

C. Delasselle, J. Drogland, F. Gand, T. Roblin, J. Rolley, Un département dans la guerre. Occupation, Collaboration et Résistance dans l’Yonne, Paris, éd. Tirésias, 2007.

Site Internet de la Famille Marsden

Contexte historique

L'inauguration de cette plaque était intégrée dans un ensemble de deux journées commémoratives, sur une initiative de Jean-Luc Prieur, soutenue par les deux municipalités des villages des Bordes et de Dixmont, distants de quatre kilomètres.
Jean-Luc Prieur est le petit-fils d’Alfred Prieur, résistant sénonais arrêté en octobre 1943 et déporté. Très attaché au souvenir de son grand-père, passionné par l’histoire de la Résistance, collectionneur, il a créé en 1995 l'Association pour un musée mémorial de la Résistance de l’Yonne, qui consacre toutes ses « forces et disponibilités dans les actions mémorielles ». Outre l’organisation de nombreuses expositions, il a été à l’origine de la pose de plaques ou de la réalisation de stèles et monuments qui matérialisent dans le nord de l’Yonne le souvenir des résistants et des aviateurs alliés. Il réussit à convaincre les maires des Bordes et de Dixmont - villages sur les territoires desquels deux maquis portant le même nom, Bourgogne, avaient agi et combattu en 1944 - de rendre hommage aux maquisards par un ensemble de manifestations.

Cependant, il fallait tenir compte de l'histoire complexe des deux maquis et d'une mémoire locale un peu lourde compte tenu de certains événements, pour commémorer sans provoquer, pour honorer sans tricher avec ce que l’on sait de la réalité. Jean-Luc Prieur demanda à l’ARORY de bien vouloir participer au projet dans son domaine de compétence : celui d’écrire l’histoire dans le respect de ses méthodes. L’objectif étant que les habitants participent aux commémorations et enrichissent leur connaissance des événements qui se sont déroulés en forêt d’Othe pendant la Seconde Guerre mondiale.

Le village des Bordes compte 492 habitants et celui de Dixmont, 896. La population de chacun des deux villages se répartit entre le bourg et une douzaine de hameaux. La Résistance en forêt d’Othe se caractérisa par la présence de nombreux petits maquis mobiles, par l’implantation de deux gros maquis de combat durant l’été 1944 et par l'existence d’un dense réseau de résistants sédentaires, individus, familles, groupes de sabotage, qui étaient le soutien logistique de ces maquis. Pour toutes ces raisons, dans beaucoup de familles de cette région l’histoire de la Résistance ne laisse pas insensible, d’autant plus que la structure par âge révèle que de nombreux habitants ont vécu la période de l’Occupation : 68 habitants des Bordes, soit près de 15 % ont plus de 70 ans.

Malgré un temps gris et pluvieux, 70 personnes au moins ont participé à toutes les inaugurations : anciens résistants et porte-drapeaux de l’ANACR, habitants des villages, membres des familles de maquisards, en présence de nombreux élus locaux. La conférence, organisée le samedi soir aux Bordes a été suivie par une centaine de personnes, attentives et curieuses, venues des villages environnants et même de plus loin (Auxerrois, Aillantais, Puisaye). Les élèves des écoles primaires des Bordes et de Dixmont ont été associés par la venue d'un historien de l'ARORY dans les classes.

L’histoire et la mémoire ont été associées au cours de ces deux journées. Par définition, les commémorations sont affaire de mémoire. Ceux qui y participent le font pour rendre hommage à l’un des leurs ou pour défendre un message ; ils se souviennent ensemble, partagent des émotions. En revanche, les historiens - du moins dans l’exercice de leur métier - prennent du recul par rapport à l’événement, imposent la pratique de méthodes qui permettent la critique : ils sont plus dans le registre de la raison que dans celui de l’émotion.
Ceux qui avaient vécu les événements se sont exprimés et ont pu être entendus. Grande fut l’émotion à l’écoute de M. Cousin, ancien maquisard du second maquis Bourgogne et de Madame Solmon, qui revécut devant les ruines de sa ferme sa destruction par des grenades incendiaires le 3 août 1944. L’opposition n’est cependant pas absolue et il est facile de constater qu’il y a une demande de mise en perspective historique de la part de ceux qui participent aux commémorations. La défense des valeurs et le message affirmant des principes demeurent indispensables, mais le besoin d’histoire est ressenti. Les organisateurs avaient pris en compte cette exigence. Des explications historiques simples ont été fournies sur les lieux des cérémonies et une conférence a été organisée, portant sur la vie quotidienne à Dixmont et aux Bordes sous l’Occupation, puis sur les caractéristiques des maquis de la forêt d’Othe, permettant de replacer à une autre échelle l’histoire des maquis Bourgogne.

Ces commémorations n’ont pas épuisé le projet global porté par Jean-Luc Prieur et les municipalités. La prochaine étape a été la création d’un réseau de sentiers de randonnée pédestre assurant la liaison entre les différents lieux qui furent ceux de l’histoire des maquis Bourgogne.


Auteur : Joël Drogland

Sources :

CD-ROM La Résistance dans l'Yonne, AERI - ARORY, 2004.

C. Delasselle, J. Drogland, F. Gand, T. Roblin, J. Rolley, Un département dans la guerre. Occupation, Collaboration et Résistance dans l’Yonne, Paris, éd. Tirésias, 2007.

Site Internet de la Famille Marsden