Enveloppe contenant une sorte de bande dessinée

Légende :

Un jeune résistant traduit par une série de dessins un coup de main pour récupérer des armes le 5 septembre 1943.

Genre : Image

Type : Bande dessinée

Producteur : Producteur : réalisation Paul Gay

Source : © Archives Denise Jansen Droits réservés

Détails techniques :

Enveloppe en carton rigide (22 x 31 cm).

Date document : Sans date (1992 ?)

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme - Romans-sur-Isère

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Analyse média

Dix dessins (voir l’album), dont le support est un morceau de feuille de papier à dessin, sont collés sur les faces intérieures d'une enveloppe rigide destinée à l'envoi postal. On aperçoit les ondulations du carton ondulé. Les dessins sont réalisés au crayon à papier.

Sur l’enveloppe sont écrits :

En haut à droite :
"Petite promenade septembre 1943" 

En dessous :
- à gauche : "AUTHENTIQUE" ;
- à droite : "2 cartes du massif du Vercors, plan du wagon, camps du Vercors et cartes adresses". 

Au niveau de la tache :
"Jacquelin (P JN) pour Paul Jansen ; Zizine (J. Chapus) pour Jean Chapus ; Titou (P Gay) pour Pierre Gay".

En bas :
"10 dessins de Titou (Pierre Gay)
effectués quelques jours après l'aventure.
Titou avait alors 16 ans.
Il est décédé en 19
(?)".

Quand on agrandit ce qui est barré, on peut se poser la question de la date de réalisation de ce montage sur l'enveloppe cartonnée. Il semblerait que l'on ait collé les dessins plusieurs années après leur réalisation. Les codes d'envoi du document tels qu'on peut les déchiffrer semblent montrer que l'enveloppe-chemise aurait été postée dans les années 1990 (05/10/1992 ?). Peu importe. Ce qui compte ce sont les dessins (voir l'album), naïfs, qui relatent un épisode qui aurait pu mal se terminer pour trois jeunes hommes.

L'affaire s'est déroulée le 5 septembre 1943. Elle est intitulée, une petite promenade sous le signe de la Légion. Les vignettes 3, 4, 5 montrent trois jeunes garçons marchant en direction d'un camp, comme le suggère la tente, puis repartent accompagnés par une personne qu'ils regardent (5). 6, 7 et 8 montrent des scènes se déroulant dans un compartiment de wagon puis à l'extérieur de celui-ci. 8 et 9 permettent de localiser l'action : la gare de Saint-Vallier (Saint-Vallier-sur-Rhône). La vignette 10 montre un car qui s'éloigne avec 3 paquets sur la galerie de toit.

L'histoire de l'aventure de trois garçons permet de décrypter cette petite bande dessinée.


Auteur(s) : Alain Coustaury

Contexte historique

Les dessins relatent l'aventure de deux jeunes garçons et d'un adulte. L'épisode se déroule en septembre 1943. Paul Jansen (« Jacquelin ») directeur de la récente Maison des jeunes de Romans-sur-Isère propose à deux garçons d'accomplir une mission dangereuse. Jean Chapus (« Zizine »), 18 ans, Pierre Gay (« Titou ») adhérents à cette institution de Vichy acceptent avec enthousiasme la suggestion. Il s'agit d'aller récupérer des armes au château de La Pérouze à Saint-Sorlin-en-Valloire à 40 km au nord de Romans-sur-Isère. Situé en pleine campagne, au milieu d'un grand parc arboré, le château abrite depuis mars 1943 le responsable de la Résistance en Drôme-nord, Jean Drouot (« L'Hermine »). Ce dernier; avant cette nomination, avait été le directeur de l'école installée dans le château de Saint-Sorlin-en-Valloire. Au moment de l'aventure de Zizine et de Titou, Drouot a recruté une équipe de jeunes, ceux que l'on dénomme les « Mousquetaires de l'Hermine ». Ils seront les chefs de nombreuses compagnies de Résistants drômois. Le 12 août 1943, Drouot réceptionne le premier parachutage d'armes dans le nord de la Drôme. Ce sont des armes parachutées que viennent chercher les jeunes Romanais.

Paul Jansen fixe un rendez-vous aux garçons : à 6 heures près du pont qui franchit l'Isère à Romans. Pour donner le change, les garçons devront être en chemise et short bleu. À la boutonnière, ils porteront l'insigne de la Légion des combattants. À l'heure dite, les deux garçons sont rejoints par Paul Jansen. Ils prennent un car jusqu'à Saint-Vallier puis un train qui les conduit à la gare de Saint-Rambert, point de départ de la ligne Saint-Rambert-d'Albon – Rives. De là, ils rejoignent, en faisant de l'auto-stop, le château de la Pérouze à Saint-Sorlin-en-Valloire (il y a eu, parfois, confusion entre ce château et la commune de Lapeyrouse-Mornay située à moins de 10 km au nord). Le parc du château abrite un terrain de camping, des tentes pour jeunes. C'est ce qu'évoque le dessin 4. Les trois Romanais sont conduits devant Jean Drouot qui dirige cette activité pour jeunes, activité qui lui sert de couverture pour son action dans la Résistance. Des armes, trois STEN, des grenades, des cartouches sont chargées dans les sacs « tyroliens » (des sacs Lafuma fabriqués tout près, à Anneyron). Lourdement chargés, les Romanais prennent le chemin du retour, un moment accompagnés par Jean Drouot (dessin 5) qui les avertit de ne pas utiliser le train car il y a un risque de se faire contrôler. N'ayant pas été inquiétés le matin, ils ne tiennent pas compte de l'avertissement et reprennent le train. Au bout de quelques minutes Titou se dirige vers les toilettes. Ils ne sont plus que deux. À un arrêt, deux Allemands montent dans le train. Ils contrôlent les passagers et arrivent devant Jacquelin. Un Allemand soulève son sac, fouille dans les poches latérales, ne trouve rien. Il demande que l'on ouvre le sac de Titou qui, sur ces entrefaites, rejoint sa place. Pendant toute cette fouille, Zizine et Jacquelin songent à sauter du train qui roule à 60 km/h. Titou est contraint à dénouer les cordons du sac, Zizine l'aide en renouant les mêmes cordons... Le sac est finalement ouvert et apparaît une couverture. En-dessous, bien enveloppées dans des chiffons, les armes sont là. L'Allemand plonge ses mains dans le sac. Devant cette situation, les trois Romanais sont prêts à sauter du train. Ce n'est plus nécessaire car l'Allemand retire ses mains sans avoir rien trouvé. Il discute avec son camarade, prend des notes. Le train s'arrête à ce moment-là en gare de Saint-Vallier. Sur le quai des soldats allemands sont alignés. Inquiets, les trois Romanais descendent, se faufilent discrètement parmi les nombreux voyageurs et sortent de la gare. Ils rejoignent le car, jettent leurs sacs sur le toit, prennent leur billet, montent dans le véhicule et rejoignent Romans. Accueillis par le père de Zizine, les trois « aventuriers » relatent leur aventure, plongent leurs mains dans leur sac et font l'expérience de savoir ce qu'a pu ressentir l'Allemand en cherchant dans les sacs. Jacquelin donna ses impressions en pensant que le soldat avait cru palper des ustensiles de camping... Par cette action, risquée, le groupe « Daniel » reçut son premier armement.

Ce récit est fait à partir des dessins de Pierre Gay, du témoignage de Jean Chapus et de l'ouvrage cité en référence. Il y a plusieurs divergences sur les lieux d'arrêt du train et sur quelques détails. L'auteur fait toutefois plus confiance au témoignage de Jean Chapus et aux dessins, réalisés quasiment « à chaud ».


Auteur(s) : Alain Coustaury
Sources : Henri Chosson, Marcel Desgranges, Pierre Lefort, Drôme nord, terre d'asile et de révolte 1940-1944, Éditions Peuple Libre, 1993.