Burek Lejb Szwarcbart

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © Collection famille Szwarcbart Droits réservés

Détails techniques :

Photographie analogique en noir et blanc

Date document : sans date

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Rhône - Lyon

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Contexte historique

Burek, Lejb Szwarcbart naît le 17 décembre 1915 dans la communauté juive de Kalisz, ville industrielle à vocation textile, alors sous administration de la Russie impériale, en guerre contre l’Allemagne. De 1915 à 1945, cette ville passera successivement sous administration allemande, polonaise puis à nouveau allemande avant de redevenir polonaise. Burek est le fils d’Abraham, façonnier, caoutchoutier, et d’Esther Zeiff, déjà parents de Brana née en 1914, puis d’un second fils qui naîtra en 1921 et sera prénommé David. À la fin des années 1920 ou au début des années 1930, fuyant les pogroms, tous quittent Kalisz pour Paris et s’installent au 8 de la rue de l’Agent Bailly, dans le IXe arrondissement.

Le 18 février 1938, par décret de la République française, Burek obtient la nationalité française qu’il a demandée. Il choisit alors les prénoms de Bernard et de Léon. Il semblerait qu’il ait privilégié, à certains moments de son parcours, son deuxième prénom. Bernard Szwarcbart n’a pas effectué de service militaire mais il est appelé au service armé (classe 1939) le 15 novembre 1939. Affecté au Dépôt de cavalerie n°4, il arrive au corps pour être incorporé le 28. Les archives ne permettent pas de savoir s'il a participé aux combats de mai-juin 1940. N’ayant pas effectué la totalité de ses obligations militaires, il n’est pas renvoyé dans ses foyers à l’été 1940 comme la plupart des mobilisés. Il est affecté le 31 août 1940 au 18e Régiment de dragons, présent le 1er septembre 1940 à la formation du 6e Cuirassiers, mis en route sur Marseille le 27 décembre 1940 et ne sera libéré que le 8 mars 1941, date à laquelle il remonte vraisemblablement à Paris.

Le 15 janvier 1942, dans le XXe arrondissement de Paris, Bernard épouse Dwojra Rozencwajg, couturière. En juin, ils quittent la capitale pour Lyon, peu de temps avant que les mesures raciales du régime nazi relayées par le gouvernement de Vichy ne s’abattent sur Paris et frappent sa famille lors de la rafle du Vél’ d’hiv’. Le 9 janvier 1943, à Lyon, Bernard et Dwojra sont parents d’un garçon qu’ils prénomment Michel. À cette époque, ils fréquentent Nicolas Aizemberg, probablement rencontré dans les rangs de la Main d’oeuvre immigrée (MOI), organisation mise en place par le parti communiste et la Confédération générale du travail unitaire (CGTU).

De juin à novembre 1943, Bernard, Dwojra et Nicolas Aizemberg sont à Lyon, présents et actifs au sein de Carmagnole, unité lyonnaise des Francs-tireurs et partisans de la Main d’oeuvre immigrée (FTP-MOI), constituée d’étrangers agissant aux côtés des Francs-tireurs et partisans français (FTPF). Dans la Résistance, Bernard est devenu Guillaume, son épouse Huguette et Nicolas Luc. En décembre 1943, tous trois sont mutés à Grenoble où Nicolas va assumer la responsabilité départementale des FTP-MOI de l’Isère et où Bernard, qui sera son second, aura pour tâche de l’accompagner dans ses missions de repérage des lieux et des mouvements de l’occupant et aussi de l’assister dans son rôle d’organisateur.

Au début de l’année 1944, Bernard, son épouse et son fils, de même que Nicolas Aizemberg, habitent tous au 7 de la rue Arago à Grenoble. Tout près de chez eux se trouve le 7 bis qui abrite un local de l'OEuvre de secours aux enfants (OSE) dont la mission est d’organiser le sauvetage des enfants juifs en les acheminant vers la Suisse. Pour subvenir aux besoins de sa famille, Bernard travaille dans le secteur du textile comme confectionneur d’imperméables et, dans la clandestinité, il est un résistant extrêmement actif. Il enchaîne les sabotages de voies ferrées (janvier 1943 et janvier 1944),les attentats contre des entreprises métallurgiques et de sciage (15 et 17 décembre 1943 et avril 1944), la destruction de deux voitures et de trois camions allemands (juin 1944). Ses compétences et son comportement le font accéder au grade de lieutenant des Forces françaises de l’intérieur (FFI). De son côté, son épouse est également extrêmement active. Tant à Lyon qu’à Grenoble, son activité est aussi impressionnante que diversifiée. À Lyon, repérage du camion-radio détectant les émetteurs clandestins, collecte de renseignements et surveillance pour diverses opérations : destruction de transformateurs, récupération d’armes sur policiers, sabotage d’usines… À Grenoble, participation à la récupération d’explosifs dans les carrières de la Porte de France, transport d’armes de toute nature, subtilisation de cartes de rationnement… À Domène et à Allevard, au moment de la Libération, repérages visant à la réduction des nids de résistance des Allemands en retraite.

Le 11 juillet 1944, Bernard et Nicolas sont arrêtés au passage du Rondeau à Grenoble, au retour d’une entrevue avec le commandant départemental de l’Armée secrète, réunion portant sur les mesures à prendre en lien avec le maquis du Vercors sur le pied de guerre depuis le débarquement allié en Normandie. Entrevue qui elle-même fait peut-être suite à une visite d’approche des servants polonais de la batterie d’artillerie de la Wehrmacht postée à Seyssinet-Pariset, approche ayant vraisemblablement eu pour but de tenter de les convaincre de déserter. Bernard et Nicolas sont alors acheminés vers les locaux du SD (Sicherheitsdienst / Service de renseignement allemand) situé hôtel Gambetta, avenue maréchal Pétain, puis conduits vers une cellule de la prison située en face, dans un bâtiment intact de la caserne de Bonne partiellement détruite en décembre 1943 par un soldat polonais de la Wehrmacht à qui des résistants de l’Armée secrète avaient fourni des détonateurs.

Dans la nuit du 21 au 22 juillet 1944, Bernard est extrait de sa cellule pour être transporté en camion vers le Désert de l’écureuil à Seyssinet-Pariset. Au cours de ce transport, il retrouve Marco Lipszyc et Nicolas Aizemberg. À sa descente du camion, Bernard, comme les neuf autres détenus, est abattu au pistolet-mitrailleur par des membres de la Sipo-SD allemande et des Français des Jeunes de l’Europe nouvelle (JEN) dits à tort Waffen-SS français. Le 22 juillet 1944 vers midi, le maire de la commune de Seyssinet-Pariset est averti par un membre des JEN de la présence de corps sur le bord de la route de Saint-Nizier-du-Moucherotte. En début d’après-midi et avec une escorte allemande, il se rend au Désert de l’écureuil où les rejoignent des habitants et des pompiers qui ont été avertis. À l’arrivée sur le site, neuf corps sont immédiatement décomptés. Le dixième corps est trouvé un peu plus tard à 50 mètres des autres, masqué par les fourrés. Ce corps, sans vie, est celui de Bernard Szwarcbart, qui blessé, a essayé de se soustraire à ses tueurs en étouffant ses plaintes avec des morceaux de chemise dont il a bourré sa bouche. Le maire fait alors procéder à l’acheminement des corps vers le cimetière, où bravant la menace de représailles à son encontre, menace qui lui a été faite en cas de tentative d’identification, il prend des notes, fait prélever divers petits objets et prendre les dix corps en photo puis fait ensuite procéder à leur enfouissement en tombes individuelles. Le 11 septembre 1944, Dwojra Rosencwajg, enceinte, reconnaît le corps de son époux.


Auteurs : Pierre Bourgeat, Claude Collin

Sources et bibliographie
:

Archives de la ville de Seyssinet-Pariset.
Académie de Créteil pour témoignage de sa nièce Annette Bursztejn-Maslyzyck
Archives départementales de l’Isère 
Archives départementales-Mémorial de l’oppression du Rhône
Archives nationales de France
Maitron des fusillés 
Mémorial GenWeb
SHD Mémoire des hommes.