Jeune Combat, journal de l’Union de la jeunesse juive

Légende :

Jeune Combat, journal de l’Union de la jeunesse juive, n°2 du 5 juillet 1943

Type : Presse clandestine

Source : © gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France Droits réservés

Date document : 5 juillet 1943

Lieu : France

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Analyse média

De juin 1943 à septembre 1944, ce sont entre vingt et trente numéros de Jeune Combat, l’organe officiel de l’UJJ qui ont été publiés. Le dernier de la période clandestine, le seul qui soit imprimé, sorti fin août 1944, porte le numéro 22, mais il semble qu’à diverses occasions des numéros spéciaux aient été diffusés. Jeune Combat est un document ronéotypé qui se limite souvent à une feuille 21 x 27 recto-verso, mais certains numéros ont jusqu’à six pages.

De quoi traite cet organe ? D’une part de la guerre, de la situation politique, de la Résistance en général et, d’autre part, de la situation des Juifs dans cette tourmente. Il semble qu’il y ait une volonté de traiter, en quantités à peu près égales, ces deux thématiques et cela se manifeste presque jusque dans la mise en page.

Le numéro deux, présenté ici, daté du 5 juillet 1943 appelle, dans un pavé central à célébrer le premier anniversaire de la rafle du Vel’ d’hiv (16.07.1942) et de faire de cette date "une journée de deuil et de vengeance". La moitié gauche de cette une, sous le titre "Jeunes Juifs, c’est à nous de les venger !" évoque cette journée tragique. Quant à la moitié droite de cette page, elle traite, sous le titre "Quatorze juillet", de la révolution de 1789, évoque la devise "Liberté, égalité, fraternité", foulée aux pieds par le régime de Vichy, et surtout rappelle la mobilisation pour défendre cette première république attaquée par l’étranger.

La une du numéro quatre de Jeune Combat du 15 août 1943 se divise en deux grandes masses. À gauche de la page, sous le titre "Renforçons l’armée de la libération ! Soyons dignes de ceux qui journellement meurent pour la libération commune !", sont évoquées la contre-attaque soviétique succédant à l’offensive allemande de juillet 1943 et l’avancée des troupes alliées en Italie. Sur la partie droite de la page, dans un article intitulé "Pour l’action vengeresse et libératrice ! Vive l’union de la jeunesse juive de France", l’organe de l’UJJ annonce que "l’unité entre les diverses organisations juives vient de se réaliser par la constitution à Grenoble d’un Comité local pour la défense des Juifs (Isère, Savoie, Haute-Savoie)".

Le numéro onze du 3 décembre 1943 rend compte de diverses actions de la Résistance ayant eu lieu dans les semaines précédentes (le 11 novembre à Grenoble et à Oyonnax, un sabotage à Lyon, une exécution de milicien à Thônes). Les anniversaires du début de l’offensive de Stalingrad (19 novembre 1942) et du sabordage de la flotte française à Toulon (27 novembre 1942) sont évoqués. Mais par ailleurs, en première page, un encadré met en garde les Juifs étrangers : "Nous apprenons de source sûre que la préfecture de l’Isère a remis à la Gestapo la liste des Juifs étrangers résidant dans ce département. Nos groupes de l’UJJ alerteront ces Juifs et prendront les mesures nécessaires pour faire échec à la Gestapo." Par ailleurs, un article est consacré au "massacre des Juifs en Pologne" : "Depuis l’occupation de la Pologne par les hitlériens, 2 500 000 Juifs, femmes enfants et vieillards ont été assassinés. Seuls quelques centaines de milliers de Juifs survivent encore à cette hécatombe."

Il ne nous semble pas nécessaire d’accumuler les exemples, mais l’examen détaillé de la collection disponible de Jeune Combat illustre parfaitement le projet de l’organisation de jeunesse de la section juive de la MOI, "lier la lutte de la jeunesse juive à celle de la jeunesse française."


Auteur : Claude Collin

Bibliographie :
- Claude Collin, Jeune Combat. Les jeunes juifs de la MOI dans la Résistance, Grenoble, PUG, 1998.

Contexte historique

Jeune Combat est l’organe de presse clandestin de l’Union de la Jeunesse juive (UJJ) « Organe de rassemblement de la jeunesse juive en lutte contre l’Hitlérisme et pour la libération de la France » peut-on lire dans les premières publications. L’UJJ est une structure de masse animée par de jeunes communistes de la section juive de la Main d’œuvre immigrée créée au printemps 1943. Elle mène des missions de propagande dans la lignée d’autres groupes de juifs résistants comme l’Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide (UJRE) ou le Mouvement national contre le racisme (MNCR), et des actions de lutte armée.

Jacques Kott, l’un des dirigeants de l’UJJ en zone Sud, est responsable de la publication Jeune Combat. Dans un témoignage recueilli à Paris par Claude Collin en avril 1992, il se souvient : « Nous faisions des lancers de tracts, nous collions des papillons. A partir du printemps ou de l’été 1943, nous avons commencé à sortir un journal ronéotypé Jeune combat pour dénoncer les atrocités allemandes, pour mobiliser contre Vichy et la politique de collaboration, pour protester contre les rafles et les déportations ».

En tout plus d’une vingtaine de numéros de Jeune Combat auraient été publiés de juin 1943 jusqu’à septembre 1944, notamment par Maurice Bursztyn, qui a imprimé de nombreux journaux clandestins pour le MNCR à Lyon et Grenoble et qui souligne que les infrastructures d’imprimerie sont communes. Le journal clandestin Jeune Combat est un document ronéotypé qui se limite souvent à une feuille 21 x 27 cm recto verso même si de rares numéros comptent six pages. La ligne éditoriale du journal vise à unir la jeunesse juive. Le journal se fait d’ailleurs l’écho des difficultés rencontrées dans l’union avec la jeunesse sioniste. Mais les thèmes développés dans le journal Jeune Combat sont les mêmes que ceux que les lecteurs rencontrent dans la presse communiste juive de l’époque. On y parle de la guerre, de la situation politique, de la Résistance et de la situation des Juifs. Mais il s’agit avant tout de faire de la propagande pour recruter dans le cadre de la lutte armée. Par exemple le numéro de juillet 1943 commémore la rafle du Vel d’hiv qui a eu lieu un an avant à Paris le 16 juillet 1942 en appelant à la vengeance et en incitant les Juifs à faire la grève et à se lancer dans des actions de sabotage.

Le journal a fait l’objet de critiques après-guerre. On lui reprochait de ne pas se consacrer suffisamment à la résistance juive. L’historien Claude Collin rappelle que ce journal, destiné à la jeunesse juive mais aussi à ses sympathisants, était contrôlé par des communistes et s’inscrit de ce fait dans la politique du parti communiste clandestin.


Auteur : Hélènse Staes

Sources et bibliographie
- Claude Collin, Jeune Combat. Les jeunes juifs de la MOI dans la Résistance, Grenoble, PUG, 1998.
- Des exemplaires sont consultables sur Gallica, bibliothèque numérique de la Bibliothèque nationale de France
- Annette Wieviorka, Ils étaient juifs, résistants, communistes, Paris, Denoël, 1986.