Nephtali Raymond Levy dit lieutenant Leblond

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © Mémorial de la Shoah, Paris (France) Droits réservés

Détails techniques :

Photographie analogique en noir et blanc

Date document : sans date

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Contexte historique

Fils de Moïse Marcel Lévy, négociant, et d’Alice Rein, Raymond Levy naît le 13 janvier 1913 à Mulhouse. Il obtient son baccalauréat avec mention latin – sciences – philosophie en juillet 1929. Entre 1929 et 1931, il suit les cours de l’Ecole supérieure de filature, tissage et bonneterie de Mulhouse où le brevet d’ingénieur textile lui est délivré.
Titulaire d’un brevet de préparation militaire supérieur, devançant son appel sous les drapeaux prévu en 1933, il souscrit un engagement volontaire au titre du 2e Bataillon de Chasseurs à pied (BCP) en octobre 1931. Admis à l’Ecole militaire d’infanterie, il suit le cours spécial des élèves officiers de réserve. Par décret du 4 avril 1932, il est promu sous-lieutenant de réserve et affecté au 31e BCP. En mai 1932, il suit les cours de l’Ecole des Transmissions de Versailles. Les années 1932 à 1938 sont marquées par diverses périodes d’instructions et de stages. Ses supérieurs ne tarissent pas d’éloges sur cet officier de réserve : "Zélé et dévoué - tenue et dignité : parfaite", "bon officier de transmission apte à remplir son emploi en campagne", "Officier remarquablement intelligent et travailleur, animé d’un excellent esprit, discipliné et consciencieux"…
Par décision ministérielle du 26 août 1939, il est rappelé à l’activité au 152e RI et promu au grade de lieutenant. Ingénieur textile dans le civil, son employeur sollicite sans succès son retour dans l’entreprise en sa qualité de "spécialiste de la fabrication des tissus pour toiles de tentes individuelles selon une méthode instaurée par lui et qui augmente considérablement la qualité de ces tissus".

D’origine juive, il se convertit au protestantisme en 1939. Démobilisé le 5 août 1940, il s’installe à Labastide-Rouairoux dans le Tarn où sa spécialité est hautement appréciée des tisserands de la localité. Il y prend le poste de directeur des tissages de la manufacture Bourget. Raymond Levy participe à l’implantation de l’Armée secrète à Saint Amans et Labastide et en devient l’un des principaux animateurs. Il en prend le commandement dans les premiers mois de 1943.

Le 6 juin 1944, répondant à l’appel à la mobilisation, Levy-Seckel gagne le maquis de l’Armée juive de l’Espinassier et dirige son intégration au sein du Corps franc de la Montagne noire sur le Pic de Nore, près de la frontière des départements de l'Aude et du Tarn. D’abord adjoint à un chef d’escadron, il s’impose rapidement par ses qualités militaires et est promu commandant du 4e escadron. Proposé à cette fonction de chef d’escadron, c’est lui-même qui aurait demandé à commander le "peloton israélite" baptisé "peloton Trumpeldor" ou "peloton bleu-blanc" intégré au 4e escadron. L’escadron de Levy-Seckel se compose de trois pelotons commandés respectivement par l’adjudant-chef Pierre Loeb, le sous-lieutenant Knaff et le lieutenant Jélénik.

A la tête de ses hommes, il participe aux combats de "La Rouge" près de Saissac le 29 juin 1944, puis de Laprade le 20 juillet. Pour ne pas risquer de graves pertes, les officiers du Corps Franc décident le décrochage général et la dispersion. Levy-Seckel qui connait bien la région, cherche alors un repli pour son escadron. Les premier et troisième pelotons, partis sous sa conduite, campent successivement à La Prade, Vaissières-le-Bas, Pic de Nore, Le Baylé et Sales.

Le 4 août 1944, il se rend aux Pradelles pour assister à une réunion de l’état-major du CFMN mais ne peut approcher du village occupé par les troupes allemandes. Il se rend alors à Mazamet où il s’entretient avec Roger Monpezat, commandant le CFMN. Ce dernier lui confie une mission auprès des chefs d’escadron cantonnés à Lacaune et Cambon. Avant d’accomplir sa mission, Levy-Seckel souhaite donner des instructions à son escadron cantonné à Ferrals-les-Montagnes. Mais il ne rejoindra jamais ses hommes. Arrêté par des Allemands à Biron – près de Salès - il est emmené à Lespinassière (Aude) et fusillé le lendemain matin.

Ce n’est que le 4 septembre 1944 que la trace de Levy-Seckel est retrouvée. Ce jour-là, un jeune homme demeurant à Sales révèle qu’un mois auparavant deux de ses camarades ont été requis par les Allemands pour ensevelir les corps de deux hommes qu’ils venaient de fusiller. Sur présentation de photographies, les habitants reconnaissent alors l’une des deux victimes, Raymond Levy-Seckel. Rendus sur les lieux de l’exécution, les hommes y découvrent une tombe fraichement fleurie ornée d’une croix de Lorraine et d’une planche gravée ainsi : "Ici reposent deux patriotes inconnus assassinés par les Allemands – Morts pour la France le 5.8.44". Exhumé quelques jours plus tard pour identification officielle, ses camarades reconnaissent formellement leur lieutenant. Un acte de décès est dressé à la mairie de Lespinassière et transcrit sur le registre de la mairie de Labastide-Rouairoux. Le corps de Raymond Levy-Seckel est ensuite transféré au cimetière protestant de Labastide-Rouairoux dans une concession familiale.

Le 22 septembre 1944, le chef de bataillon Roger Monpezat, commandant du Corps franc de la Montagne noire cite le lieutenant Levy-Seckel à l’ordre du corps-franc : "Résistant de la première heure, chef de l’AS de Saint-Amans depuis le 5 décembre 1942. Commandant d’escadron possédant de belles qualités militaires et animé d’un ardent patriotisme. En toutes circonstances a commandé son Escadron avec sang-froid, courage et autorité. Tombé dans une embuscade, le 5 août 1944, au cours d’une liaison, a été fusillé par les troupes allemandes". Déclaré "mort pour la France" le 8 février 1945, il est élevé au grade de capitaine à titre posthume le 1er octobre 1945. Le 25 avril 1945, il est cité à titre posthume à l’ordre du corps d’armée avec attribution de la croix de guerre avec étoile de vermeil. Par décret du 15 septembre 1945, il est nommé chevalier de la Légion d’Honneur à titre posthume, avec attribution de la croix de guerre avec palme. Enfin, le 24 avril 1946, il est décoré de la médaille de la Résistance française à titre posthume.

Une stèle érigée en 1945 à Lespinassière sur les lieux de son exécution honore sa mémoire.


Auteur : Fabrice Bourrée

Sources et bibliographie :
Service historique de la Défense, Vincennes : 8 Ye 67379 et GR 16P 370 761.
Service historique de la Défense, DAVCC Caen : AC 21P 78450.
Archives départementales du Tarn, 109J3.
Archives Yad Vashem.
Ordre de la Libération, archives de la commission nationale de la médaille de la Résistance française.
Jacques Lazarus, Combattants de la Liberté, 1995.