Claude Ducreux:contre la censure, l'information clandestine s'organise

Légende :

Extrait du témoignage de Claude Ducreux, dans lequel il évoque l'organisation de l'information clandestine, en février 2009

Genre : Film

Type : Témoignage filmé

Source : © AERI Droits réservés

Détails techniques :

Durée de l’extrait : 00:02:52

Tournage et montage : Nicolas Voisin

Interview réalisée par Clémence Piet et Manuel Valls-Vicente.

Date document : Février 2009

Lieu : France - Ile-de-France - Paris - Paris

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Analyse média

Retranscription :

" Les Français n'étaient renseignés que par des journaux émis par le régime de Vichy, sur instruction et fourniture de nouvelles des Allemands. Donc, personne ne savait qu'il y avait des Français qui étaient à Londres, au Tchad et qui luttaient avec les Anglais en Lybie ou ailleurs. Il fallait qu'on l'apprenne.

Nous, dans ces cas-là, il y en a qui écoutaient Radio Londres, bien entendu. On apprenait les échecs allemands, les succès anglais et plus tard les succès américains. Pour recevoir ces nouvelles-là, il fallait que les camarades écrivent. On a eu de grands écrivains qui ont écrit dans la presse clandestine... comme Mauriac. On avait ensuite à imprimer. Et l'imprimerie, c'est très difficile : c'est sale, c'est bruyant, c'est particulier. Il faut des techniciens valables. On en arrive à la distribution. Il y avait tout un système de paquets de publications et on ne connaissait pas celui qui portait un paquet d'un endroit à un autre. Ca changait ; tout ça pour éviter qu'en cas d'arrestation, les autres ne soient pas recherchés.

Moi, pendant une période  - je cite cela car ça paraît un peu curieux - je cachais mon paquet dans la chapelle de l'Immaculée Conception de l'église Saint-Etienne-du-Mont. Et en plus de cela, il fallait le mettre à gauche. Je ne savais pas qui l'avait déposé et qui, à l'endroit où j'irais le porter, viendrait le chercher.

Il y a eu également des distributions de "provocation". Un jour de mai 1944, on a distribué 1 500 journaux sur le boulevard Saint-Michel... on était une quinzaine. Il n'y en a pas eu un de pris. "


DVD-ROM " Valeurs de la Résistance, valeurs des jeunes aujourd’hui ", AERI, 2012.

Contexte historique

Claude Ducreux est né à Houlgate, dans le Calvados, le 28 août 1923. En 1940, il a donc 17 ans. Il est en classe de Philo au lycée Henri-IV à Paris.

Le 11 novembre 1940, les Allemands interdisent de célébrer la mémoire de l'armistice marquant leur défaite en 1918. Claude défile pourtant à Paris aux côtés de nombreux étudiants. Cette manifestation est sévèrement réprimée et Claude est blessé à l'arcade sourcilière. Premières activités au mouvement Ceux de la Libération-Vengeance A la fin de l'année 1942, il est recruté par son ami lycéen Pierre Hebert comme agent de liaison au mouvement Ceux de la Libération-Vengeance. Il transporte des paquets de journaux clandestins et les distribue. Il cache, dans une petite chambre qu'il loue à Paris, des aviateurs canadiens dont l'avion a été abattu.

Début juin 1943, il est arrêté, transféré à la prison de Fresnes, puis libéré le 14 juillet. Sauvetage d'enfants juifs A sa sortie de prison, grâce à une association (la CIMADE), il est mis au vert à Argentières, près de Chamonix. Pendant ce temps, de la fin du mois de juillet jusqu'au mois d'août 1943, il reste actif : il aide des enfants juifs à s'enfuir en Suisse en passant la frontière clandestinement, par la montagne. En septembre 1943, c'est la rentrée scolaire et il revient à Paris pour faire sa deuxième année de Khâgne au lycée Henri-IV.

En octobre 1943, il est recruté à l'OCM puis l'OCMJ (Organisation civile et militaire de la jeunesse). Il est agent de liaison et distribue la presse clandestine. Mais il apprend aussi, à Vincennes et à Fontainebleau, à se servir des armes. A Pâques 1944, il distribue aux résistants de l'argent, parachuté depuis Londres.

Au mois de juin 1944, il doit rejoindre ses camarades de classe au maquis de Chambon-la-Forêt, dans la forêt d'Orléans. Mais, le 10 juin, ses camarades sont fusillés à la ferme du By, suite à une dénonciation. Claude est prévenu à temps et rejoint le maquis de Lorris. A la mi-juillet 1944, il est intégré au groupe Robert. Il participe avec eux à la prise d'Orléans à la fin du mois de juillet 1944. Le 24 août 1944, c'est le départ pour Paris et la prise de l'École militaire le 25 août. Le lendemain, il monte la garde devant une librairie du quartier de la Sorbonne à Paris, pour le Comité de Libération de Paris. Claude y rencontre sa future femme, Simone Jouhant. Il est ensuite affecté à l'Armée régulière, dans la 9e DIC (division d'infanterie coloniale), avec des tirailleurs sénégalais.

Il devient avocat. En 1989, les poèmes que Claude a écrit pendant cette période sont édités dans le recueil Mes années vertes, 1939-1945. Il continue d'écrire sur des lieux de mémoire et en hommage aux camarades de la Résistance.

Il est Combattant Volontaire de la Résistance (CVR) et Officier de la Légion d'Honneur. A la retraite, il reste très actif : membre de la Commission nationale consultative des Droits de l'Homme, engagé au sein du Comité d'action de la Résistance (CAR) et de l'Association pour des études sur la Résistance intérieure (AERI).

Claude Ducreux est décédé le 20 juillet 2011.


DVD-ROM " Valeurs de la Résistance, valeurs des jeunes aujourd’hui ", AERI, 2012.