Le journal Défense de la France, témoignage d'Hélène Viannay

Légende :

Témoignage recueilli par Philippe Ragueneau.

Genre : Film

Type : Interview

Source : © Musée de la Libération de Paris – musée du général Leclerc – musée Jean Moulin Droits réservés

Date document : 1992-1993

Lieu : France - Ile-de-France - Paris

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Contexte historique

Hélène Viannay (1917-2006)

Hélène Mordkovitch est née à Paris (XIVe arrondissement) le 12 juillet 1917. D'origine russe, sa mère avait été emprisonnée par le régime tsariste en 1905 pour ses opinions révolutionnaires. Amnistiée mais arrêtée de nouveau en 1907, contrainte de choisir entre l'exil et la Sibérie, elle rejoignit la France en 1908. Sa fille Hélène sera élevée dans l'amour de la France, terre de liberté, berceau de la Révolution française. En 1914, la mère s'engage comme infirmière et rencontre à l'hôpital franco-russe, un révolutionnaire russe engagé dans l'armée française, qu'elle épouse. Lorsque sa fille, Hélène, naît en 1917, le père repart en Russie, abandonnant la mère et l'enfant. Hélène Mordkovitch n'a ainsi que très peu d'attaches familiales en France. En 1936, Hélène adhère pour un temps aux Étudiants socialistes, engagement qu'elle abandonne rapidement. Elle suit des cours du soir de l'Université ouvrière, encadrés par des communistes avec lesquels elle se sent peu d'affinités. Sa mère décède en 1937. En 1938, elle éprouve de la honte à se sentir soulagée du répit qu'offrent les Accords du Munich à ses camarades car elle sait la guerre inévitable.

Au moment de la débâcle, étudiante à la Sorbonne, elle prend la route de l'exode et trouve refuge chez des amis à Rodez lorsqu'elle entend la demande d'armistice de Pétain, qu'elle réprouve. Elle reçoit bientôt une lettre de son directeur de la Sorbonne, le Professeur Lutaud, l'enjoignant de rejoindre son laboratoire. Sur le chemin du retour à Paris, en gare de Vierzon, elle gifle un Allemand qui a eu à son égard un geste affectueux. Comme elle put le dire par la suite, elle sut dès lors dans quel camp elle se trouvait et éprouva la nécessité de chasser l'occupant. Occupant à la Sorbonne un poste d'assistante au laboratoire de géographie physique, elle évolue dans un milieu très patriote. C'est à cette période que l'idée lui vient de rédiger et de diffuser discrètement de petits tracts anti-allemands. Chargée par le professeur Lutaud des cours de cartographie, elle y rencontre un étudiant en philosophie, Philippe Viannay, qui partage avec elle le même refus de la défaite et la même volonté d'éveiller l'opinion. Leurs idées sur les moyens d'agir convergent et Hélène Mordkovitch s'associe à l'idée de Philippe Viannay de créer un journal clandestin. De septembre à décembre 1940, Hélène participe à la conception et à la diffusion de tracts dénonçant l'Occupation. Elle utilise pour cela sa position au laboratoire de géographie et organise la première impression du journal Défense de la France dans les caves de la Sorbonne, à partir du mois de février 1941. Hélène dispose d'une clé des lieux. Les séances d'impression durent parfois jusqu'à 5 heures du matin. À la différence de Philippe Viannay, Hélène est hostile à Pétain, rejette la Révolution nationale et adhère rapidement à De Gaulle. Si elle assure une grande part de la diffusion du journal clandestin, Hélène Mordkovitch n'a que très rarement participé à la rédaction des articles.

Jusqu'à la Libération, elle organise au sein du Comité directeur du mouvement les chaînes de diffusion du journal et des faux-papiers, ainsi que la liaison entre les ateliers. En 1942, Hélène Mordkovitch et Philippe Viannay se marient. Un garçon, Pierre, naît le 14 juillet 1943. Après la vague d'arrestations qui touche le mouvement le 20 juillet 1943, elle doit quitter en catastrophe la clinique où elle se trouve. Elle est recueillie un temps par Marie-Hélène Lefaucheux. À la fin du mois de juin 1944, elle rejoint le maquis de Seine-et-Oise Nord (maquis de Ronquerolles) dirigé par Philippe Viannay : elle assure alors la liaison entre les différents secteurs et entre le maquis et Paris. Pendant l'absence de Philippe Viannay, blessé, elle assure la coordination des différents secteurs. Jusqu'à la libération du secteur début septembre 1944, elle collabore aux prises de décisions de l'état-major du maquis.

Dans l'après-guerre, elle travaille aux côtés de son mari à la gestion du centre nautique des Glénans. Elle est la fondatrice et la présidente du Prix Philippe Viannay. Hélène Viannay est décédée le 25 décembre 2006.

Décorations : Commandeur de la Légion d'honneur, Croix de guerre 1939-1945, Médaille de la Résistance avec rosette.


Source : Cécile Vast, "Hélène Viannay", in DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004.