Colongo

Légende :

Théodore Colongo

Genre : Image

Producteur : Inconnu

Source :

Détails techniques :

Photographie argentique

Lieu : France

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Analyse média

Théo Colongo, est ici en compagnie d’Henry Weill. Il a fait le voyage d’Ardèche, où il vivait alors, en Haut-Rhin, précisément à Colmar, pour être présent lors de la remise de la Médaille militaire à son camarade et chef, à l’époque de la Résistance.

Le cliché a été pris à l’occasion de cet honneur et de la fête qui l’a accompagné ; le document exposé n’en est qu’une partie (voir une autre partie de la photo en album). Théo Colongo, puis maintenant son épouse, l’a conservé avec soin.

C’est le bras de Henry Weill qui est posé sur les épaules de l’ancien Saint-Sorlinois. Le premier a dû quitter le pays pour son travail, après la Libération, tandis que le second a vraisemblablement regagné sa région d’origine.


Claude Seyve, Michel Seyve

Sources : Jeanne Colongo, Archives pers

Contexte historique

Théodore Colongo, connu sous le diminutif de Théo, est né à Saint-Sorlin-en-Valloire (Drôme) de parents d'origine italienne ; lui-même n'est déclaré français – et c'est une date qui le marque – qu'à l'âge de 10 ans, en 1929.

Son père dirige une entreprise de bâtiment dans le village.

Il est mobilisé à Nîmes le 8 juin 1939. Puis, il doit faire 8 mois de chantiers de jeunesse au Vigan. Il en finit avec ses obligations en mars 1941. Il travaille alors chez son père comme maçon. L'entreprise est plutôt prospère, ce qui le conduit à employer la main-d'oeuvre disponible à l'époque : des réfugiés, des Modanais. On bâtit, on répare, on pose des toitures, on livre du sable, du gravier, des tuiles... La mission de Théo, dans cette nébuleuse, est d'assurer le toit à tous ces gens – « on trouve toujours une solution ! » –, mais aussi la nourriture ; et là est la vraie question ! D'autant plus prégnante que les restrictions se font drastiques avec les réquisitions, les colis aux prisonniers, les citadins affamés. Naturellement, il faut passer par le « marché noir ». Il y a toujours des oeufs, des volailles, du beurre, chez Théo. Cela ne va pas sans reproches ; mais, insiste-t-il, cette activité le contraint à être en rapport avec beaucoup de gens dans la Valloire et à avoir « une couverture » abritant d'autres activités, comme celles de la Résistance.

Pendant cette période, en octobre 1942, il se marie avec Jeanne Vossier, d'Anneyron ; ils auront quatre enfants. Jeanne est de connivence avec Théo dans ses actions de résistant sédentaire et accomplit sa propre activité de résistante.

Localement, cette année-là, l'AS est dirigée – à Saint-Sorlin par Georges Monot, Henry Weill, lieutenant, épaulés par Jean Peyre, cultivateur, Marius Sauvage (« Mimi ») – à Épinouze par Jean Rey – à Anneyron par Camille Gervais, etc.

Parallèlement à ces réseaux, se constitue discrètement autour de Théo Colongo, un groupe FTP. Une dizaine de réunions environ se tiennent chez lui, auxquelles participe Defuides (« Robin des bois ») de Valence. Ils sont parfois 7 ou 8, peut-être un peu plus ; se retrouvent là Jules Bonin, Marchand, Moiroud, Faguet.

On s'appuie sur Théo : c'est un jeune homme de confiance, débrouillard et courageux. On ne connaît pas ses liens avec les FTP ; ceux-ci tardent à signaler leur existence, ce qui d'ailleurs n'a rien de surprenant en période de clandestinité.

Lorsqu'il s'agit de convoyer un camion chargé de matériel compromettant (machine à écrire, quelques armes, archives stockées au château de La Peyrouse), Mimi Sauvage sollicite Théo : il faut un chef de bord qui connaisse des routes « sûres ». Le chargement parvient à bon port à Bourg-les-Valence, par La Motte-de-Galaure, Claveyson (étape d'une nuit). Cette fois, Théo revient par train et par car à Saint-Sorlin.

Des missions plus importantes lui ont été confiées. L’une d’elles intervient peu après la mort de son père, à l’époque où il doit lui-même prendre en main l’entreprise. Au début de 1944, Falque (AS) demande à Théo de « faire disparaître » provisoirement un parachutage d'armes destinées à l'insurrection populaire au moment du débarquement : il transporte, donc, avec quelques volontaires, dans un tombereau, un chargement contenant un sac de grenades, 4 fusils mitrailleurs, des fusils américains à chargeur, des mitraillettes Sten, des munitions, etc., le tout couvert de paille. Les armes sont entreposées provisoirement chez Colongo, dans la cave, puis transportées, en pleine nuit, à dos d'hommes, dans le caveau du père de Théo enterré le 13 février. Un peu plus tard, en mai, peu avant l'ouverture du deuxième front, les armes sont ramenées de la même manière, dans la cave de Théo. « Robin des bois », évidemment mis au courant, préparant une attaque (vraisemblablement celle de Saint-Marcel-lès-Valence), demande à deux gars du maquis de Beausemblant, à vélo, traînant une de ces petites carrioles à deux roues, fréquentes à l'époque, de puiser dans la réserve. Le vélo conduit par Théo, avec sa remorque chargée d’armes camouflées, traverse le concours de boules du village sans encombre, le « cycliste » faisant commerce en permanence avec cet attelage dans le pays... [Les événements de Saint-Marcel auront lieu plus tard, le 23 août]. Lorsque les chefs de l’AS découvrent le trou dans le stock, on imagine le cours conflictuel des rapports, dont le résistant sédentaire se souvient bien. Pourtant, la nécessité de l’union domine, si l’on en croit la suite des événements. Théo Colongo participe par exemple, avec d'autres, au côté du lieutenant Henry Weill (AS), à l'attaque de Saint-Rambert d’Albon, le 8 juin 1944. Le rassemblement d’une bonne centaine de volontaires a lieu à la ferme de Camille Gervais à Coinaud (Anneyron) au cours de la nuit précédente. L'action se solde par des pertes, peut-être une quarantaine chez les Allemands, 6 maquisards et 2 civils tués, 5 blessés (dont un, Lombard d'Épinouze, meurt à l'hôpital) chez les Français. Théo Colongo se met au vert aux Grises, hameau de Saint-Sorlin. Puis il s'intègre à la compagnie du capitaine William (50 à 60 volontaires FTP), agissant dans la région de Saint-Donat et Romans. Alors que la Drôme vient d'être libérée, Théo Colongo décide en septembre de s'engager jusqu'à la fin de la guerre. Des lieux succèdent à d'autres lieux : un repos de quelques semaines à la Côte-Saint-André, le camp de Chambaran, Strasbourg dont il faut garantir la libération définitive. Là, il faut préparer les locaux devant recevoir les nouvelles troupes. Puis, c'est la traversée au pont de Kehl et l'Allemagne.

Démobilisé en septembre 1945, Théo Colongo tente en vain, jusqu'en 1948, de relancer l'entreprise familiale. Il s'embauche au Péage-de-Roussillon (Isère), pour la construction des Cités. À la fin des années 50, il travaille à Mens, puis plus tard, chez Berthouly (BTP) à Montélimar. Son épouse est salariée dans le textile, au Teil (Ardèche).

Le couple fait l'acquisition d'une maison à Alba, qu'il continue d'habiter à la retraite, à partir de la fin des années 70. Théo Colongo est présent, lors des commémorations, à la ferme Gervais, à Anneyron (Coinaud). Il s'est retrouvé, au côté de Henry Weill, à Colmar, lorsque ce dernier a été décoré de la Médaille militaire. Théo Colongo est décédé dimanche 20 août 2006 à Montélimar.


Michel Seyve, Claude Seyve

Sources : Madame J. Colongo et ses enfants (Archives pers. ), entretiens avec Théo et Jeanne Colongo (Alba, 1er.05, 26.05, 23.08, 2005),

Dvdrom La Résistance dans la Drôme – Vercors, AERI, AERD, 2007