Le Nouvelliste 31 décembre 1943

Légende :

Le faux Nouvelliste, édition de Lyon du 31 décembre 1943, il s'agit d'un détournement prenant l'exact contrepied du vrai journal Le Nouvelliste, à tendance plutôt réactionnaire

Genre : Image

Type : Journal clandestin

Source : © maquisdelain.org Droits réservés

Détails techniques :

Journal imprimé de quatre pages (voir album).

Date document : 31 décembre 1943

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Rhône - Lyon

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Contexte historique

Au retour du défilé historique du 11 novembre 1943 à Oyonnax, Henri Jaboulay, dit "Belleroche", et Lucien Bonnet, dit "Dunoir", apprenant par la BBC qu'une fausse édition du journal Le Soir a été diffusée à Bruxelles, décident de tenter la même expérience pour frapper l'opinion à Lyon. Depuis le sabordage du Progrès, le 11 novembre 1942, il n'existe plus qu'un seul grand quotidien dans la région lyonnaise : Le Nouvelliste. Ce quotidien diffuse abondamment la pensée pétainiste, encense la collaboration et dénigre la Résistance.

Les deux conspirateurs proposent sans attendre à "Alban" Vistel de substituer un jour au Nouvelliste un faux numéro rédigé par des résistants, une véritable provocation.

La rédaction et l'impression de ce numéro très spécial semblent ne pas poser de difficultés considérables aux équipes clandestines bien entraînées. Le problème essentiel est la diffusion rapide des paquets de journaux dans les nombreux points de vente de la ville : les diffuseurs doivent être uniquement des résistants et la vitesse d'exécution est primordiale pour devancer l'alerte après la découverte du complot.

Rapidement, les rôles sont distribués lors d'une réunion. Pascal, l'adjoint d'"Alban" Vistel, habituellement chargé de la propagande, peut assurer dans l'atelier clandestin de la rue Viala l'impression de 25 000 exemplaires. Henri Jaboulay s'occupe de la copie et de la mise en page et Charles Mohler, alias "Duvernois", organise l'opération de remplacement du vrai Nouvelliste par le faux. Pour imiter au mieux la mise en page et la typographie du journal, Henri Jaboulay obtient la complicité de P. Bonnet et Pierre Scize du journal Paris-Soir - édition de Lyon - de E. Pons et des typographes Vernier et Planchet.

Le groupe franc de "Duvernois" repère pendant plusieurs jours l'itinéraire suivi par les véhicules des messageries Hachette livrant les points de vente. On craint, au départ, de perdre du temps en palabres lors du remplacement des journaux, mais on apprend que ces substitutions ont lieu lorsque la censure décide in extremis de remplacer Le Nouvelliste par une version expurgée, afin d'éviter la parution d'articles jugés indésirables.

L'opération fixée au 31 décembre 1943 peut donc avoir lieu.
La veille au soir, dans un garage, une vingtaine d'hommes de l'équipe "Daniel" préparent les paquets sur lesquels ils collent la bande : Censure. Le lendemain, à 5 heures du matin, six voitures portant une vignette : Service de presse, avec trois hommes à bord - dont un armé - commencent leurs parcours respectifs. A chaque point de vente, un arrêt bref, quelques mots d'explication, et les paquets sont substitués sous l'œil vigilant d'hommes complices surveillant les alentours, parmi lesquels quelques gardiens de la paix amis. 

A 8 heures, tout est terminé lorsque l'alerte est donnée ; des perquisitions au Nouvelliste et au Lyon républicain ne donnent rien, et les Lyonnais découvrent des informations chocs, et pour cause ! A la une sont évoqués le défilé d'Oyonnax, "Les raids massifs sur l'Allemagne", les brutalités de la Milice et de la Gestapo, un "appel à la bourgeoisie", véritable plaidoyer pour les maquis et une "nouvelle" explosive : "Le Maréchal de France, chef de l'Etat, rétablit la République".


Jean Léty, in DVD-ROM La Résistance dans l'Ain et le Haut-Jura, AERI, 2013.