Tract du Front national de la police parisienne

Genre : Image

Type : Tract

Source : © Archives de la Préfecture de Police de Paris Droits réservés

Date document : AOût 1944

Lieu : France - Ile-de-France - Paris

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Contexte historique

Privé de direction et d'organe - La Voix de la France est tombée - le Comité de la France combattante de la police parisienne stagne quelque peu jusqu'à l'entrée en fonction, le 1er avril 1944, du successeur d'Arthur Airaud : le responsable du Front national de la Seine-et-Oise, Serge Lefranc. Celui-ci s'attelle à une réorganisation d'ensemble du réseau. Léon Pierre remplace désormais Michel Dubois auprès de Roger Herlaut et Lucien Saintier. Comme précédemment, ce triangle fait office de comité directeur du groupement. Il en est de même pour les six divisions de police.

En mai 1944, le mouvement a retrouvé des effectifs voisins de ceux de janvier : "[...] Compagnies de Circulation : 995. Garage : 800. 1° division : 840. 2° division: 1660. 3° division : 692. 4° division : 560. 5° division : 795. 6° division : 230. Total : 6572. [...]". A ce stade, tout comme Honneur de la Police et Police et Patrie revendiquent désormais leur affiliation l'un au MLN, l'autre à Libération-Nord, l'heure n'est plus à un Comité de la France combattante mais à un "Front national de la Police parisienne". Ce changement d'appellation ne semble avoir suscité ni tensions internes ni velléités d'émancipation de la tutelle que continue d'exercer l'organisation parisienne du FN. Naturellement, le comité directeur du mouvement et le secrétariat du PCF suivent de près les activités de ce réseau dont André Carrel, responsable du FN pour l'Ile-de-France, rend compte régulièrement.

Sur le terrain, le FN de la police et le FN de la gendarmerie affirment leur dynamisme, en particulier lors des manifestations du 14 juillet 1944. "Notre travail porte, il n'y a pas de doute " écrit, à chaud, André Carrel pour qui, "dans l'ensemble, la Police s'est bien tenue". Informé par les rapports d'Alfred Brun et de Georges Thévenet, Serge Lefranc est bientôt en mesure de préciser que à l'appel du FN, de nombreux policiers et gendarmes ont participé aux manifestations qu'ils ont préparées par des sabotages et des actions armées, comme à Bourg-La-Reine où "les membres de la P.60-1 [FN de la Police] ont immobilisé 50 camions allemands durant la nuit (engins placés qui ont crevé tous les pneus)". A cette date, le responsable du FN de la Police annonce contrôler 450 FTP mais les rapports internes déplorent encore le faible nombre d'actions armées.

La grève générale de la police parisienne
Les archives internes du FN de la Police permettent de préciser certains ressorts de cette spectaculaire mobilisation qu'aucun état-major résistant n'a orchestrée - André Carrel rapporte que, le 29 juillet 1944, à la commission militaire du CPL, "personne ne savait par quel bout prendre les forces de police dans l'insurrection". Le 11 août 1944 encore, l'initiateur de la grève générale de la police est loin d'entrevoir le possible d'une telle action. Ce jour-là, écartelé entre l'animation d'un appareil qui pilote désormais trois groupements - policiers, gendarmes et gardes républicains - et la présidence du CDL de Seine-et-Oise dont le départ pour Versailles est imminent, Serge Lefranc demande à André Carrel d'envisager son remplacement par Arthur Airaud et Lucien Saintier à la tête du FN de la police. Suggestion sans lendemains.

Dans la soirée du 12 août 1944, Serge Lefranc et Léon Pierre se voient proposer par Henri Ribière et Joseph Lamboley une réunion à trois (FN de la Police, Honneur de la Police, Police et Patrie) destinée à traiter d'épuration et de nominations. A la demande des dirigeants du FN, l'ordre du jour prévoit finalement aussi le débat sur l'action commune. Rendez-vous est pris pour le 14 août à 14 heures. La veille, le comité directeur du FN de la Police, élargi aux directions de divisions (soit 14 présents), se réunit au domicile de Marcel Torchy, 18 rue Vulpian (Paris, XIIIe arrondissement). Informés en séance - vers 11 heures - du désarmement par l'occupant des commissariats de Saint-Denis, Saint-Ouen et Asnières, et entraînés par Serge Lefranc, les présents décident unanimement d'appeler à la grève générale pour le 15 août à 7 heures. A 12h 15, Serge Lefranc et Léon Pierre rencontrent Joseph Lamboley et Edgar Pisani qui adhèrent au projet et proposent de faire imprimer l'appel à la grève. Par la suite, Serge Lefranc rencontre Henri Rol-Tanguy puis André Carrel qui, d'abord surpris, donne son accord à 17 heures. Entre-temps, le comité directeur du FN Gendarmerie a appelé les gendarmes d'Ile-de-France à se mettre en tenue civile. Dans la soirée, la nouvelle se répand dans les commissariats. Inquiet, l'occupant rend les armes confisquées.

Comme convenu, le 14 août à 14 heures, se tient la première réunion du Comité de libération de la police : Yves Bayet (Honneur de la Police), Roger Priou, Edgar Pisani et Joseph Lamboley pour Police et Patrie, Serge Lefranc et Léon Pierre pour le FN de la police, en présence de Lucien Saintier et 'Jacques', gardes du corps, et d'Henri Rol-Tanguy, chef régional FFI. Les présents s'accordent à désigner un triumvirat composé d'Yves Bayet, Achille Peretti et Arthur Airaud pour assurer l'intérim de Charles Luizet, mais ils s'en remettent au CPL pour désigner le président du Comité de libération de la police parisienne, poste revendiqué par le FN. Suivent les débats sur l'appel à la grève générale.

Le 15 août 1944, dès 7 heures, la grève générale est effective dans les commissariats. L'impression produite sur la population est considérable. Au Comité de libération de la police parisienne, en fin de matinée, Yves Bayet et Roger Priou confient à André Fournet et ‘David' - Honneur de la Police -, Edgard Pisani et Joseph Lamboley - Police et Patrie -, le soin de conférer avec Léon Pierre et Serge Lefranc. Les écrits ultérieurs de Serge Lefranc confirment qu'au soir du 18 août 1944, les dirigeants du FN de la Police ignorent tout du plan d'occupation de la préfecture de police dressé, ce même jour, par Yves Bayet et Henri Ribière qui, à 18 heures encore, anime, dans un local proche de la mairie du VIIIe arrondissement une séance du Comité de libération de la Police parisienne consacrée à l'épuration.


Daniel Virieux in DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004