Plaque en hommage aux résistants torturés

Légende :

Plaque en hommage aux résistants torturés entre 1940 et 1944 par la bande "Bonny-Lafont", dans les locaux du 93, rue Lauriston, Paris XVIe

Genre : Image

Type : Plaque

Source : © Wikimedia Commons Libre de droits

Détails techniques :

Photographie numérique en couleur.

Lieu : France - Ile-de-France - Paris

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Contexte historique

La " Gestapo de la rue Lauriston " était dirigée par Henri Chamberlin alias " Henri Lafont ". Il était né le 22 avril 1902 à Paris. À la veille de la Seconde Guerre mondiale, il n'était qu'un petit truand, titulaire d'un casier judiciaire chargé bien qu'il ne soit constitué que d'infractions mineures. Son plus haut fait d'arme était d'avoir réussi à se faire engager comme gérant du mess de la préfecture de police sous une fausse identité et à en dérober la caisse. Arrêté pour ce délit en 1940, il fut interné le 15 juin de la même année au camp de Cépoy dans le Loiret. Dans ce camp, il se lia avec deux agents des services de renseignement allemands (SRA) emprisonnés pour espionnage et s'échappa avec eux. L'un de ses compagnons de fuite, un certain Max Stocklin que l'on retrouvera par la suite à la tête d'un " Bureau d'achat " le mettra en contact avec deux responsables de l'Abwehr, Radeke et Herman Brandl dit " Otto ". Il sera ainsi l'un des premiers Français à se mettre à la disposition des forces d'Occupation.

En juillet 1940, encadré par deux sous-officiers allemands, Lafont, devenu l'agent 10 474 R de la police allemande, se présenta aux portes de la prison de Fresnes et fit libérer 28 délinquants. Cette première bande s'éparpilla dans Paris à la recherche de marchandises et de renseignements. Tout au long de la période, des truands, mais aussi des policiers révoqués, comme l'ex-inspecteur de la Sûreté Pierre Bonny, viendront ainsi grossir les rangs du " groupe Lafont ", que l'on appellera bientôt " Gestapo de la rue Lauriston " après son emménagement fin 1941 à cette dernière adresse.

En 1940, Lafont procéda à l'arrestation de Lambrecht, responsable du 2e Bureau belge. Cette affaire entraîna plusieurs dizaines d'arrestations à travers l'Europe. Fin 1940, il installa un poste émetteur à Alger. En juin 1941, Lafont et ses hommes démantelèrent un groupe de Résistance dirigé par Georges Paulin et Jacques Kellner. Georges Paulin sera fusillé au Mont Valérien le 21 mars 1942.

C'est à cette époque que, pour le récompenser des missions qu'il avait accomplies pour le compte de l'Abwehr, Lafont fut naturalisé allemand et nommé capitaine de la Wehrmacht. Dès lors, sa puissance ne cessera de croître. Ce n'est qu'après la prise du pouvoir exécutif par la police allemande, en juin 1942, que Lafont, jusque-là protégé par le capitaine Radecke des services de l'Abwehr, se mit à la disposition de Boemelburg, chef de la section IV du BdS (Gestapo). Boemelburg avait alors détaché auprès de Lafont deux membres de la police allemande, Hesse Emile et Khalloff Willy, et avait remis aux membres de la bande des permis de port d'armes ainsi que des laissez-passer et des cartes de service.

La bande de la rue Lauriston fut particulièrement active lors des arrestations qui décimèrent le mouvement Défense de la France en juillet 1943. Cette affaire entraîna l'arrestation de trente-six résistants, dont Geneviève de Gaulle, la nièce du général. Douze d'entre eux ne reviendront pas de déportation. Par ailleurs, Lafont et ses hommes se mirent à la disposition de Kieffer, le chef de la section IV E du Bds (contre-espionnage) et Kuhn de la section I du BdS (gestion du matériel et des effectifs) pour traquer les parachutistes alliés dans les régions d'Amboise, d'Angers, de Tulle, Montargis, Montbard et Limoges. En juin 1943, à la suite de l'une de ces opérations menée à Montargis, quatre tonnes d'armes destinées à la Résistance intérieure furent ainsi saisies.

Au début de l'année 1944, après le départ de Boemelburg pour Vichy, Knochen et son adjoint Schmidt devinrent les protecteurs attitrés de Lafont. Ils autorisèrent ce dernier à constituer une formation paramilitaire, la Légion nord-africaine (LNA). Lafont, élevé au grade de capitaine de la SS (Hauptsturmführer) recruta alors plus de 200 Nord-Africains. La LNA fut divisée en cinq sections dirigées chacune par un membre de la bande, nommé pour l'occasion lieutenant (Obersturmführer) et sous-lieutenant (Hauptsturmführer) de la SS. Ce corps multiplia les exactions en Franche-Comté et dans le Limousin et participa aux massacres de civils de Brantôme, Saint-Martin du Ribérac, Sainte-Marie de Chigna et Mussidan.

Chamberlin, Bonny et quelques uns de leurs adjoints furent arrêtés et passèrent en jugement entre le 1er et le 11 décembre 1944. Sur les dix inculpés, huit furent condamnés à mort, dont Lafont et Bonny, et exécutés le 26 décembre 1944 au fort de Montrouge.


Grégory Auda in DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004