Laissez-passer de Philippe de Vomécourt délivré en juillet 1941

Légende :

Document extrait de l'autobiographie de Philippe de Vomécourt, Who Lived to See the Day: France in arms 1940-45, Hutchinson, 1st Edition, 1961

Genre : Image

Type : Document allemand

Source : © Philippe de Vomécourt, Who Lived to See the Day: France in arms 1940-45 Droits réservés

Détails techniques :

Reproduction numérique

Date document : Juillet 1941

Lieu : France

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Contexte historique

A l'été 1940, Philippe de Vomécourt accepte de travailler pour la Société de gérance des wagons de grande capacité (SGW) comme inspecteur pour la zone libre. Disposant ainsi d'un ausweis sur tout le territoire et d'un accès privilégié au trafic ferroviaire, il mène des actions de résistance isolées, s'attachant à retarder les expéditions de matériel et de marchandises vers le Reich.

Voici un extrait de son témoignage : 

"J'eus la responsabilité des "wagons de grande capacité", trains de marchandises spéciaux, de longue distance, transportant une charge de mille tonnes. De tels convois exigeaient une manoeuvre très exacte et des horaires très stricts. Un instant de retard suffisait pour qu'on leur refusât le départ et personne ne se compliquait la vie pour contribuer à leur bonne marche. (...) Je découvris qu'il était très simple de causer un retard. Le train devant obligatoirement transporter mille tonnes, s'il était impossible de rassembler assez de wagons pour le former en temps voulu, le départ n'avait pas lieu. De même quand un wagon déraillait accidentellement à la dernière minute.
J'étais tenu de faire, chaque mois, un rapport aux Allemands sur le résultat des recherches que j'entreprenais pour retrouver les wagons qui venaient à s'égarer. Ma situation était des plus favorables : j'organisais la perte des wagons et j'étais chargé de les retrouver ; sans succès la plupart du temps.

J'éprouvais un plaisir particulier à égarer les wagons des usines Messier à Angoulême. Elles étaient passées aux mains des Allemands, et des wagons entiers de pièces détachées d'avions quittaient Angoulême pour l'Allemagne. Au dépôt de marchandises d'Angoulême, un cheminot échangeait une benne Messier contre une autre, chargée par exemple de fruits. Il lui suffisait pour cela d'intervertir les étiquettes portant le poids des marchandises, collées sur les parois. Ensuite, profitant d'un moment de tranquilité sur les voies, il assurait le départ des fruits pour l'Allemagne et celui des machines pour "quelque part en France". Quand les Allemands s'inquiétaient du sort de leur wagon, il m'appartenait de le rechercher. Il me fallait quelquefois quatre mois pour en retrouver la trace et, le plus souvent, une main secourable en avait fait disparaître le contenu. (...)

J'aimais beaucoup travailler pour les Allemands de cette façon. Je voyageais librement dans toute la France. Mes papiers d'identité portaient le timbre de la Gestapo. Ce timbre me permettait de voyager la nuit sans m'inquiéter du couvre-feu, et de circuler librement dans la zone libre, la zone occupée et la zone interdite qui s'étendait le long de frontières et des côtes où les Allemands allaient construire le Mur de l'Atlantique."


Source : Philippe de Vomécourt, Les artisans de la Liberté, PAC, 1975