Émile Latil

Légende :

Émile Latil, dit Nicolas et Jean Rivière, communiste (Front national), membre du CDL des Basses-Alpes, sans date

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © ANACR de Marseille Droits réservés

Détails techniques :

Scan de photographie analogique en noir et blanc. Voir aussi l'album photo lié.

Date document : Sans date

Lieu : France - Provence-Alpes-Côte-d'Azur - Var - Signes

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Contexte historique

Émile Fernand Hippolyte Latil naquit le 4 octobre 1902, rue-Poterne à Sisteron (Basses-Alpes, aujourd’hui Alpes-de-Haute-Provence), d’un père artisan peintre et d’une mère sans profession. Il se maria à Oraison le 26 avril 1930 avec Juliette Magali Reynaud. Il exerça, dans ce village, la même profession que son père.

Émile Latil fit partie de la délégation communiste qui rencontra, à Oraison, à la fin du mois de mai 1944, les responsables des Mouvements unis de Résistance-Mouvement de libération nationale (MUR-MLN). À la suite de l’accord obtenu, il représenta le Front national pour l’indépendance de la France (FN) au Comité départemental de Libération (CDL). Il participa à la réunion du CDL qui, à Laragne le 5 juillet 1944, fit le bilan des actions de juin 1944 et prit acte des divergences avec l’ORA. Le rapport qu’il rédigea à ce sujet avec Louis Martin-Bret, jugé trop dur, fut remanié par le CDL. Il était, à ce moment-là, recherché par les services allemands qui parvinrent, le 6 juillet 1944, à s’emparer de son frère cadet, Georges Latil, né le 24 juin 1909. Celui-ci fut transféré de Sisteron à Digne, torturé, puis déporté à Mauthausen.

De son côté, Émile Latil, participa à la réunion du CDL des Basses-Alpes du samedi 15 juillet 1944, avec, entre autres, François Cuzin, Maurice Favier, Louis Martin-Bret et Jean Piquemal. La réunion du CDL se poursuivit le dimanche matin, dans une salle au-dessus du Café de France, géré par Léon Gaubert. Mais les Allemands, informés de cette rencontre, étaient aussi au rendez-vous. En 1945, lors de l’instruction de son procès, Ernst Dunker-Delage, l’homme clé du SIPO-SD (la Gestapo) à Marseille, déclara en avoir appris la tenue grâce aux papiers saisis sur un résistant – Georges Cisson en l’occurrence, arrêté à Marseille le 12 juillet - et déchiffrés. Le SD de Marseille fut donc à l’origine de l’intervention à laquelle il participa et qui fut soigneusement préparée. Les occupants utilisèrent, pour arriver à leurs fins et identifier le maximum de dirigeants de la Résistance, une unité de Brandebourgeois. Déguisés en maquisards, comme ils avaient coutume de le faire, ils simulèrent, dans la matinée du 16 juillet, des combats avec des soldats allemands – arrivés dans la localité quelques jours auparavant - et firent accroire à la population une libération du village. Dans l’après-midi, mettant fin à cette mauvaise comédie, ils arrêtèrent plusieurs membres du CDL et d’autres résistants.

Comme ses camarades du comité départemental de Libération, Émile Latil fut transféré à Marseille, puis fusillé à Signes le 18 juillet et enterré, de manière sommaire, avec 28 autres victimes dans la « première fosse ». Sa dépouille, transportée le 17 septembre à la morgue du cimetière Saint-Pierre à Marseille (cercueil 715), fut parmi les 32 premières identifiées. Le médecin légiste constata une fracture complète de la colonne vertébrale et un orifice d’entrée et de sortie d’un projectile au sommet du thorax, côté gauche.

Après les obsèques nationales célébrées pour l’ensemble des martyrs de Signes au cimetière Saint-Pierre, le 21 septembre 1944, Émile Latil fut inhumé au cimetière d’Oraison avec les trois autres victimes originaires de cette localité. Dans l’enceinte du cimetière, une plaque honorant Émile Latil, le docteur Daumas, Roger Chaudon et Terce Rossi fut sertie sur le monument aux morts, avec la mention « lâchement assassinés par les Allemands et les miliciens, le 19 juillet 1944 ». Le nom d’Émile Latil figure également sur une stèle, avec celui des dix autres résistants arrêtés le 16 juillet, à la sortie nord de la ville et, à Manosque, sur le monument « Aux martyrs de la Résistance dans les Basses-Alpes », dans la longue liste des victimes de la répression classées par villes et villages (à l’emplacement dédié aux résistants d’Oraison). Son nom fut également donné à une avenue d’Oraison. Le 21 février 1965, une plaque fut apposée sur la maison où il habita, rue-Droite à Sisteron.

Émile Latil fut reconnu Mort pour la France. Son frère, Georges Latil, qui revint de Mauthausen, entretint la mémoire de la Résistance à Sisteron, à la tête de l’association des déportés, jusqu’à sa mort en octobre 1975.


Auteur : Robert Mencherini

Sources :
Actes de naissance et de décès ; DAVCC Caen, 27 P 244, « Bouches-du-Rhône, charnier de Signes, Procès-verbaux d’enquête, exhumations » Sisteron- Journal, 20, 27 février 1965, 18 octobre 1975 ; Vérité, organe du mouvement de libération nationale, 1944-1945, en particulier les numéros 1 et 42 ; La Liberté des Basses-Alpes, organe du CDL des Basses-Alpes, n°5, 30 septembre 1944 ; Jean Garcin, De l’armistice à la Libération dans les Alpes-de-Haute-Provence, 17 juin 1940 - 20 août 1944, Digne, Imprimerie Vial, 1983, rééd. 1990, p. 351 et sq. ; Jean Vial, Un de l’AS bas-alpine. Souvenirs d’un résistant, Marseille, Chez l’auteur, imprimerie Villard, 1947, 3e rééd., Imprimerie Villard, 1990, pp. 214-218 ; Thérèse Dumont, Jean-Marie Guillon, notice in Maitron-en-ligne ; Guillaume Viera, La répression de la Résistance par les Allemands à Marseille et dans sa région (1942-1944), thèse de doctorat en histoire contemporaine, dir. Jean-Marie Guillon, Université  de Provence, 2013 ; Jean-Christophe Labadie, La répression allemande. Basses-Alpes 1943-1944, Digne, Archives départementales des Alpes-de-Haute-Provence, 2014, pp. 121-125 et recueil documentaire, pp. 20-21 ; Simone et Jean-Paul Chiny, La Résistance et l’occupation nazie à Marseille, Marseille, comité de l’ANACR, 2014 ; Commission départementale de l’information historique pour la paix, Le Mémorial de la Résistance et des combats de la Seconde Guerre mondiale dans les Basses-Alpes, Digne, 1992 ; Hélène Vésian, Claude Gouron, Les chemins de la liberté, sur les pas des résistants de Haute-Provence, ADRI/AMRID, 2004.