Benigno Cacérès, dit "Mirouze"

Légende :

Benigno Cacérès, dit "Mirouze", ici après-guerre

Genre : Image

Type : Photogaphie

Source : © Peuple et Culture - photo de couverture Droits réservés

Détails techniques :

Photographie analogique, couverture de Bénigno Cacérès, un bâtisseur de l’éducation populaire, Grenoble, Peuple et Culture, 1999.

Date document : Sans date - après-guerre

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Isère

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Contexte historique

Benigno [également orthographié Bénigno] Cacérès est né à Toulouse le 19 octobre 1916.

Benigno Cacérès est né à Toulouse dans une famille espagnole émigrée en France avant la Grande Guerre. Devenu orphelin de père, Bénigno quitte l’école à 12 ans avec un certificat d’études en poche. Il effectue de « petits boulots » pour aider sa famille. Le besoin d’apprendre et le sens du travail bien fait le conduisent à devenir Compagnon du Devoir Charpentier. Dès 15 ans, il doit surmonter toutes les épreuves pour arriver au grade d’aspirant compagnon, puis compagnon, sous le nom de Castillan-la-Fidélité. Avec le soutien des Compagnons du Devoir, il devient un professionnel reconnu. Autodidacte, lecteur acharné, il s’instruit par la lecture.

En 1941, il fait la rencontre de l’abbé René de Naurois, l'un des fondateurs de l’Ecole des Cadres d’Uriage qui deviendra par la suite un grand résistant, qui lui demande de venir à l’Ecole pour y parler de la condition ouvrière. Bénigno Cacérès accepte et devient formateur permanent. L’Ecole des Cadres d’Uriage, voulue par le maréchal Pétain, fut fondée en septembre 1940 par Pierre Dunoyer de Segonzac, le "Vieux Chef", officier de cavalerie. Le but de l’Ecole était de renouveler les élites françaises après la défaite de juin 1940 dans le cadre de la « Révolution Nationale ». Dès février 1941, l’Ecole subit des pressions de la part du régime. Avec le retour aux affaires de Pierre Laval, la politique de collaboration avec l’Allemagne s’intensifie, et conduit les formateurs et les élèves de l’école à se détourner du régime. Par décret de décembre 1942, Pierre Laval ferme l’Ecole des Cadres d’Uriage. Le 21 janvier 1943, Pierre Dunoyer de Segonzac tombe sous le coup d’un mandat d’arrêt, et entre dans la clandestinité.

Après la dissolution de l’école, formateurs et élèves vont appliquer au maquis du Vercors leurs compétences pédagogiques. Ils s’installent à La Thébaïde, une propriété dans la région de Saint-Antoine-l’Abbaye, dans la vallée de l’Isère au pied du Vercors, devenue leur quartier général. Ils y forment des « équipes volantes », chargées de structurer les maquis. La Thébaïde disposait d’une importante bibliothèque et Cacérès en profita pour parfaire ses connaissances littéraires. Tous les anciens de l’Ecole des Cadres ne participeront pas à ces équipes. Bénigno Cacérès prend pour nom de guerre Mirouze et devient un membre actif au sein d’une de ces équipes. Elles sont composées de trois membres : un gradé enseignant, un second chargé de l’animation des veillées, le dernier chargé de rendre leurs enseignements accessibles à tous. Le dessein de ces équipes volantes était de donner un sens au combat des maquisards et former leurs consciences de nouveaux citoyens. Les équipes volantes étaient cependant considérées par certains maquisards comme des « missionnaires », allant de camp en camp porter la bonne parole. Certains les regardaient avec défiance, voire, avec hostilité.

Benigno Cacérès, Mirouze, avait le don de rendre les textes et débats accessibles à tous. Il faisait équipe avec Kim, l’intellectuel, de son vrai nom Simon Nora, futur chef de cabinet de Mendès-France. Lemoine, le troisième homme, brillait le soir aux veillées en disant les textes de grands auteurs ou en accompagnant les chants patriotiques à l’harmonica.
Marc Serratrice, dans son livre Avoir 20 ans au Maquis du Vercors, fait une description succincte de Bénigno Cacérès : « Mirouze, petit bonhomme sec et noiraud à l’exubérance méridionale, toulousain et charpentier et il était fier de le faire savoir… militant de la cause ouvrière… Il fut rapidement adopté tant il était proche par ses origines populaires de la plupart des garçons du camp ».

La mission des équipes volantes duraient en moyenne une semaine ; leurs membres participaient aux corvées et aux tours de garde, à la vie du camp, ce qui avait pour effet de faire disparaître les dernières réticences.

Le 3 février 1944, au cours de l’attaque par les troupes allemandes de l’Esparron, l’équipe volante de Mirouze, présente au monastère, réussit à s’exfiltrer et à rejoindre le centre du massif. Puis Mirouze et son équipe rejoindront, pour quelques jours, le C3, avec lequel ils avaient tissé des liens d’amitié. 

Après l’attaque générale du Vercors et son encerclement par les troupes allemandes, Mirouze rejoindra la région toulousaine et participera aux combats de la Libération.

En décembre 1944, de retour à Grenoble, Cacérès participa avec ses camarades des « équipes volantes » à la création du mouvement d’éducation populaire « Peuple et Culture », dont il fut président de 1970 à 1973, avant d'en devenir le président d’honneur.
Sorti de l’école à 12 ans avec un certificat d’études, Bénigno Cacérès, à la fois écrivain, universitaire (docteur en Sciences sociales), revendiqua tout au long de son existence le titre d’autodidacte et livra un combat sans fin contre la dichotomie faite par nos sociétés entre métiers manuels et intellectuels. 

Il décède à Paris le 15 octobre 1991, à l'âge de 75 ans.

Œuvres :

Dès 1950, il publie de nombreux ouvrages, dont :

La rencontre des hommes, 1950.

Regards neufs sur les autodidactes, Paris, Le Seuil, 1960 (participation à la rédaction).

L’espoir au cœur, Paris, Le Seuil, 1967, roman autobiographique où il met en scène le camp C3 du maquis du Vercors.

Les deux rivages : Itinéraires d’un animateur populaire, Paris, collection La Découverte, Édition François Maspero, 1982.

Actes et mémoires du peuple. Il y évoque la Seconde Guerre mondiale et les années de l’après-guerre : « La Résistance et la Libération ont favorisé le brassage entre jeunes issus de milieux différents, travailleurs manuels déjà engagés dans la vie active et futurs intellectuels ».

Il réalise avec Chris Marker le film Olympia 52, sur les 15e Jeux Olympiques d’Helsinki de 1952.


Auteur : Alain Raffin

Sources :

Benigno Cacérès, L’espoir au cœur, Paris, Le Seuil, 1967. 

Benigno Cacérès, Les deux rivages : Itinéraires d’un animateur populaire, Paris, collection La Découverte, Édition François Maspero, 1982.

Marc Serratrice, Avoir 20 ans au Maquis du Vercors, Avon-les-Roches, édition Anovi, 2014.

Ouvrage collectif, Bénigno Cacérès, un bâtisseur de l’éducation populaire, Grenoble, Peuple et Culture, 1999.

Site du Maitron en ligne, biographie de B. Cacérès par Vincent Peyre, consultée le 30 juin 2016.

Emission "Radioscopie", 20 avril 1981, animée par J. Chancel.

Compte-rendu d'Alain Choppin, Histoire de l'Education n° 18, avril 1983.