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Ordonnance du 27 juin 1944 relative à l'épuration administrative

Légende :

Publication de l'ordonnance codifiant l'épuration administrative, au Bulletin Officiel n° 9 du Commissariat régional de la République, pages 69-70

Genre : Image

Type : Ordonnance

Source : © AD B-d-R - 149 W 68 Droits réservés

Détails techniques :

Document imprimé sur papier pelure (voir recto et verso).

Date document : 27 juin 1944

Lieu : France

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Analyse média

En dix articles, l'ordonnance organise l'épuration des administrations françaises.

L'article premier définit les actes susceptibles d'entraîner des sanctions administratives qui n'excluent pas, par ailleurs, des poursuites pénales devant les cours spéciales chargées de réprimer la collaboration.
La définition très large de la collaboration administrative permettait de poursuivre en théorie tout fonctionnaire.

L'article 2 étend la définition du fonctionnaire à tout employé travaillant pour un organisme bénéficiant d'argent public. Sont donc concernées les administrations, les collectivités et les entreprises publiques.

L'article 3 prévoit la suspension et, si besoin, l'incarcération préventive du fonctionnaire ou de l'agent public incriminé. Le fonctionnaire perçoit la moitié de son traitement. Les indemnités familiales ne sont pas suspendues.

L'article 4 énumère les sanctions disciplinaires, allant du déplacement d'office à la radiation.

Les sanctions administratives n'excluent pas d'éventuelles poursuites pénales (article 5) ou la mise sous séquestre des biens des personnes poursuivies (article 8). En cas de classement sans suite, le fonctionnaire est rétabli dans ses droits et bénéficie d'une reconstitution de carrière rétroactive (article 6).


Sylvie Orsoni

Contexte historique

L'ordonnance codifiant l'épuration administrative est une des premières ordonnances consacrées à la répression de la collaboration. L'épuration de l'administration française a toujours été considérée comme une priorité par les représentants des organismes et partis de la Résistance qui siégeaient à l'Assemblée consultative d'Alger.

Si l'article premier permettait de poursuivre tout fonctionnaire, l'ordonnance du 26 juin 1944 relative à la répression de la collaboration restreignait en fait les poursuites, puisque l'article 3 disposait qu' « il n'y a ni crime, ni délit lorsque les faits n'ont comporté de la part de leurs auteurs que la stricte exécution - exclusive de toute initiative personnelle - d'ordres ou d'instructions reçus sans aucun dépassement de ceux-ci»

Les commissaires du gouvernement chargés de procéder à l'épuration administrative dans leur ministère jouissaient donc d'une grande latitude pour interpréter les différentes ordonnances.
Henry Rousso rappelle que le GPRF ne voulait pas démanteler les administrations par une épuration rigoureuse qui risque de mettre en péril la continuité de l'État. Il cite la circulaire adressée aux commissaires de la République afin de les guider dans l'épuration des administrations départementales et préfectorales : « Il est bien d'avoir à montrer son intransigeance, mais dans la mesure où elle ne nuit pas au fonctionnement des services. » On comprend que l'intransigeance devient relative et que certains hauts fonctionnaires, pourtant explicitement visés par l'article 3 de l'ordonnance du 26 juin 1944, aient pu se maintenir en poste.
Ce compromis entre épuration et efficacité administrative explique aussi l'insatisfaction de l'opinion publique, qui a l'impression que l'épuration est à géométrie variable.


Auteur : Sylvie Orsoni

Sources :

Henry Rousso, « L'épuration en France, une histoire inachevée », in Vingtième siècle, PFNSP, n° 33, 1992, pp. 78-105.

Anne Simonin, Le déshonneur dans la République. Une histoire de l'indignité. 1791-1958, Paris, Grasset, 2008.