91AJ/1-91AJ/39 Archives de Pierre Sudreau
Archives nationales - Pierrefitte-sur-Seine

Type de ressource : Répertoire numérique détaillé
Lieu de consultation : Archives nationales
Localisation géographique : Pierrefitte-sur-Seine
Présentation du contenu :

Pierre Sudreau a fait don des ses archives au Centre historique des Archives nationales en juin 2002, y adjoignant un lot de documents provenant d'André Pélabon, dont il fut le collaborateur au ministère de l'Intérieur.
Dans son fonds propre a été naturellement opérée une distinction entre archives personnelles et dossiers relevant de la carrière publique. La première partie, organisée dans l'ordre chronologique, comporte ainsi un chapitre consacré à la Résistance et à la Déportation, de nature foncièrement historiographique. Les cérémonies commémoratives organisées à Blois, terre d'élection de Pierre Sudreau, y occupent une place privilégiée, de même que le souvenir de Gaston Defferre, compagnon de lutte et ami, et de Marcel Paul, côtoyé au sein du comité clandestin de Buchenwald. Puis vient un ensemble couvrant les années 1964-1996, qui reflète les diverses activités de Pierre Sudreau, particulièrement dans le domaine économique, au travers des relations franco-japonaises et de la promotion du commerce extérieur. Sa participation au débat public au cours de cette période a laissé par ailleurs de notables traces : joutes politiques, engagement européen, mises en garde contre la course aux armements et le péril nucléaire, qui ont été aussitôt traduits dans des articles, des interviews, des conférences et des ouvrages de réflexion.

Le versant public des archives de Pierre Sudreau déroule dans un second temps les diverses étapes de sa carrière au service de l'État, de 1946 à 1962. Son passage au SDECE permet de disposer du dossier très complet de l'"affaire Passy" et d'éclairer ainsi les accusations qui pesèrent sur la gestion de l'ancien chef du Bureau central de renseignements et d'action (BCRA). Puis, après quelques documents sur la préfecture du Loir-et-Cher, vient un ensemble très nourri consacré à la construction et à l'urbanisme de 1955 à 1962, structuré en différents thèmes. À la rubrique "politique générale du ministère", on pourrait mettre en exergue les échanges réguliers avec le Premier ministre Michel Debré, dont témoigne un volumineux dossier de notes et correspondance, ou encore s'intéresser au voyage que fit Pierre Sudreau en URSS en septembre 1959, à la demande du général de Gaulle, pour y rencontrer Khrouchtchev. La question du logement, l'équipement de la région parisienne, l'aménagement du territoire ou encore la sauvegarde du patrimoine architectural et naturel sont ensuite autant de scansions de l'action ministérielle.

Les quelques mois passés à l'Éducation nationale, d'avril à octobre 1962, sont illustrés par de petits dossiers relatifs entre autres à la "Commission de réflexion du mercredi" et aux préoccupations quotidiennes de la rue de Grenelle : budget, enseignement supérieur, établissements et personnel d'Algérie, conférences de presse et voyages du ministre. Après sa démission à l'automne 1962, Pierre Sudreau ne retrouvera une charge publique qu'en 1974, avec la présidence du Comité d'étude pour la réforme de l'entreprise, dont les archives de fonctionnement sont ici livrées, constituant un fonds très complet et homogène, des premières consultations conduites auprès des organisations professionnelles jusqu'à la présentation du rapport et l'accompagnement de ses propositions. Quelques dossiers ferment la marche, reflétant les initiatives de Pierre Sudreau à la tête de la région Centre de 1976 à 1979 ainsi que ses réflexions sur la réforme régionale.

Ce rapide tour d'horizon laisse, on l'espère, entrevoir la richesse et la cohérence des archives ainsi mises à disposition (y font naturellement défaut les archives relatives à la présidence de la Fédération des industries ferroviaires, restées la propriété de cet organisme, situé 60, rue Anatole France, 92300 Levallois-Perret). Restituant pour une grande part les engagements et la carrière exemplaire d'un grand serviteur de l'État , elles offrent aussi un éclairage singulier sur la modernisation et le développement économique de la France dans la seconde moitié du XXe siècle, qu'il s'agisse de construire des logements décents, de tenter d'aménager et d'équilibrer le territoire national ou de repenser la place de chacun dans l'entreprise.

Quant aux archives d'André Pélabon, qui viennent clore le fonds 91 AJ, elles sont aussi l'occasion de s'arrêter sur un personnage en somme méconnu, ingénieur du Génie maritime, résistant de la première heure en Afrique du Nord, qui s'illustra dans la carrière préfectorale. Né en mars 1910, polytechnicien, André Pélabon se trouve au Maroc au début de la Seconde Guerre mondiale. Ses premières activités de résistance consistent à camoufler des matières premières et à transmettre des renseignements économiques et militaires via les filières américaines. Il se rallie à la France combattante puis aux Forces navales françaises libres (FNFL) en juillet 1942. Chargé à Londres d'organiser les services de construction et d'artillerie navale, il est ensuite détaché en Afrique du Nord, à la direction des services de renseignements et d'action. Directeur technique des services spéciaux à partir d'avril 1944, il s'occupe aussi de mettre en place des moyens de sabotage et d'action en vue du débarquement d'août 1944 en Provence. Il devient à l'automne 1944 directeur général de la Sûreté nationale puis enchaîne les responsabilités : préfet de Loire-Inférieure en septembre 1946, secrétaire général du Gouvernement général de l'Algérie en janvier 1947, plusieurs fois chargé des fonctions d'IGAME (inspecteur général de l'administration en mission extraordinaire) de 1950 à 1955, préfet des Bouches-du-Rhône en août 1953, par deux fois directeur du cabinet de Pierre Mendès France, alors président du Conseil en juin 1954 puis ministre d'État dans le cabinet Guy Mollet en février 1956. André Pélabon est décédé à Paris en octobre 1984. Ses archives concernent essentiellement la période de la Résistance, avec le ralliement à la France combattante et les activités liées au BCRA, et surtout ses fonctions à la tête de la Direction générale de la Sûreté nationale. Pour cette période, les documents apportent d'utiles précisions sur le personnel de la Sûreté ou font état de diverses affaires bien révélatrices de leur époque : la surveillance du Parti communiste y figure en bonne place, au même titre que les séquelles de la guerre ou les affaires de collaboration. Ce ne sont là bien sûr que des bribes, à rapprocher des archives versées depuis par le ministère de l'Intérieur, mais elles méritent de retenir l'attention des chercheurs, comme elles avaient retenu celle d'André Pélabon.

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