Légende :
Témoignage de madame Bouvart extrait du documentaire « Eysses, une prison dans la Résistance » (Amicale d'Eysses / IFOREP).
Genre : Film
Type : Témoignage filmé
Producteur : Amicale d’Eysses / IFOREP
Source : © Association nationale pour la mémoire des résistants et patriotes emprisonnés à Eysses Droits réservés
Détails techniques :
Durée totale : 52 minutes. Durée de l'extrait : 59 secondes.
Date document : 1987
Lieu : France - Nouvelle-Aquitaine (Aquitaine) - Lot-et-Garonne - Villeneuve-sur-Lot
Le
film retraçant l'histoire d'Eysses est décidé lors du 40ème congrès en
1985 pour donner un contenu plus historique que celui du livre édité
précédemment. Le film tourné à Villeneuve-sur-Lot et à Eysses en février 1986,
sort en janvier 1987, sous le titre « Eysses, une prison dans la
Résistance ». Il retrace en cinquante deux minutes les victoires
remportées dans la prison, le grand dessein : l'évasion du 19 février et son
échec, ce qu'était l'esprit d'Eysses, fait de tolérance, de civisme,
d'abnégation, tout en le replaçant bien dans le contexte.
Le témoignage de madame Bouvart est recueilli par Anna Dupuis-Defendini sur le pont des Cieutats, en plein centre-ville de Villeneuve-sur-Lot. En arrière-plan, nous apercevons la halle couverte du marché de Villeneuve. Le lieu choisi pour filmer cet entretien est important puisqu’il symbolise à lui seul le ravitaillement alimentaire.
Dans son témoignage, madame Bouvart évoque essentiellement le rôle joué par son mari, Gérard Bouvart, responsable du mouvement Libération à Villeneuve-sur-Lot. Menuisier, Gérard Bouvart profite de sa profession pour avoir accès à l’atelier de menuiserie de la Centrale en tant que représentant en scies à ruban. Cet accès lui est facilité par l’économe de la Centrale, monsieur Fougeroux, lui-même résistant. Grâce à la solidarité de la population locale, Gérard Bouvart parvient à faire pénétrer dans le Centrale de nombreux colis contenant des denrées alimentaires et du tabac. C’est également lui qui fera entrer des mitraillettes et des grenades dans la prison.
Retranscription :
"Avec mon mari, nous faisions partie d’un mouvement de résistance qui nous avait conseillé de prendre contact avec des personnalités sur Villeneuve-sur-Lot pour nous occuper des détenus, des patriotes d’Eysses qui étaient là et d’essayer de voir ce que nous pouvions faire pour eux.
La prise de contact s’est faite par l’intermédiaire de monsieur Fougeroux qui était économe de la Centrale d’Eysses et qui était lui-même résistant et qui nous a facilité la tâche. Et mon mari avait accès en tant que représentant de scies à ruban à l’atelier de menuiserie.
Nous sommes allés dans les campagnes où nous avons pu faire un abattage clandestin avec les paysans des alentours. Nous avons pu avoir ce qu’il fallait pour faire des colis. Nous leur avons mis de la viande, du tabac, du vin, des gâteaux, du pain. [Donc les paysans de la région vous ont beaucoup aidés ?] Les paysans de la région nous ont beaucoup aidés." (témoignage de madame Bouvart).
Auteur : Fabrice Bourrée
Lorsqu'arrivent à Eysses les convois
massifs de politiques en octobre 1943, le contact est pris par les
responsables des détenus avec la Résistance extérieure et principalement
Gérard Bouvart. Les gardiens résistants qui sont pour la plupart également
des habitants de Villeneuve, servent d'agents de liaison. Le premier rapport
adressé par le Comité directeur des détenus est sorti de la prison par le
surveillant Blondel qui le remet à Patat, cheminot alsacien ; d'autres suivent, écrits à l'encre sympathique et camouflés dans
un briquet truqué sorti par G. Dumas, chef d'atelier à la centrale et
résistant. Les relations n'en restent pas à l'échange de billets et quelques
semaines après leur arrivée, Gérard Bouvart est présenté à l'économe comme
marchand de bois et articles pour machines à bois ; après son accréditation
comme fournisseur officiel de la Centrale, il est donc mis en relation avec
le chef de l'atelier de la menuiserie, Gaston Dumas. G. Bouvart témoigne
avoir pu s'entretenir directement avec les deux délégués des détenus, Fuchs
et Auzias, grâce à la complicité de l'économe et de quelques surveillants,
dans un grenier au dessus de l'atelier de menuiserie de la centrale. Les
relations entre les détenus et la résistance extérieure sont donc établies
très rapidement ; les demandes des détenus portent immédiatement sur le
ravitaillement mais également sur l'aide à la réalisation d'un plan d'évasion.
La plupart des actions de solidarité sont collectives, et organisées par le mouvement local Libération. D'après plusieurs
témoignages de Villeneuvois ayant participé à la collecte, dont ceux
essentiels de monsieur Bouvart et de sa femme, la population répond dans
l'ensemble positivement aux sollicitations, par sympathie envers les
résistants emprisonnés. ; nous sommes
alors à l'automne 1943 et l'attentisme de sympathie envers la Résistance
grandit avec les défaites allemandes. Les Comités d'action paysanne sont bien
implantés dans une région rurale, qui, en ces temps de pénurie, fait figure
de privilégiée, étant donné la variété des ressources locales maraîchères et
fruitières qui permet de compenser en partie la raréfaction des denrées
contingentées. La collecte
s'avère efficace, aussi bien en argent qu'en nature grâce au dévouement de
personnalités qui utilisent leur réseau local de relations, comme le médecin
ORL, Jacques Guttières, ou madame Brun,
boulangère de la ville, qui permet d'utiliser son arrière-boutique pour la
confection des colis. Même les responsables du Secours
national de Villeneuve (organisme pourtant officiel), deux antifascistes
allemands se faisant passer pour un couple de réfugiés alsaciens (Alfred
Robus et Paula Goeppl) vont apporter leur aide.Les
journaux clandestins et les lettres de détenus attestent de
l'importance des envois de vivres, confirmés par le témoignage de l'économe
monsieur Fougeroux. D'après Gérard Bouvart et monsieur
Guttières, chaque semaine, vingt cinq colis de dix kilos sont envoyés à
Eysses avec l'autorisation du directeur, ils sont adressés à des détenus
désignés à tour de rôle parmi les plus nécessiteux par le Collectif. La
générosité des habitants est efficacement complétée
par l'aide financière des MUR de la région (Mme Lebon) transmise à Gérard
Bouvard par Paulette Amigas (nom de résistance : Colette - mouvement
Combat), qui utilise les moments de parloir (son mari est incarcéré à Eysses)
pour établir un lien avec les emprisonnés.
Paul
Cluzeau (du groupe-franc Raymond) fournit les tickets
de rationnement pour les denrées contingentées et met en
contact Gérard Bouvard avec l'épicier en gros monsieur Goudounèche, alias « intendant
Auriol », du mouvement Combat (et futur président du
Comité départemental de libération du Lot et Garonne) ; en échange de
tickets volés, il remet la marchandise et joue un rôle essentiel dans le
ravitaillement de la centrale à partir d'octobre 1943. Maurance (Front national de lutte de Villeneuve sur Lot) est
alors chargé du suivi, de l'acheminement, du ravitaillement collecté pour les
détenus qu'il centralise. Le
groupe peut compter sur un allié de poids du côté de l'Administration
pénitentiaire : l'économe monsieur Fougeroux et son chauffeur qui permettent
l'entrée des vivres dans la centrale ; les caisses de vivres étant
dissimulées dans le camion de la Centrale.
Cet important réseau de
ravitaillement a pu s'appuyer sur la générosité et la solidarité de la
population de la région. Au-delà même de l'aide alimentaire, de nombreux
habitants de Villeneuve sur Lot (et notamment du quartier d'Eysses) se sont
mobilisés avec beaucoup de courage pour soutenir et accompagner les détenus et
leurs familles.
D'après les ouvrages : Corinne Jaladieu, La prison politique sous Vichy. L’exemple des centrales d’Eysses et de Rennes, L’Harmattan, 2007. Amicale des anciens d'Eysses, Eysses contre Vichy, 1940-..., Tiresias, 1992.
Autres sources : Archives nationales, 72AJ282, AII1, Rapport de Gérard Bouvart chef du mouvement Libération de Villeneuve sur Lot, sur l’activité de ce mouvement depuis sa formation. Jacques Guttières, Le chemin du maquis. Villeneuve-sur-Lot, Ain, Jura, journal de marche d'un médecin, Paris, Raynaud, 1972.
Condamné en août 1942 à 18 mois de prison, Joseph Seisdedos arrive à Eysses le 29 janvier 1943. Il y reste jusqu’au 14 mars 1944, date de son transfert au camp de Noé.
Sources : Association nationale pour la mémoire des résistants emprisonnés à Eysses (dépôt MRN, fonds Eysses) - droits réservés
Menu du 1er janvier 1944 ayant appartenu à Joseph Seisdedos (verso)Condamné en août 1942 à 18 mois de prison, Joseph Seisdedos arrive à Eysses le 29 janvier 1943. Il y reste jusqu’au 14 mars 1944, date de son transfert au camp de Noé.
Sources : Association nationale pour la mémoire des résistants emprisonnés à Eysses (dépôt MRN, fonds Eysses) - droits réservés
Programme des festivités du 24 au 26/12/1944 et menu du réveillon.Programme ayant appartenu à Victor Dujardin, incarcéré à Eysses le 18 décembre 1943 et déporté à Dachau.
Sources : Association nationale pour la mémoire des résistants emprisonnés à Eysses (dépôt MRN, fonds Eysses) - droits réservés
Programme des festivités du 24 au 26/12/1944 et menu du réveillon.Programme ayant appartenu à Raymond Jacquet, représentant des gaullistes du préau 3 à Eysses, transféré à la prison de Blois en mai 1944 puis déporté à Buchenwald (rapatrié en mai 1945).
Sources : Association nationale pour la mémoire des résistants emprisonnés à Eysses (dépôt MRN, fonds Eysses) - droits réservés