Légende :
Portrait d'Albert Schweitzer, responsable FTP-FFI du secteur Rueil-Poissy et chef du 3e bureau de l'état-major FFI de Seine-et-Oise.
Genre : Image
Type : Photographie
Source : © Collection famille Schweitzer Droits réservés
Détails techniques :
Photographie analogique noir-et-blanc
Date document : Août 1944
Lieu : France - Ile-de-France
Né le 16 septembre 1906 à Longlaville (Meurthe-et-Moselle), son père étant mobilisé en 1914, Albert Schweitzer subit, avec sa mère et ses trois frères cadets, les privations, les répressions voire les violences des Allemands, jusqu'à la fin du conflit, ce qui expliquera plus tard sa haine du "boche". Le 10 novembre 1926, il est incorporé dans le cadre de son service militaire au 94e Régiment d'infanterie où il reste un an. Après son service militaire, il rejoint Paris et est embauché comme ouvrier à l'usine Gnome et Rhône du XIIIe arrondissement. Adhérent du Parti communiste, il devient en 1936 secrétaire de la section syndicale CGT de l'usine.
Mobilisé en septembre 1939, il est affecté, comme de nombreux communistes, à la base aérienne 201 à Blida (Algérie). Là, ces éléments considérés comme dangereux, cassent des pierres pour construire des routes et des aérodromes dans le Sahara. Ils servent de manœuvres au groupe disciplinaire des bataillons d'Afrique, surveillés par des gardes-mobiles. Ils reçoivent quelques nouvelles du monde extérieur par les caravanes arabes de passage dans la région. C'est par ce biais qu'Albert Schweitzer apprend la nouvelle de l'armistice. Démobilisé le 25 août 1940, il rentre en France. Passant la ligne de démarcation à Vierzon, il arrive à Paris le 31 août 1940. Il trouve alors un emploi de caviste à la halle aux vins aux entrepôts de Bercy.
Le 1er septembre se présente chez lui Anljovi, ouvrier d'usine qu'il avait connu avant la guerre et responsable de l'organisation des syndicats au sein du parti communiste clandestin. Celui-ci le met au courant des efforts entrepris pour réorganiser la vie syndicale dans les usines. Schweitzer commence alors travail clandestin dans les grandes entreprises et les arrondissements ouvriers, ainsi que dans les banques et les assurances. Il devient l'un des trois dirigeants de Paris-Ville.
En octobre 1940, il rencontre Henri Tanguy (futur "Rol-Tanguy") qui le charge d'organiser la lutte armée au sein de l'Organisation spéciale. Devenu chef régional de l'OS pour la région parisienne, il est chargé de la mettre en place en Seine-et-Oise. Le 14 octobre 1940, il sectionne un câble téléphonique allemand dans le bois aux Hospices à Clamart. Schweitzer participe à de nombreuses actions de sabotage qui motivent l'appel du Préfet de Seine-et-Oise s'élevant contre la détérioration du matériel allemand. Au début du mois de novembre 1940, Albert Schweitzer participe à la coupure de fils téléphoniques entre Chaville et Viroflay ainsi qu'au sabotage de matériel allemand à Sannois et à Ermont.
Le 10 avril, il aurait incendié un train de paille destiné à l'Allemagne à Champigny-sur-Marne. Le 5 septembre 1941, il participe à la destruction d'un camion allemand à Vincennes, devant le garage Coutard, 44 avenue de Paris. Au printemps 1942 sont créés les Francs-tireurs et partisans français avec à leur tête pour la région parisienne Raymond Losserand. Schweitzer devient chef de détachement puis de compagnie. Les principaux responsables FTP placés sous ses ordres sont pour la Seine-et-Oise, Emile Reaubourg à Mantes, Louis Cortot à Saint-Cloud et le capitaine Mattéi pour Rambouillet et Chevreuse.
En 1942, il participe à plusieurs reprises à des incendies de wagons de matériel allemand à Chamarande. Le 26 avril, en gare de Brétigny, son groupe fait dérailler un train de marchandises et de troupes. Jusqu'à son arrestation, il commandite ou dirige plusieurs actions de sabotage et plusieurs attentats contre les troupes allemandes.
Le 13 mai 1942, Schweitzer est arrêté à son domicile parisien par les services du commissariat de police de Puteaux pour infraction au décret du 26 septembre 1939. Les surveillances dont il avait précédemment fait l'objet avaient permis d'établir qu'il assurait la liaison entre des responsables communistes de la région parisienne. Dans le même coup de filet sont pris Jean Laffitte et Marcel Leroy, responsable des Jeunesses communistes. Au cours de son interrogatoire, Albert Schweitzer a nié les faits qui lui étaient reprochés ainsi que son affiliation à l'ex-parti communiste. D'après ses dires, ces rendez-vous avaient un but purement commercial. Albert Schweitzer est alors incarcéré à la prison de la Santé le jour même.
Le 26 ou 27 juin 1942, il fait l'objet d'une ordonnance de mise en liberté provisoire et est mis à la disposition des services de la préfecture de police. En attendant qu'il soit statué sur son cas, Albert Schweitzer est consigné au Dépôt du 27 juin au 5 septembre 1942. Etant considéré comme un élément actif de la propagande communiste clandestine, il est finalement interné administrativement au camp de Rouillé (Vienne) le 5 septembre 1942. Le 3 février 1943, ayant bénéficié d'une ordonnance de non-lieu, sa mise en liberté est envisagée à condition qu'il signe un engagement d'honneur de ne se livrer à aucune action illégale. Ayant refusé de se conformer à cette condition, Schweitzer est maintenu au camp et désigné en novembre 1943 pour partir en Allemagne au titre de la Relève. Mais avant que cette décision n'ait été prise, Schweitzer s'est évadé le 28 août 1943 des chantiers de l'organisation Todt à Migné (Vienne) où il était détaché.
Le lendemain, il est de retour à Paris et reprend contact avec les FTP. La direction des FTP lui confie la responsabilité du nord-ouest de la Seine-et-Oise (secteur Rueil-Poissy). Il est en outre chef des opérations (3ème bureau) de l'état-major départemental des FFI de Seine-et-Oise. Il participe à de nombreuses opérations : attaques de détachements allemands notamment à Mantes et à Poissy, attaque d'un dépôt d'explosif à Achères en avril 1944, destruction d'un réseau téléphonique à Chambourcy, deux déraillements entre Breuil et Evreux, plusieurs attaques du dépôt de locomotive de Vernouillet en juin et juillet, attentat sur la voie ferrée entre Saint-Germain-en-Laye et Poissy le 27 juillet. C'est lui qui dirige la bataille sur les deux rives de la Seine de Rueil à Bonnières, contre les éléments de la VIIème armée allemande en retraite, en août 1944, causant de grandes pertes à l'ennemi. Il mène les combats entre le 17 et le 31 août à Fontenay-Saint-Père, La Roche-Guyon, entre Rueil et Poissy, à Guernes, Meulan, Pontoise et à la Patte d'Oie d'Herblay s'efforçant d'interdire aux Allemands la traversée de la Seine.
Poursuivant la lutte, il forme un bataillon d'infanterie dénommé "Bataillon Marianne" qui deviendra le 2e bataillon du 24e régiment d'infanterie et contracte un engagement pour la durée de la guerre au sein de ce régiment. A la tête de cette unité, il monte en renfort dans les Ardennes puis, en janvier 1945, en Alsace et notamment dans la vallée de la Thurr où son bataillon remporte d'importantes victoires.
Il est intégré officiellement le 25 juin 1945 dans l'armée d'active avec le grade de capitaine. Blessé en service commandé en Allemagne le 19 juillet 1945, il est rapatrié en France. L'année suivante, Albert Schweitzer est nommé chef du service des affaires allemandes et autrichiennes du cabinet du Ministre de l'armement, Charles Tillon. Promu chef de bataillon le 1er juin 1946, il est muté un an plus tard au service du logement de la direction centrale du Service social de l'armée de terre. Le 2 septembre 1951, il est affecté à l'Etat-major de la subdivision de Paris.
Après son départ de l'armée en 1952, il devient chef de travaux d'une société de travaux publics dans le sud-ouest, puis fonde sa propre société, petite entreprise de construction du bâtiment en 1956, qu'il dirigera jusqu'à son décès survenu le 26 février 1967 à Seine-Port (Seine-et-Marne).
Décorations :
Chevalier de la Légion d'Honneur, Croix de guerre 1939-1945 avec palme, Médaille de la Résistance avec rosette, Médaille des Evadés, Croix de CVR, Bronze Star Medal.
Auteur : Fabrice Bourrée
Sources et bibliographie :
Archives nationales, 72 AJ 195 (résistance en Seine-et-Oise).
Archives du Bureau Résistance, dossier individuel d'Albert Schweitzer.
Service historique de la Défense, état des services.
ONAC de Paris, dossier de CVR d'Albert Schweitzer.
Archives de la Préfecture de police, GA/S1 (dossier Albert Schweitzer).
Archives privées famille Schweitzer.
Notice nécrologique parue dans L'Humanité du 28 février 1967.