Le corps franc de l’Armée juive de Toulouse

Légende :

Plaque apposée au 11 rue de la Pomme à Toulouse

Genre : Image

Type : Plaque commémorative

Source : © Collection particulière Droits réservés

Lieu : France - Occitanie (Midi-Pyrénées) - Haute-Garonne - Toulouse

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Contexte historique

Après le départ de David Knout en 1942, le duo constitué par Lucien Lublin et Abraham Polanski dirige l’Armée juive (AJ), toujours depuis Toulouse, et opère de nouveaux recrutements. Les actions demeurent d’abord dans le domaine social et culturel. L’entraide auprès des camps de Gurs, Rivesaltes, Le Vernet, Noé et Récébédou se voit renforcée par les rabbins aumôniers, en particulier le rabbin Kapel. Lublin opère des recrutements dans les milieux des jeunes sionistes en zone Sud, plus précisément à Montpellier, Nice, Lyon, Limoges et Grenoble. Chaque membre de l’AJ doit en principe se soumettre à un cérémonial d’initiation, souvent mené par Polonski ou Ariane Knout, dans un local clos, uniquement éclairé pour montrer la Bible et le drapeau bleu et blanc. L’impétrant doit alors prononcé cette phrase : "La main droite sur le drapeau bleu blanc, je jure fidélité à l’armée juive et obéissance à ses chefs. Que revive mon peuple, que renaisse Eretz Israel! La liberté ou la mort." Souvent, la cérémonie n’a pas lieu ou en version abrégée.

En 1943, un accord avec la structure américaine Joint permet un financement depuis la Suisse. Souvent, l’agent de liaison pour ramener l’argent n’est autre que la fille d’Ariane Fixman, issue de son premier mariage, Betty Knout. Outre cet argent qui permet d’intensifier les opérations de sauvetages, des accords avec les Éclaireurs Israélites de France (EIF) rendent les opérations d’entraide plus efficaces. A Toulouse, des PC sont établis en de nombreux endroits en fonction de l’activité des différents services : rue Joux-Aigues, rue des Couteliers, rue de la Pomme, rue du rempart Saint-Etienne, rue Cance, rue Tripière, etc.

L’apport financier du Joint ouvre aussi des perspectives dans la lutte armée. Si Toulouse est le siège du Comité central directeur de l’AJ, c’est également là qu’est fondé en novembre 1941 le premier corps franc, placé sous les ordres d’Albert Cohen (dit Bébé). A partir de cette base, des corps francs de l’AJ prennent place à Lyon, Nice, Paris, Grenoble, Limoges. Henoch Szlajfer, qui rejoint l’AJ à Toulouse en novembre 1941, est particulièrement chargé des missions de liaisons et de diffusion du matériel clandestin, tracts et faux papiers auprès de ces sections en cours de création dans différentes villes de province.

Les maquis de l’Armée juive voient le jour dans le Tarn à la fin de l’année 1943. Les maquisards s’installent successivement à Biques (novembre 1943), Lacaune (mars 1944) puis à l'Espinassier (25 avril 1944). Suite au débarquement en Normandie le 6 juin 1944 et conformément à l’accord passé avec les chefs de la Résistance tarnaise, les maquisards de l’Espinassier sont versés au Corps franc de la Montagne Noire au sein duquel ils constituent le 4e escadron ou « peloton Trumpeldor » (héros de l’autodéfense juive, tué en 1920 en Palestine). Les liaisons entre ces maquis et Toulouse sont constantes, que ce soit pour l’envoi de volontaires ou pour le ravitaillement en armes. Ainsi, après avoir rejoint l’AJ à Toulouse en octobre 1942, en lien avec Jacques Lazarus, Oscar Esseryk devient agent de liaison chargé du transport d’armes entre Toulouse et le maquis de la Montagne noire. En mars 1944, il est muté au groupe-franc sous les ordres d’Albert Cohen.
Les femmes ont également joué un rôle important, notamment en qualité d’agents de liaison ou de convoyeuses. Ainsi, Ginette Mouchenik dite Pierrette travaille d’abord avec le groupe de Nice sous les ordres d’Henry Pohorylès avant d’être mutée à Toulouse où, sous les ordres de Cohen, elle accomplit différentes missions de liaison avec ces maquis du Tarn.

Lors d'une opération d'envergure le 22 juillet 1944, Ariane Knout et Tommy Bauer sont abattus dans un guet-apens tendu par la Milice au 11 rue de la Pomme à Toulouse. Dans ce cadre, sont également arrêtés : David Blum, Armand Luks et Jacques Salomonovitch (internés à la prison de Toulouse, ils en seront libérés par les FFI). Raoul Léons, quant à lui, parvient à s’échapper malgré sa blessure à la jambe.

Le corps franc de Toulouse participe, toujours sous les ordres d’Albert Cohen, aux combats de la libération et au nettoyage de la ville rose.
Après la Libération, c’est à Toulouse, que l’OJC est officiellement reconnue par les autorités de la 17e région militaire. Le 20 août 1944, l’unité militaire est rattachée administrativement au Bataillon de sécurité 1/17, jusqu'au 2 janvier 1945, date de sa dissolution.


Auteur : Maurice Lugassy

Sources :
Service historique de la Défense, Vincennes, GR 18 P 128 (Organisation juive de combat) ; 2010 PA 54/82 (fonds du MLN).
Organisation juive de combat – France – 1940-1945, Paris, éditions Autrement, 2008.