Stèle d'Annonay
Légende :
Au recto : Stèle érigée par la municipalité d’Annonay en partenariat avec le comité local de l’Association des Anciens Combattants de la Résistance, inaugurée le 2 août 1997.
Cenotaph of Annonay
This cenotaph was erected by the village of Annonay in a partnership with the local committee for the former Interior Resistance fighters and was inaugurated on August 2nd, 1997.
Genre : Image
Type : Photographie
Producteur : François Chevalier
Source : © François Chevalier Droits réservés
Détails techniques :
Photographies numériques.
Date document : 2007
Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Ardèche - Annonay
Analyse média
La stèle actuelle, située sur l’emplacement de l’ancienne gare d’Annonay, a succédé à celle plus modeste, faite d’un pictogramme accolé sur une murette maçonnée qui y avait été inaugurée en 1989 et avait été à l’origine d’une cérémonie commémorative annuelle, comporte trois panneaux.
Au centre a été fixé celui d’origine où l’on peut lire « Ici en gare d’Annonay, le 4 août 1944, les Forces Françaises de l’Intérieur ont libéré 70 prisonniers politiques… » et se terminant par les noms de trois prisonniers tués par balles lors de l’affrontement entre résistants et convoyeurs allemands.
A droite, un panneau mentionne une citation décernée aux unités F.F.I. ayant mené à bien l’opération.
A gauche, la plaque est dédiée « aux aviateurs et parachutistes américains morts pour la France dans notre région ».
Le rapprochement qui peut poser interrogation est sans doute lié au fait que des éléments de "l’Operational Group" Betsy, parachutés en Ardèche le 26 juillet, appelés en renfort, avaient contribué fortement, par leurs tirs de bazooka, à la reddition des convoyeurs allemands.
Lors de la cérémonie du samedi 7 août 1999, l’angle supérieur de la stèle s’est enrichi d’une plaque libellée "Place du Souvenir Français", nom octroyé à la place de l’ancienne gare. Depuis 1999, c’est d’ailleurs l’Association locale du "Souvenir Français" qui organise la cérémonie commémorative annuelle.
Au verso : Une vue des personnes participant à la cérémonie commémorative d’août 2007 au cours de laquelle avait été réalisée une interview du capitaine Georges Novat pour un DVD consultable au Musée de la Résistance en Ardèche. Parmi les personnalités au premier plan, Monsieur Dussopt, député maire d’Annonay.
This cenotaph is found in the exact location of the former train station of Annonay. Comprising of three plaques affixed to small wall, the cenotaph was inaugurated in 1989 and now is where an annual commemorative ceremony is held.
Written on the plaque in the middle “Here in the train station of Annonay on August 4th, 1944 the French Forces of the Interior liberated 70 political prisoners…” and ends with a list of the prisoners that were shot in the battle to free them between the Germans and the Resistance fighters.
To the right is a plaque that commends the efforts of the F.F.I. units in the completion of their operation.
To the left is a plaque dedicated to the “American pilots and parachutists that gave their lives for France in Ardèche”.
Through the collusion of the American parachutists from the operational group Betsy who landed in Ardèche on July 26th and the local Resistance units, the two groups were able to force the German troops into surrender.
During the annual ceremony on August 7th, 1999 the top of the way was decorated with a plaque labeled “Plaque du Souvenir Français” in place of the one of the former train station.
Raoul Galataud
Traduction : Sarah Buckowski
Contexte historique
La ville d’Annonay est riche d’histoire et la période de la Résistance n’est pas la moindre. Une douzaine de noms de rues et plaques de souvenir en témoignent : proclamation de "la République à Annonay" dès le 6 juin 1944 ; reprise de la ville le 19 juin par les forces d’occupation allemandes, etc. Au "Rond-point du 8 mai", une stèle érigée à la mémoire de "toutes les victimes des occupants et des miliciens" comporte une liste de 26 noms.
Parmi tous les lieux de mémoire balisés, celui de la place de l’ancienne gare revêt cependant une importance particulière car il évoque un fait se révélant unique en France : la libération d’un convoi de déportation vers les camps de la mort.
Le 1er août vers 20 heures, 71 prisonniers, dont neuf femmes ou jeunes filles, détenus dans les prisons de Marseille suite à leur arrestation par la police de Vichy ou la Gestapo en raison de leur appartenance à la Résistance ou pour quelques-uns pour motif racial, sont transportés à la gare Saint-Charles et entassés dans un wagon de voyageurs. Le wagon est accroché à un train composé provisoirement pour une première étape utilitaire vers Lyon, de trois locomotives et d’un wagon postal. 12 convoyeurs allemands, armes à la main, prennent place dans le wagon. Le convoi s’arrête souvent en raison des bombardements et sabotages des voies ferrées. Il ne parvient que le matin du 3 août en gare du Teil en Ardèche. Il n’arrive un peu plus au nord, en gare de Peyraud,que vers 20 heures !
Pour les forces armées de la Résistance qui occupent les deux tiers du département, la libération de ce convoi est un objectif qui s’impose. L’exploit est finalement réalisé par une vingtaine de garçons du secteur d’Annonay de l’Armée Secrète, dont l’état-major a été prévenu de l’arrivée du convoi en gare de Peyraud par les chefs de gare de Peyraud et d’Annonay, tous deux acquis à la Résistance.
Sont engagés dans l’expédition huit hommes du groupe franc Gerelli et autant d’une compagnie commandée par le lieutenant Georges Novat. Les garçons du groupe Gerelli, avec ceux de Novat en protection, s’infiltrent vers 22 heures sur les quais de la gare, où stationne également un train blindé de l’armée allemande. Une attaque en force est impossible, il faut employer la ruse.
Louis Chevalier (un garçon audacieux qui fera carrière comme inspecteur de police) s’empare de la tenue de travail d’un cheminot et de sa lanterne et se hisse sur la locomotive de tête du convoi, revolver au poing. Il fait stopper le départ amorcé vers la traversée du Rhône en direction de Lyon. Deux de ses camarades se hissent à leur tour sur les deux autres locomotives. Le chef de gare réussit à aiguiller le convoi vers Annonay. Vers 3 heures du matin, Chevalier stoppe le convoi sur la voie de garage qui lui a été préparée. Les autres éléments du groupe, revenus par la route, ont pris position tout autour pour prendre les convoyeurs sous le feu de leurs armes. Ils ont reçu quelques hommes en renfort et en particulier des éléments américains de l’Operational Group Betsy qui ont l’avantage d’être pourvus de bazooka, armes lourdes qui vont permettre de rendre inutilisables les locomotives par des tirs ajustés.
Les convoyeurs allemands, qui n’hésitent pas à se couvrir derrière les prisonniers, ouvrent un feu nourri dans toutes les directions mais sans précision. A 6 heures du matin, les soldats ennemis à court de munitions sont capturés. Trois prisonniers sont tombés sous les balles au cours des échanges de tirs, mais 68 sont libérés sains et saufs. Débarrassés des fers qui les enchaînent, ils sont réconfortés par la population résistante. Ils seront hébergés jusqu’à la Libération dans les hôtels de la région libérée de Saint-Agrève (une situation impossible avant le 6 juin).
Parmi les femmes libérées, telle la Résistante Yvette Schuster résidant à Paris, plusieurs auront à cœur de venir fidèlement participer à la cérémonie annuelle commémorant cette action exemplaire de libération d’un train de déportés (voir verso).
The town of Annonay is of rich history in which the history of the Resistance is included. Within the town are a dozen of streets and commemorative plaques that pay homage to the “Republic in Annonay” established from June 6th onwards, The recovery of the city from German forces on June 19th, 1944, and the “Round-About of May 8th” a monument erected in memory of “all victims of the occupants and militia” along with a list of 26 names.
Of all the memorials and commemorative plaques in Annonay, it is the cenotaph found where the train station once stood that is of particular importance to residents. The train station of Annonay much like the stations of many towns under German occupation was the point of departure for those sent to the concentration camps.
At 8 o’clock on August 1st, 71 prisoners amongst 9 of which were women were detained in a prison in Marseille following their arrest by the Gestapo under suspicion of participating in the resistance or appearing to be of Jewish origin. They were then transported to the Saint-Charles train station where they were forced on to a service train carrying mail and goods to 12 German soldiers. It was not until 8 pm August 3rd that the train finally arrived in Peyraud, a town near to Annonay, due to the bombs the Resistance forces had planted along the tracks to sabotage the rail lines.
For the Resistance forces that occupied two thirds of the Ardèche department the liberation of this convoy was essential. Twenty young men from the Annonay sector of the Armée Secrète accomplished the mission after being informed of the train’s arrival in Payraud by fellow resistance forces.
Then, at 10 pm eight men from the group franc Gerelli and eight from the company commanded by George Novat came together to take the train. As the men from Novat’s company entered the train station in Payraud they noticed that the German forces had the train well guarded leaving them with the only option of a covert attack.
One of the men, Louis Chevalier, who would go on to become a police inspector, decided to steal the uniform and lantern of a rail worker and boarded the train with a revolver in hand, in order to the train from continuing on to Lyon. Two other men were able to hoist themselves on to the other two locomotives that made up the train and with the help of the stationmaster were able to steer the train towards the station in Annonay. Around 3 am, Chevalier stopped the train at the siding that he had prepared for the operation. The other members of the group arrived by car and took position around the convoy. Reinforcements that were called in included several Americans from the operational group Betsy who were equipped with a bazooka that was used to render the locomotives inoperable.
The German soldiers did not hesitate to take cover behind the 71 prisoners and opened heavy fire in all directions without any precision. At 6 am they finally ran out of ammunition and were captured by the Resistance forces. Three prisoners were killed as a result of the shootout but the 68 others were released unharmed and taken in by the sympathetic citizens of Annonay and were looked after until the Liberation in the already free area of Saint-Agrève, which would have proved impossible before June 6th.
Among the women fred from the train that night, Yvette Schuster, a resident of Paris still faithfully attend the annual ceremony commemorating the intrepid mission undertaken by the Interior Resistance forces in Annonay.
Raoul Galataud
Traduction : Sarah Buckowski