Rue-Georges-le-Bigot, Villejuif
Légende :
Rue-Georges-le-Bigot, nommée en hommage au maire de la ville, mort en déportation en 1942, et, au-dessus, plaque commémorative de 11 personnes fusillées, Villejuif
Genre : Image
Type : Nom de rue
Producteur : Claude Richard
Source : © Collection Claude Richard Droits réservés
Détails techniques :
Photographie numérique en couleur.
Lieu : France - Ile-de-France - Val-de-Marne - Villejuif
Analyse média
Transcription de la plaque du haut :
"Place des fusillés : Bru André, 42 ans, conseiller - Thibert René, 48 ans, conseiller - Bachet Robert, 29 ans - Baudet René, 36 ans - Ben Sliman Mohamed, 42 ans - Frémont Georges, 37 ans - Garin Louis, 58 ans - Herz Pierre, 30 ans - Moussu Robert, 29 ans - Plaud René, 20 ans - Sautet François, 39 ans, morts pour la patrie".
Contexte historique
Né le 11 février 1899 à Villejuif (Seine, Val-de-Marne), mort le 15 septembre 1942 à Auschwitz (Pologne) ; employé de mairie ; secrétaire CGTU des employés et ouvriers des communes de la Seine, militant communiste ; conseiller général en 1935, maire de Villejuif (1937-1939).
Georges Le Bigot passa toute son enfance à Villejuif : son père François Le Bigot, originaire de l’Eure-et-Loir, contrôleur à la Compagnie du Gaz, fut conseiller municipal radical de la commune puis adjoint avant 1921, date à laquelle il démissionna ; sa mère fut tour à tour nourrice et couturière. Il poursuivit ses études à l’école primaire supérieure (deux ans) de cours complémentaire et un an d’EPS) et entra comme petit commis à la mairie de Gentilly en 1915. Il travailla également dans les mairies d’Arcueil (1921-1929) et de Villejuif (1916-1917 ; 1926-1929), acquérant des connaissances administratives qui devaient, par la suite, lui être d’un précieux secours. Son action militante débuta sur le terrain syndical. En 1923, il devint secrétaire administratif du syndicat unitaire des employés et ouvriers des communes de la Seine puis secrétaire général. Il participa au IIIe congrès national de la CGTU qui se tint du 26 au 31 août 1925. Délégué par ses camarades syndiqués, au cours de l’été 1925, il se rendit en Union soviétique et, à son retour, adhéra au Parti communiste, en décembre. En 1927, il entra à la commission exécutive de la Fédération unitaire des Services publics. Il fit un autre voyage en URSS en 1931 et cosigna avec Chauvel et Gerbois une brochure intitulée : Ce que nous avons vu en URSS. Employé à la mairie de sa commune natale, Georges Le Bigot participa alors activement à la gestion de la première municipalité communiste que Gaston Cantini avait enlevée en mai 1925 et accepta même d’être délégué sénatorial en janvier 1927.
Sa collaboration le conduisit à se présenter aux élections municipales de 1929 sur la liste de Paul Vaillant-Couturier. Contraint d’abandonner son emploi pour être éligible, élu le 5 mai, en troisième position, il fut nommé deuxième adjoint. Devenu permanent du Parti communiste, il s’imposa comme la véritable cheville ouvrière du conseil. I fut membre du bureau de l’Union des municipalités communistes et du comité régional Sud. Il fut celui qui anima, en 1934, les premières rencontres locales entre le Parti socialiste et le Parti communiste. Il fut blessé le 12 février 1934, assailli par la police, menacé par une arme à feu qui tira en l’air, alors qu’il attendait pour se rendre à la manifestation de Vincennes. Hospitalisé, il porta plainte. Réélu second de la liste le 5 mai 1935, il accepta les fonctions de premier adjoint et fit campagne, quelques jours plus tard, pour les élections cantonales, dans la seconde circonscription de Villejuif. Il battit Georges Gérard, conseiller sortant, maire socialiste SFIO du Kremlin-Bicêtre. Au conseil général de la Seine, il fit partie des commissions : Assistance aux vieillards et aliénés, Hygiène et police et Assainissement. Membre du comité régional du Parti communiste, il était également, avec Albert Vassart, secrétaire de rédaction de l’Information municipale.
Le 15 novembre 1937, Georges Le Bigot succéda au maire, Paul Vaillant-Couturier, qui venait de mourir. Mobilisé au début de la guerre, puis démobilisé à Le Blanc en août 1940, il fut sollicité dans le cadre du cours légaliste qui suivit l’entrée des troupes allemandes à Paris à l’été 1940, pour « reprendre » la mairie de Villejuif. Il refusa de réapparaître légalement sous le contrôle des Allemands. Fin août 1940, il fut vivement mis en cause par les responsables communistes : « Ils blâment LB en lui montrant que la population le réclame et qu’il ne fait pas son devoir de communiste ». Il affirma qu’il ne « comprenait pas la politique des Allemands à notre égard » faisait allusion aux contacts avec Abetz. La réunion conclut : « L.B. a une politique de lâcheté et de trahison » et lui demande de « remplir sa tâche d’élu sous peine de sanction ». Odette Janvier qui représentait la direction du parti dans cette réunion conclut : « Le Bigot a fait figure d’accusé et il n’est suivi par aucun camarade responsable de Villejuif » et le qualifie de « petit bourgeois égoïste ». Son refus de reprendre place légalement à la mairie, sous le contrôle des Allemands, relevait de l’antifascisme, mais il fut transformé dans la mémoire militante locale comme un refus de participer à la Résistance. Le problème ne se passa d’ailleurs pas car il resta très peu en liberté.
Arrêté le 6 octobre 1940 à son domicile de Villejuif et interné à Aincourt (Seine-et-Oise), il fut transféré le 4 décembre suivant à Fontevrault (Maine-et-Loire), puis à Gaillon, à Compiègne et enfin à la prison de Clairvaux (Aube) à partir du 20 janvier 1941 d’où il fut déporté le 6 juillet 1942 à Auschwitz, il y mourut deux mois plus tard. Il aurait provoqué lui-même sa mort par les balles allemandes. Par une lettre du 14 février 1946 à Georges Marrane, la famille demanda qu’il soit associé aux hommages rendus aux élus communistes morts pendant la guerre : « Depuis juin 1945, j’ai plusieurs fois pensé m’adresser à vous ancien camarade de Georges le Bigot, la peine que nous ressentions tous nous rendait sensible le silence pour ne pas dire plus de la presse du parti envers la mémoire de notre Georges. Il a fallu l’article de l’Humanité du 6 février 1946 relatant l’hommage rendu par le conseil général aux huit élus communistes morts pour la France pour que nous réalisions cette fois que pour le parti notre pauvre Georges n’était pas tombé pour son idéal et pour la France » Une lettre de Léon Mauvais à Georges Marrane, le 1er avril 1946, affirme, au nom du secrétariat du PCF, qu’il ne faut pas l’associer aux hommages « Nous te retournons les trois lettres ci-jointes que tu nous as communiquées et qui ont trait à Longhi Pierre Longhi et Le Bigot. Nous t’indiquons qu’il n’y a pas lieu de changer l’attitude que le Parti a eue jusqu’à présent ».
Son frère, André Le Bigot, né le 11 mai 1910 à Villejuif, employé, qui avait été un des animateurs de la grève de juin 1936 à La Samaritaine, reprit le flambeau après la guerre et fut, à son tour, conseiller municipal de la commune à partir de 1953 et adjoint de Louis Dolly, maire communiste. Il mourut le 2 décembre 1992 à Villejuif.
Georges Le Bigot s’était marié à Villejuif le 21 mars 1929 avec Jeanne Falloux, brocheuse ; il était père d’un enfant, Dounia, née en 1932.
La brochure Villejuif à ses martyrs de la barbarie fasciste lui consacra une page. Un de ses frères, André Le Bigot fut maire adjoint de Villejuif, dans la municipalité Louis Dolly.
Auteurs : Claude Pennetier, Nathalie Viet-Depaule pour le Maitron
SOURCES : RGASPI, 495 270 8482, autobiographie, Villejuif, 15 mars 1933 ; 517 1 1663. — Arch. Paris, DM3 ; versement 10451/76/1 ; listes électorales et nominatives. — Arch. Nat. F7/13134 et 13189. — Arch. PPo. 101. — État civil de Villejuif. — Arch. Com. de Villejuif. — Nos Édiles, p. 397-398. — Georges Lefranc, Juin 36, Paris, 1966, p. 212. — Roger Bourderon, La négociation. Été 1940 : crise au PCF, 2001, Syllepse. — Renseignements recueillis par Jean Maitron et Michèle Rault.