François Mauriac

Légende :

François Mauriac préparant son discours pour sa réception à l'Académie française

Genre : Image

Type : Photographie

Producteur : [photographie de presse] / Agence Meurisse

Source : © gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France Libre de droits

Détails techniques :

Photographie analogique en noir et blanc

Date document : 1933

Lieu : France - Ile-de-France - Paris - Paris

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Contexte historique

François Mauriac fut le seul écrivain de l'Académie française à avoir une activité clandestine.
Issu d'une famille de propriétaires terriens du Bordelais, Mauriac, né à Bordeaux le 11 octobre 1885, s'inscrit à l'Ecole des Chartes après avoir obtenu une licence ès-lettres à l'université de Bordeaux, mais il abandonne rapidement ses études pour se consacrer à la littérature. L'écrivain catholique accède à la reconnaissance littéraire après la Grande Guerre, avec La Chair et le Sang (1920), Le Baiser au lépreux (1922), Génitrix (1923), et Le Désert de l'amour (1925), couronné par le Grand Prix du roman de l'Académie française.

Elu sous la Coupole en 1933, Mauriac, qui appartenait jusque-là au camp des conservateurs, amorce une évolution vers la gauche qui passe par la critique du pharisaïsme bourgeois, prégnante dans son œuvre (Le Nœud de vipères, 1932). Cette évolution le conduit à prendre position contre l'agression mussolinienne en Ethiopie, puis contre les nationalistes menés par Franco pendant la Guerre d'Espagne, alors même que ces derniers obtiennent le soutien du Vatican. Ses positions s'expriment dans les revues catholiques Sept et Temps Présent, qui marquent leur distance avec la politique officielle de l'Eglise catholique. Il y rencontre notamment Maurice Schumann.

Rallié à De Gaulle après la défaite, ce dernier interpelle Mauriac le 17 août 1940 à la radio de Londres. Jusqu'à la fin de l'année, Mauriac demeure cependant maréchaliste. En juin 1941, au moment de la sortie de La Pharisienne, qui n'a été autorisée de paraître qu'en tirage limité, il est victime d'une campagne très violente menée contre lui par la presse collaborationniste, en particulier Je suis partout. A l'Académie, il soutient pendant toute cette période Georges Duhamel qui lutte "à visage découvert" contre les fractions collaborationniste et pétainiste. A l'automne 1941, l'écrivain catholique donne son adhésion de principe au tout premier noyau du futur Comité national des écrivains (CNE) qui vient de se former autour de Jacques Decour et Jean Paulhan. Il en devient un membre actif en 1943, quand le comité commence à fonctionner véritablement. Il donne aussi, à partir de ce moment, sa caution littéraire aux Lettres françaises, avec un article sur "Les faux calculs de Drieu La Rochelle" paru dans le numéro 15 d'avril 1944, ainsi qu'aux Editions de Minuit clandestines, avec la publication du Cahier noir, sous le pseudonyme de Forez, en août 1943. Il en avait entrepris la rédaction dès le début de l'Occupation, sous le titre Lettre à un désespéré pour qu'il espère. La version définitive garde la trace des notations prises successivement pendant les années noires, où se lit l'indignation croissante contre la culture de reniement et contre la répression, qui conduit son auteur du désespoir à la colère et à l'opposition active.

A la Libération, le premier numéro légal des Lettres françaises, daté du 9 septembre 1944, s'ouvre sur un article de Mauriac initialement destiné aux Editions de Minuit clandestines. Intitulé "La nation française a une âme", il reprend intégralement la devise républicaine : "Liberté, Egalité, Fraternité OU LA MORT". Promu président d'honneur du CNE, l'académicien siège aussi auprès des communistes au comité directeur du Front national. Mais Mauriac ne tarde pas à prendre ses distances avec l'intransigeance de ses anciens camarades du CNE, se ralliant à la politique gaullienne de réconciliation nationale et s'affrontant avec Camus sur la question de l'épuration dans une célèbre polémique baptisée "Justice ou charité". S'il démissionne de la présidence du CNE au début du mois d'octobre, il reste plus d'un an encore au comité directeur du Front national, avant de rompre définitivement avec les communistes à la suite de son exclusion du CNE en 1948 pour avoir enfreint la charte en acceptant de publier à La Table ronde à côté d'écrivains collaborateurs inscrits sur la "liste noire" du CNE. Lauréat du prix Nobel en 1953, l'écrivain catholique continuera à mettre sa notoriété au service de causes politiques avec son engagement à la tête du comité France-Maghreb dans l'affaire du Maroc, puis avec sa dénonciation de la torture et son plaidoyer pour la négociation avec le FLN pendant la guerre d'Algérie.

François Mauriac s'est éteint le 1er septembre 1970.


Gisèle Sapiro in DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004

Bibliographie :
Forez (François Mauriac), Le Cahier noir, Paris, Minuit, 1943.
François Mauriac, Le Bâillon dénoué. Après quatre ans de silence, Paris, Grasset, 1945.
François Mauriac, Mémoires politiques, Paris, Grasset, 1967.
Entretien avec François Mauriac in Jacques Debû-Bridel, La Résistance intellectuelle, Paris, Julliard, 1970.
Jean Lacouture, Francois  Mauriac, Paris, Seuil, 1980, 2 vol.
Jacques Monférier, "Le genèse du Cahier noir", Travaux du centre d'études et de recherches sur François Mauriac (Université de Bordeaux) 1, 1977, pp. 45-72.
Gisèle Sapiro, La Guerre des écrivains, 1940-1953, Paris, Fayard, 1999.
Jean Touzot, Mauriac sous l'Occupation, Paris, La Manufacture, 1990.
Jean Touzot (dir.), François Mauriac, Cahiers de l'Herne 48, 1985.