Plaque à la mémoire de 6 pendus de Nîmes (Gard)
Légende :
Trois plaques, rappelant les pendaisons exécutées par des éléments de la 9ème Panzer Division SS du général Bittrich, en fin d'après-midi du 2 mars 1944 se trouvent sur :
- le mur du lycée Camargue, avenue Jean Jaurès (6 pendus)
- sur le viaduc SNCF du boulevard Talabot, route de Beaucaire (3 pendus)
- rue Vincent Faïta au Pont de chemin de fer.
Genre : Image
Type : Plaque commémorative
Source : © Mémoire et Résistance dans le Gard Droits réservés
Détails techniques :
Photographie numérique en couleur
Date document : 2016
Lieu : France - Occitanie (Languedoc-Roussillon) - Gard - Nîmes
Analyse média
Interdiction fut faite à la population d'enlever les cadavres avant 24 heures.
14 tombes de ces suppliciés sont regroupées au cimetière Saint-Baudile dans le Carré militaire : ORDINES Miguel 52 ans ; ORDINES Jean 21 ans ; MATHIEU Roger 23 ans ; BAUDOIN Jean Louis 21 ans du hameau de Driolle ; JANKOWSKI Jan 42 ans ; LUKAWSKI Jan 60 ans ; DAMASZEWICZ Joseph 52 ans ; KAJANOWICZ Stanislas 26 ans, du centre polonais de Lasalle" ; ECKHARDT Émile 62 ans ; NADAL Hénoc 62 ans ; CARLE Louis 43 ans ; JEANJEAN Désir 42 ans du hameau d’Ardaillers-Valleraugue. ; LÉVÈQUE Albert 26 ans ; DONATI Fortuné 19 ans maquisards de Bir Hakeim, blessés à Saint Hippolyte du Fort et KIEFFER René 24 ans, identifié tardivement, il est enterré dans le cimetière du maquis Aigoual-Cévennes à Saumane.
Mémoire et Résistance dans le Gard
Contexte historique
Les offensives menées par les Waffen SS du général Bittrich (*) à la fin février 1944 contre les maquis cévenols, dans la région comprise entre St-Hippolyte-du-Fort, Valleraugue, le Vigan et Lasalle n'ont pas donné les résultats escomptés. La fureur SS (Sturm Schutzstaffel) va alors se déchaîner avec une méthode devenue classique : la prise d'otages : cinq à Driolle (dont Roger Broussous pendu à Saint-Hippolyte-du-Fort), quatre à Lasalle, six à Ardaillers, un à Saint-Hippolyte, enfermés ensuite à l'école de la Croix-de-Fer à Nîmes.
Comment se sont déroulés ces événements et la tragédie qui s'ensuivit ?
A l'aube du 28 février, à partir de leur base installée à Saint-Hippolyte-du-Fort, les SS se dirigent d'abord sur Driolle, un petit hameau situé entre St-Roman de Codières et St-Hippolyte : Miguel Ordinez, l'exploitant d'une des trois fermes et quatre réfractaires réfugiés dans cette ferme sont arrêtés, dont Jean Ordinez (le fils), déserteur des Chantiers de jeunesse, Roger Mathieu, Jean-Louis Baudoin et Roger Broussous (pendu le 28 février à St-Hippolyte même). Le hameau de Driolle est pillé et les deux maisons (celle de M.Ordinez et celle de M.Soulier) qui le composent sont incendiées. Ils se dirigent ensuite vers le hameau des Fosses, vide de tout réfractaire, et, par vengeance, tuent le jeune Soulier qu'ils avaient contraint de les guider.
De retour à Saint-Hippolyte, les SS de la colonne de Driolle arrêtent un Alsacien, nommé René Kieffer, dont on n'a pas retrouvé trace (le pendu inconnu retrouvé avec les pendus de Nîmes est identifié ultérieurement). Ce même jour, 28 février vers 11 h30, le jeune Broussous est pendu au pont de Planque, route de Lasalle à Saint-Hippolyte.
Le lendemain, lors d'un affrontement, deux maquisards de Bir-Hakeim sont tués et deux autres blessés : Eugène Donati, 20 ans, et Albert Levêque, 36 ans. Ils sont transportés à l'hôpital Gaston Doumergue de Nîmes mais, dénoncés par un employé, ils feront partie des pendus. En même temps, d'autres événements aussi tragiques se déroulent à Ardaillers, dans la région du Vigan. Les nazis croyaient affronter victorieusement des maquisards mais, avertis à temps, les résistants ont décroché. Cet échec déchaîne leur fureur, ils arrêtent plusieurs fermiers accusés de nourrir les "bandits réfractaires". Ils en relâchent deux mais en gardent quatre : Emile Eckhardt, 62 ans, propriétaire du Grand Hôtel de l'Aigoual ; Louis-Walter Carle, 43 ans, agriculteur ; Désiré Jeanjean, 22 ans ; Hénoch Nadal, 62 ans, cultivateur. Tous les quatre sont pendus à Nîmes le 2 mars.
Les SS ont envoyé une autre colonne à Lasalle où ils procèdent à l'arrestation de vingt ressortissants polonais dans leur centre d'accueil. Ils en retiennent quatre (Joseph Damaszewicz, 52 ans, Jan Jankowski, 42 ans, Stanislas Kasjanowicsz, 28 ans, et Jean Lukawski, 20 ans) qui sont également pendus à Nîmes. Chaque corps est porteur d'une pancarte portant l'inscription : "Ainsi seront traités les terroristes français".
Au total, quinze ont été pendus (un à Saint-Hippolyte-du Fort et quatorze à Nîmes : sept route d'Uzès, six route de Montpellier, un route d'Arles). Cruauté suprême : les passants ont été contraints d'assister aux exécutions. Les corps devaient être exposés pendant 48 heures. Mais devant l'émotion de la population, le préfet Chiappe est intervenu pour abréger cette macabre exposition : le soir même, les corps étaient inhumés dans une fosse près de Jonquières-Saint-Vincent. Le 14 septembre, une équipe de prisonniers allemands procéda à l'exhumation des corps, inhumés ensuite dans le carré des militaires morts pour la France.
Le pendu "inconnu" (Kieffer) a été enterré à côté de "Marceau" à Saumane.
*La 9e division blindée SS "Hohenstaufen" était commandée par le général Wilhem Bittrich ; la compagnie de feldgendarmerie qui lui était rattachée sous les ordres du lieutenant Ernst Gutmann et le 20ème régiment de grenadiers sous les ordres du colonel Thomas Muller ont pris une part essentielle aux opérations et à la politique de terreur qui ont été menées dans ce secteur. En juin 1953, le tribunal militaire de Marseille juge Bittrich (membre des SS depuis 1932), commandant de la division" Das Reich" (Oradour sur Glane) puis de la division Hohenstaufen. Prisonnier de guerre, libéré par les Américains en 1947, arrêté à la demande de la France en janvier 1948, il est condamné à cinq ans de réclusion (et immédiatement libéré) ; Gutmann est condamné à 20 ans de travaux forcés et libéré au bout de quelques années !
Claude Emerique in CD-ROM La Résistance dans le Gard, AERI, 2009