Maurice Ripoche

Légende :

Maurice Ripoche, fondateur de Ceux de la Libération

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © SHD - Photothèque du Comité d'Histoire de la Deuxième Guerre Mondiale Droits réservés

Détails techniques :

Photographie analogique noir et blanc

Date document : sans date

Lieu : France

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Contexte historique

Maurice Ripoche est né le 27 mars 1895 à Paris. Il effectue ses études à l'Institut catholique des Arts et Métiers de Lille et les interrompt pour s'engager lorsqu'éclate la Première guerre mondiale. Il se trouve affecté dans une unité du Génie spécialisée dans les travaux souterrains de minage des tranchées ennemies. Il demande par la suite à rejoindre l'aviation naissante et devient pilote de chasse en 1917. Il recueille en août 1917, en mars et en mai 1918 trois citations.
Lorsque l'armistice survient, il est sous-lieutenant. Plus tard, le 20 décembre 1932, il recevra la Légion d'honneur en récompense des services rendus. Retourné à la vie civile, il reprend ses études et obtient son diplôme d'ingénieur. Il reprend la petite affaire commerciale de son père, spécialisée dans le matériel de boulangerie et met au point un type de four de cuisson pour la pâtisserie. Quelques années plus tard, vers 1930, avec des amis aviateurs, versés dans la construction des moteurs d'avions, il réalise un premier four industriel, à chauffage électrique, dont les résultats s'avèrent remarquables permettant une qualité métallurgique jusque-là impossible à obtenir. Une petite usine est créée, avec bureaux d'étude et de recherche, une usine qui, rapidement, prend une dimension importante. Il fabrique ainsi des aciers spéciaux indispensables aux fabrications de guerre, notamment dans le domaine de l'aéronautique.
En septembre 1939, bien que père de trois enfants, il souhaite revêtir à nouveau l'uniforme. En raison de l'importance stratégique de son entreprise, il est maintenu à la tête de son industrie qui doit se replier dans une usine annexe à Aubigny-sur-Nère, dans le Cher. Il est particulièrement affligé par la débâcle française. Maurice Daguier rapporte l'anecdote selon laquelle se rendant à Bourges en voiture avec l'un de ses cadres et apercevant un détachement allemand sur la route, il aurait brutalement accéléré dans sa direction. Dissuadé par son passager, il aurait alors pris conscience de la mission qui lui incombait désormais.
De retour à Paris, il organise une réunion, sans doute le 2 août 1940, avec deux amis, Pierre Beuchon et Chabrol, qui date les débuts du mouvement CDLL. Il prend par la suite contact avec plusieurs de ses amis, officiers aviateurs, officiers de chars, industriels, cadres supérieurs, chercheurs scientifiques pour constituer une organisation clandestine. Vers le mois d'octobre, Maurice Ripoche rédige un Manifeste, une proclamation dactylographiée qui va être diffusée. Ce texte apporte un éclairage essentiel sur l'inspiration profonde de l'engagement de Ripoche. Les valeurs qu'il fait apparaître sont celle d'une droite très conservatrice proche du Parti social français du colonel de la Rocque. Ripoche y balaie tout à tour les "politiciens bavards", les "Juifs sans patrie" ou encore les "financiers et gangsters internationaux". Il se proclame en faveur d'un "ordre nouveau français reposant sur l'autorité, l'ordre, la responsabilité, la compétence, le travail, l'honnêteté". Il réclame un "Etat fort", la suppression du suffrage universel et l'avènement d'une société corporatiste. Animé d'un très fort patriotisme, il rejette avant tout, et de toutes ses forces, la présence de l'occupant. Il appelle à la démoralisation de l'ennemi, au boycott de la presse de la zone occupée, à appliquer avec le moins de diligence possible les ordres donnés par les Allemands. Il rejette néanmoins les attentats contre les biens et les personnes car le moment n'est pas venu. Le mouvement est orienté vers la recherche de renseignement et la formation d'éléments destinés à passer à l'action en temps et en heure. Des contacts sont établis avec le SR Terre puis le SR Air domiciliés à Vichy. Son développement entraîne la multiplication des risques.
Le 9 octobre 1941, il manque de justesse d'être arrêté. D'après Maurice Daguier, ce jour-là, deux Allemands venus à l'entreprise, rue Ferrus (XIVe arrondissement) demandent à rencontrer Ripoche, absent. Averti à temps, celui-ci évite la rue d'Orléans (aujourd'hui avenue du Général Leclerc) où il réside : elle est barrée par les Allemands qui fouillent tous les riverains. Ripoche change de nom, devient "Dufour" et se rend à Lyon d'où il continue à diriger l'organisation par le biais d'adjoints restés à Paris, au premier rang desquels Georges Savourey. Sur place, il établit des rapports avec des dirigeants de Franc-Tireur et de Combat, ainsi qu'avec des émissaires de Londres. Il rencontre Pierre Brossolette et Jean Moulin. Traqué par la Gestapo, l'état-major de CDLL subit de lourdes pertes à Paris et Ripoche, devenu "Pons", prend le risque de regagner la capitale pour renouer les fils rompus, rassembler les éparpillés, reconstituer les cadres. En liaison avec Henri Manhès, Roger Coquoin et Gilbert Védy, il travaille à amplifier son action en liaison avec le secteur Sud.
Le 3 mars 1943, Ripoche et Vannier sont arrêtés à Paris, rue de Rome, dans le bureau du colonel Manhès ("Frédéric") qui, le matin même, avait été arrêté. Il est alors conduit à la Préfecture de Police. Interrogé par David, il est ensuite transféré au Dépôt et mis au secret. Deux tentatives de le faire évader échouent.
Le 11 avril 1943, il est transféré à Düsseldorf. Enfermé dans une étroite cellule, privé de nourriture, ne pouvant ni écrire, ni s'adonner à la lecture, il vit dans une complète solitude soutenu par sa seule foi et par son idéal inébranlable. Il comparaît devant le Tribunal du peuple qui le condamne à mort. Il est transféré à Cologne, à Rheinbach puis à Klingelfütz. Jeté dans la cellule des condamnés à mort, il est enchaîné jusqu'à son exécution. On lui refuse sa requête d'être traité en soldat et de mourir devant un peloton d'exécution. Il est décapité le 24 juillet 1944.
Le 20 mai 1944, il avait écrit une lettre à son aumônier qu'il remerciait de l'avoir épaulé dans son calvaire. Cette lettre est d'une grande ferveur. On peut y lire notamment : "Je fais le sacrifice de ma vie pour la renaissance chrétienne de ma Patrie mais aussi pour que l'Europe retrouve enfin le Christ qui est la seule voie de vérité et de vie." Au grand regret de ses compagnons de lutte ayant survécu, Maurice Ripoche ne s'est pas vu décerné l'Ordre de la Libération. Une rue du XIVe arrondissement parisien lui rend hommage.

Décorations :
Chevalier de la Légion d'honneur. Croix de Guerre 1914-1918.


Notice extraite du DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004

Auteur : Emmanuel Debono

Sources et bibliographie :

Archives nationales, 72 AJ 42 (Ceux de la Libération : témoignage écrit de Georges Savourey daté du 15 décembre 1945 ; témoignage de Chabrol recueilli le 9 décembre 1961 par M. Altman).
SHD Vincennes, dossier individuel de Maurice Ripoche.
Maurice Daguier, Les Cahiers de l'un des résistants de "Ceux de la Libération", non publié, 2e édition, mai 2002.
Jacques Ballet, "Maurice Ripoche (1895-1944)" in Icare, "Aviateurs et résistants", tome 3.