Le maire de Marignane dénonce de mauvais français,16 juillet 1941

Légende :

Lettre du maire de Marignane au sous-préfet d'Aix-en-Provence dénonçant l'agitation politique dans sa commune. 16 juillet 1941

Type : correspondance administrative

Producteur : MUREL PACA

Source : © archives départementales des Bouches-du-Rhône, 76 W 156 Droits réservés

Lieu : France - Provence-Alpes-Côte-d'Azur - Bouches-du-Rhône - Marseille

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Analyse média

Cette lettre du maire de Marignane (voire contexte historique) au sous-préfet d'Aix-en-Provence est à la fois la dénonciation d'opposants au régime du maréchal Pétain et une demande d'intervention des services préfectoraux « pour faire cesser toute agitation ». 

Dés le premier paragraphe, le maire de Marignane tient à marquer son obéissance aux instructions reçues du ministère de l'Intérieur pour célébrer le 14 juillet. Le déroulé des cérémonies gomme toute référence à la Révolution, honnie par le nouveau régime, et correspond davantage à la commémoration du 11 novembre puisque les hommages aux morts de la guerre occupent l'essentiel des manifestations publiques. Le maire tenait à associer très largement la population de Marignane. Il a obtenu un succès mitigé. Alors que les enfants des écoles publiques et le personnel  du commissariat spécial à l'aviation brillaient par leur absence, un groupe non désiré a déposé une gerbe au ruban provocateur  « Espoir ». Personne ne s'est trompé sur le sens politique de cette inscription d'autant que les porteurs de la gerbe étaient connus : élus de gauche de l'ancienne municipalité (voire contexte historique), percepteur franc-maçon( voire notices Marignane n'est pas un repaire de francs-maçons et le Progrès Social français dénonce des francs-maçons ).

Le maire, outré par la résistance passive des uns et l'audace des autres, appelle à une répression sans faiblesse des opposants réels ou supposés du régime : « Il serait temps d''intervenir vigoureusement pour faire cesser toute cette agitation et pour cela, il n'y aurait que le moyen radical à employer. »


Sylvie Orsoni

Contexte historique

La loi du 16 novembre 1940 portant réorganisation des corps municipaux permet au gouvernement de Vichy d'épurer les municipalités. Les conseils municipaux élus en 1935 sont dissous et le préfet nomme les membres des délégations municipales. A Marignane, les élections avaient porté à la mairie un conseil municipal de tendance Front populaire. A la suite du pacte-germano-soviétique les élus communistes avaient été déchus de leur mandat par la loi du 20 janvier 1940. Le préfet des Bouches-du-Rhône utilise  la loi du 16 novembre  pour remodeler définitivement les conseils municipaux en nommant des personnalités favorables au nouveau régime. Cela ne suffit pas à faire disparaître les oppositions.

Marignane est l'objet d'une surveillance particulière à cause de la présence de son aéroport . Le personnel d'Air-France et de l'aéroport de Marignane ainsi que de la  base aérienne de Salon est particulièrement surveillé et dénoncé. Les luttes politiques d'avant guerre étaient vives et entraînent des règlements de compte  (voire notice Marignane n'est pas un repaire de dangereux francs-maçons).  L'existence d'un groupe clandestin d'opposants obstinés ne semble pas totalement  une vue de l'esprit . Le percepteur cité par le maire en juillet 1941 était déjà l'objet d'une enquête comme franc-maçon  et socialiste en novembre 1940. Il apparaît à nouveau en décembre 1941 dans une dénonciation alors qu'il a déjà été  sanctionné par un déplacement à Alès( voire notice le Progrès Social français dénonce des francs-maçons).  


Sylvie Orsoni

Sources

Mencherini Robert, Vichy en Provence, Midi Rouge, ombres et lumières, tome 2. Paris, Syllepse, 2009.

Mencherini Robert, Résistance et Occupation (1940-1944). Midi Rouge, ombres et lumières, tome 3. Paris, Syllepse, 2011.

Paxton O. Robert, La France de Vichy. 1940-1944, éditions du Seuil, Paris, 1973.

Rémy Dominique, Les lois de Vichy. Actes dits « lois » de l'autorité de fait se prétendant « gouvernement de l'Etat français »,  éditionsRomillat, Paris, 1992.

Rossignol Dominique, Vichy et les francs-maçons. La liquidation des sociétés secrètes,1940-1944, Paris, JC Lattès, 1981.