Vierge de l’église Notre-Dame de Lourdes
Légende :
Bas-relief de la vierge sur le fronton de l’église Notre-Dame de Lourdes à Romans-sur-Isère.
Genre : Image
Type : Photographie
Producteur : cliché Alain Coustaury
Source : © Archives Alain Coustaury Droits réservés
Détails techniques :
Photographie argentique en couleur.
Date document : 2006
Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Drôme - Romans-sur-Isère
Analyse média
Le bas-relief de la Vierge est situé au-dessus de l’entrée principale de l’église. La dédicace est : « Notre-Dame, Romans vous remercie ». La question que l'observateur se pose est celle de savoir quel est l'événement qui a conduit à remercier la Vierge. Ce ne peut être comme pour des dizaines de paroisses drômoises qui ont érigé des statues de Vierge le fait de ne pas avoir subi de destructions pendant la guerre. Au moment de sa libération, en août 1944, des personnes ont été tuées, des immeubles ont été détruits.
Notre-Dame de Lourdes, construite après la loi de séparation de l'Église et de l'État de 1905, à la différence des autres églises romanaises, n'est pas propriété de la commune. Son entretien ne dépend pas des finances municipales.
Auteur : Alain Coustaury
Sources : Descombes Michel, Jacquot Laurent, L’église Notre-Dame de Lourdes, notice de la Sauvegarde du patrimoine romanais.
Contexte historique
La première pierre de l'église est posée et bénite par Mgr Pic, évêque de Valence-sur-Rhône, le 15 août 1937. Pendant toute l'année qui suit, le chanoine Pierre Prudhomme continue à collecter de l'argent auprès des familles romanaises pour en terminer la construction, sans oublier le financement des cloches et des vitraux.
Notre-Dame de Lourdes, est l'œuvre de l'architecte François Bérenger. Construite en béton armé, elle est de style « gothique-moderne », crée par Dom Paul Bellot (1876-1944). Elle a été construite par l'entreprise Molinari. Les statues sont de Georges Serra. Celle de la Vierge mesure 7m et est à 45 m au-dessus de la place Jean Jaurès. Le grand chemin de Croix et la décoration intérieure sont l'œuvre de Martin Ferrière.
Le dimanche 10 juillet 1938, l'évêque baptise les dix cloches.
Le 15 août 1938, jour de clôture du jubilé marial, une année après la pose de la première pierre, l'église reçoit la bénédiction épiscopale et s'ouvre aux croyants.
Le 10 mai 1940, l'armée allemande lance l'offensive qui perce le front français et déferle sur la France. Le 19 mai, la nouvelle église est consacrée. Le 31 mai, des Romanais choisissent de confier la garde de leur ville à Marie pour la protéger des troupes allemandes. Comme gage anticipé de reconnaissance, la paroisse de Notre-Dame de Lourdes et la ville promettent l'acquisition d'une nouvelle cloche pour l'église, « Marie Victoire », d'un poids de 850 kg, qui donnera le Fa.
Traduisant l’effondrement militaire français, l’Armistice est signé le 22 juin 1940, jour de l’entrée des troupes allemandes à Romans-sur-Isère.
La souscription paroissiale pour la réalisation de la cloche est achevée le 16 juillet. Dans les premiers jours du régime de Vichy, la cloche change de nom pour s'appeler Marie France. Sur sa dédicace, on peut lire « Je chante la pérennité de cette France, royaume de la Vierge Marie ».
Le 2 février 1941, « Fête mariale », Mgr Pic bénit la nouvelle cloche. À 14 h 30, l'évêque fait son entrée dans une église comble. La cloche est « habillée de blanc ». Elle est timbrée aux armes du maréchal Pétain : le bâton de commandement, constellé, portant une francisque et dressé entre 7 étoiles. Pour l'accueillir, ses 10 sœurs aînées n'ont pu donner leurs voix car le clavier qui les actionne a été détérioré par la tempête de neige de janvier. Mgr Pic utilise l'incident pour rappeler sa pensée : « Les cloches se réservent pour le jour certain (où) elles chanteront la victoire de la France. Victoire du redressement moral de la patrie, en voie de s'effectuer, en ces jours où selon le mot du Maréchal « l'esprit de jouissance a détruit ce que l'esprit de sacrifice avait édifié ». C'est par l'esprit de sacrifice, et non par ces faciles plaisirs, doublement déplacés, alors que tant de Français souffrent, nos prisonniers, plus que tous, c'est par l'esprit de sacrifice que se redressera la France ».
C'est pour ne pas avoir subi des dommages importants liés aux combats en juin 1940 qu'est réalisé le bas-relief de la Vierge avec sa dédicace.
En parallèle se poursuit le financement des vitraux. Les saintes et saints retenus soulignent les choix spirituels de l'époque vichyssoise. Se trouvent aussi représentés les visages de certains membres des familles romanaises donatrices. La francisque ornera un des vitraux. Même dissimulée, elle est encore visible.
L’exemple de l’édification et de la consécration de Notre-Dame de Lourdes de Romans-sur-Isère met bien en évidence, d’une part une forme de religiosité exacerbée par l’effondrement militaire de 1940 et, d’autre part, des liens entre la religion catholique et le régime de Vichy à ses débuts. Postérieurement, avec l’évolution du conflit, les relations se détériorèrent.
Auteur : Alain Coustaury
Sources : Descombes Michel, Jacquot Laurent, L’église Notre-Dame de Lourdes, notice de la Sauvegarde du patrimoine romanais.