Yves Lavoquer

Genre : Image

Source :

Lieu : France - Bretagne

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Contexte historique

Professeur de lettres à Saint-Brieuc où il est nommé en 1942, venant de Laval, muté d’office pour ses opinions politiques.
Né à Rennes le 3 Octobre 1911, membre de la S.F.I.O devient le secrétaire fédéral du Parti socialiste clandestin, siège au sein du CDL clandestin dès le début. Il est professeur au lycée Le Bras.
Il est chargé en Juillet 1943, par les responsables de Libération Nord d’organiser le mouvement dans le département des Côtes-du-Nord. Le comité se compose de Kérien, chef de division à la Préfecture, de Bescont, fonctionnaire des Impôts et Guennebaud, professeur également au lycée Le Bras.

« J’ai jeté les bases de l’Armée Secrète qui devait prendre par la suite la tête des F.F.I. J’ai été désigné par Ribière et Zararoff, lors d’un rendez-vous au Café d’Alençon à Paris. M’estimant trop jeune, j’ai sollicité Adolphe Vallée qui refusa le commandement mais accepta d’être l’adjoint de Tanguy-Prigent, chef régional de Libé -Nord. Après le 10 décembre 1943 . Vallée pris le commandement jusqu'à son arrestation le 14 Février 1944. J’avais quitté les Côtes du Nord lors de la rafle au Lycée Le Bras . ce jour là j’ai sauté par la fenêtre de ma classe et je me suis replié en Loire-Atlantique pour continuer mon activité clandestine. » Il récupère en Novembre 1943 des plans du terrain d’aviation de Ploufragan établis par Jules le Page, un réfractaire au S.T.O qui est embauché par l’entreprise Le Guillou qui a des contrats avec l’organisation Todt. Est chargé par l’Etat-Major national de l’A.S, notamment le général Audibert chargé de l’Ouest de la France de mettre sur pied les premiers groupes clandestins de l’Armée Secrète dans le département vers le milieu de l’année 1943. Il contacte plusieurs officiers de réserve dont Adolphe Vallée, l’abbé Chéruel, Jean Métairie à Saint-Brieuc, M. Branchoux à Guingamp. Finalement c’est M. Vallée qui est désigné comme commandant. Il se rend en novembre 1943 en Mayenne, accompagnant le général Audibert, chef de l’Armée Secrête, afin de prendre des contacts avec la résistance de ce département. Suite aux arrestations opérées au Lycée Le Braz, Yves Lavoquer doit se cacher plusieurs mois à partir de décembre 1943 pour échapper à l’arrestation. Il choisit Adolphe Vallée , industriel et officier de réserve pour lui succéder à la tête de l’A.S et qui sera arrêté quelques semaines plus tard. Le 25 Avril à Rennes une réunion des principaux responsables du comité de coordination de la résistance de l’Ouest a lieu. La Gestapo est au courant, le commandant Vallée et Henri Bourret sont arrêtés.

Yves Lavoquer, dont les activités de résistant sont découvertes fortuitement par des élèves-maîtres du lycée Le Bras, ouvrent sa serviette pendant une récréation en vue de voir les résultats d’une composition de français. Ils y découvrent un paquet de journaux du mouvement Libération-Nord... Yves Salaun, délégué des élèves, le contacte et le prie de prendre le commandement de leur groupe. Du fait de ses responsabilités dans la résistance, Yves Lavoquer est tenu à des règles de sécurité très stricte ; il décline cette proposition en invitant les lycéens à beaucoup de prudence et de vigilance. Il réussit à les dissuader d’un coup de main contre la prison de Saint-Brieuc afin de délivrer deux des leurs. Yves Lavoquer est convaincu qu’un tel projet est voué à l’échec compte-tenu du faible armement des lycéens et du risque que cette affaire tourne au massacre. Les lycéens, dont le chef est Yves Salaun accepte de suivre les conseils d’Yves Lavoquer. Lors du 11 Novembre 1943, les lycéens veulent marquer cette date symbolique et répondre à l’appel de la B.B.C qui invite les patriotes à se rendre en silence aux monuments aux morts. Le 11 Novembre la quasi totalité des lycéens font grève pendant un heure et se rendent au monument en traversant le Champ de Mars, Yves Lavoquer les passe en revue . Une minute de silence devant le monument au morts puis le groupe se disperse avant l’arrivée des allemands.( ) Yves Lavoquer ("Hervé" dans la clandestinité) assure la liaison avec Paris pour le Mouvement Libération et le Parti Socialiste et contribue à l’organisation de la Résistance en Loire-Inférieure (aujourd’hui Loire-Atlantique). Il revient dans les Côtes du Nord dès la Libération et retrouve sa place au sein du CDL au sein duquel il est plus particulièrement chargé de suivre le dossier de l’épuration politique et administrative.

Yves Lavoquer est mis en cause lors du Congrès National des CDL des 15 et 16 Décembre 1944 par les délégués de la Mayenne qui lui reprochent deux faits, d’une part d’être intervenu irrégulièrement en faveur de M. Couesnon de Laval qui faisait l’objet d’une mesure d’internement administratif. D’autre part d’avoir été vichyssois. M. Lavoquer, devant le CDL des Côtes-du-Nord indique avoir seulement fourni à l’avocat de M. Couesnon une déposition à décharge qu’en son âme et conscience il estimait devoir faire. Sur le deuxième point, Yves Lavoquer reconnaît avoir été chef d’un camp de jeunesse dans la Mayenne. A ce titre, il a dû recevoir la visite de M. Lamirand, délégué à la Jeunesse de Vichy. Il a refusé de faire un discours à l’occasion de cette réception, mais il a été dans l’obligation de faire chanter à ses élèves le chant « Maréchal, Nous voilà » . Il fait remarquer que sa situation de chef de camp, avec sous ses ordres deux instituteurs, l’un franc-maçon, l’autre de gauche, l’empêchait de se soustraire à l’obligation d’assister à l’entrevue de M. Lamirand. Il signale, d’autre part, qu’il n’a pas été chargé à l’époque du Cours d’Enseignement Général au lycée de Laval parce qu’il n’était pas considéré comme assez conformiste. Enfin il a dû, par la suite abandonner son poste et prendre le maquis. Le CDL reconnaît la part prise par M . Lavoquer dans la Résistance, mais regrette toutefois qu’il ait fait chanter à ses élèves l’hymne au Maréchal Pétain. Seul ce fait semble pouvoir être retenu contre M. Lavoquer. Yves Lavoquer devient à la Libération un des dirigeants de la fédération SFIO des Côtes-du-Nord, il signe de nombreux éditoriaux dans le journal Le Combat Social. Yves Lavoquer était par ailleurs franc-maçon, ce dont il ne se cachait pas.

Le C.D.L. désigne M. Lavoquer (Titulaire ) et M. Rocher (Suppléant) pour faire partie de la Commission Départementale de Vérification des Arrestations prévue par l’Ordonnance du 4 Octobre 1944 et qui remplace les commissions de criblage. Il eut à examiner des centaines de dossiers de personnes internées du fait de leur attitude réelle ou supposée durant l’occupation.

Yves Lavoquer est chargé en février 1945 du rapatriement des corps des lycéens de Le Braz fusillés au fort d’Ivry. Il déclare « Je les ai retrouvés, pour les reconnaître, dans l’habit qu’ils portaient en classe, le jour de leur arrestation. Quelle émotion ! Quel courage ont montré ces jeunes gens, arrêtés et torturés ! Jamais aucun ne m’a dénoncé. Je le sais par mes renseignements secrets. Je n’ai pas créé le mouvement de résistance des élèves du lycée. C’est lui qui s’est rallié à moi. Je n’aurais pas voulu embrigader des mineurs. » (...)

Témoignage de M. Lucien Le Guevel le 28 Janvier 2000 :
"J’ai rencontré le mouvement Libération Nord par le plus pur hasard. Ma mère tenait un hôtel à Saint-Brieuc le Celtic en bas du Boulevard Clémenceau. Ce lieu servait de boite à lettres pour les résistants qui y déposaient des tracts et des journaux clandestins. Pourtant l’hôtel était réquisitionné par les allemands qui y avaient installé un P.C avec un standard téléphonique. Il y avait une salle de restaurant réservée aux allemands qui bénéficiaient d’un ravitaillement spécial auquel nous bénéficions indirectement. J’était jeune à l’époque, 20 ans en 1944, j’ai rejoins ce mouvement par l’intermédiaire de Pierre Kahn. Les seules actions aux quelles j’ai participé pendant l’occupation consistaient à crever les pneus des véhicules allemands, à tourner les panneaux indicateurs pour que les allemands aient du mal à se diriger. Après la Libération j’ai été intégré dans un bataillon F.F.I à la caserne Charner et nous avons été dirigés vers le front de la Poche de Lorient. Aujourd’hui il ne reste plus que trois survivants de notre équipe... J’ai connu Lavoquer après la Libération. Il habitait rue des Promenades dans un petit studio. Il venait souvent prendre un pot au bar de l’hôtel Celtic. Il était toujours professeur au lycée Le Bras. Il s’agissait d’un homme qui s’intéressait plutôt à la politique, voire à sa carrière politique. Il aurait aimé être député et s’est trouvé en conflit plusieurs fois avec Antoine Mazier. Il s’agit d’un personnage controversé qui mariait le meilleur et une certaine réputation. Résistant, il fut, mais il s’attribua beaucoup plus de mérite que la réalité. Epicurien il aimait la bonne chère. Célibataire mais aussi séducteur..."''

M. Lavoquer annonce au début du mois de mars 1945 qu’il va fixer son domicile à Rennes, et demande au comité d’accepter sa démission de délégué près de la CVA. M. Rocher réclame un suppléant pour le remplacer de temps en temps.Le C.D.L accepte la démission de M. Lavoquer et délègue M. Moalic dans les fonctions de suppléant du C.D.L à la CVA. Yves Lavoquer siège en représentant du C.D.L des Côtes-du-Nord au comité régional de la presse à Rennes chargé d’autoriser la publication de nouveaux journaux issus de la résistance. Dans le cadre de la restructuration de la presse quotidienne bretonne, un cinquième journal est autorisé à paraître en avril 1945 et destiné à être le porte-parole des éléments de gauche. Les Radicaux et les Socialistes réussissent à se mettre d’accord et peuvent publier La République Sociale autorisé par décision ministérielle du 7 avril 1945. La majorité du Conseil d’administration était socialiste, le directeur de publication est Yves Lavoquer. Le Premier numéro paraît le 21 Avril avec un éditorial d’Yves Lavoquer indiquant « Politiquement, nous voulons être le porte-parole de toutes les forces de gauche de l’Ouest. Le Parti Socialise et le Parti Radical-Socialiste se sont uni pour créer ce journal. Le Parti communiste n’a pas voulu se joindre à nous parce qu’il désire fonder un journal à lui ; Malgré cela il garde notre sympathie. Nous nous présentons loyalement comme un journal politique, un journal de gauche, un journal de combat. Nous sommes franchement laïques et résolument républicains. » Le président Barré rend compte au CDL le 31 Août 1945 de la réunion du Comité Régional de Presse à laquelle il a assisté. Il signale que le comité a refusé la parution du journal de M. Gasnier-Duparc Le Saint-Malo Républicain, journal qui eut été à la solde de M. Le Ministre Diethelm, lequel est candidat à la Constituante et se présente dans la région de Saint-Malo. Ce même ministre aurait l’intention d’acheter le journal socialiste La République Sociale dont M. Lavoquer est le directeur. Si ce fait se produit M. Lavoquer ne pourra plus prendre position en faveur des socialistes ; M. Diethelm étant radical-socialiste. Le rédacteur en chef de la République Sociale, M. Pouchat est hostile à cette vente et menace si elle a lieu de fonder un journal communiste qui serait à la disposition de tous les partis de gauche. M. Lavoquer explique son attitude par le fait qu’il ne couvre pas ses frais et qu’il sera dans l’obligation s’il n’accepte pas cette vente de tout abandonner et de licencier son personnel.

Le journal de M. Lavoquer connu en effet dès le début des difficultés malgré le soutien que lui apportait le ministre Pierre-Henri Teitgen qui avait voulu que les gauches de Bretagne aient un journal. Il cessa de paraître en mars 1947.

Yves Lavoquer poursuit sa carrière de journaliste à Reims en 1948 dans un journal issu de la résistance également (ou socialiste). Il revient enseigner à Saint-Brieuc. Il décède à Saint-Cast Le Guilde en mai 1981 où il est enterré.


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