Henri Petit dit Romans

Légende :

Portrait d'Henri Petit dit "Romans" dédicacé à "Plutarque", pseudonyme de Maurice Morrier, chef du secteur C3 (Belley) de l'AS de l'Ain, puis du sous-groupement "Plutarque"

Genre : Image

Type : Portrait

Source : © Archives départementales de l'Ain, 234 J 1 Droits réservés

Détails techniques :

Photographie analogique en noir et blanc.

Date document : Sans date

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Ain

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Analyse média

La photographie de Romans-Petit comporte la dédicace suivante :
"A Plutarque qui lui n'a jamais menti à la réputation et fut un chef de secteur avisé, courageux et un ami très sûr."  

"Plutarque" est le pseudonyme de Maurice Morrier, ingénieur des Travaux publics, qui a organisé la Résistance dans tout le Valromey et le bassin de Belley, qui avait fait la connaissance d'Henri Romans-Petit en juin 1943.


Département AERI.

Contexte historique

Capitaine de réserve dans l'aviation en 1939, il est mobilisé dans le sud de la France, où il est affecté à Fréjus. Après l'Armistice, il commande les bases aériennes de Cannes et de Nice. Le jour de l'armistice, s'adressant aux hommes sous ses ordres, il leur dit : "Je suis sûr que beaucoup d'entre vous comprennent aujourd'hui le sens du mot : PATRIE. Non, la guerre n'est pas finie !" Refusant la défaite, il tente à plusieurs reprises de rejoindre Londres, sans succès.   

Démobilisé en août 1940, il retourne à Saint-Étienne où débute son activité de résistant (renseignements, parachutages) au sein du mouvement Espoir, créé en 1941 par Gaston Charron, alias "Jean Nocher", mouvement rattaché à Franc-Tireur. Henri Petit collabore aussi avec le réseau FFC (Forces françaises combattantes) Ali-Tyr.

Après le démembrement du réseau Espoir, Henri Petit, dont le pseudo est alors "Moulin", cherche de nouveaux contacts avec la Résistance. Il prospecte des terrains de parachutage pour le compte du BCRA (Bureau central de renseignement et d'action) et se préoccupe du sort des premiers réfractaires. A la fin de l'année 1942, il rencontre Marcel Démia d'Ambérieu-en-Bugey, un des pionniers de la Résistance dans l'Ain qui a déjà pris en charge des insoumis au régime de Vichy. Marcel Démia et Henri Petit partagent les mêmes idées de la Résistance. Marcel Démia l'introduit auprès des résistants locaux qui cherchent à s'organiser. C'est ainsi qu'Henri Petit crée à Montgriffon la première école de cadres et dès le printemps 1943 participe à la création des premiers camps du maquis avant d'en prendre le commandement durant l'été 1943 sous le pseudonyme de "Romans". Après l'arrestation de Bob Fornier, il devient également le chef de l'AS (Armée secrète) de l'Ain en septembre 1943.  

A la fin de l'année, alors que les effectifs paramilitaires de l'Ain (AS et Maquis) atteignent 2 000 hommes, il prend en main les forces clandestines et l'AS de Haute-Savoie, à la demande de l'état-major de R1, en remplacement du commandant Vallette d'Osia arrêté. Il y applique les mêmes principes que dans l'Ain : école de formation des cadres entrainés à la guérilla, aux coups de main brefs avec replis rapides et aux sabotages. Il est en liaison avec Londres par le biais de la mission "Musc" composée de Jean Rosenthal "Cantinier", chargé de l'inspection des maquis, et de Richard Heslop "Xavier" du SOE (Special Operations Executive) britannique ainsi que de l'Américain Denis Owen Johnson "Paul". Pour répondre au besoin de parachutages d'armes, il choisit le plateau des Glières près d'Annecy. Après avoir confié le commandement des Glières à Tom Morel, il regagne précipitamment l'Ain lors de la première grande attaque allemande de février 1944.  

Après l'exécution du commandant Jean Duhail, alias "Vallin", pendant l'attaque d'avril 1944, il prend également le commandement des maquis du Haut-Jura - Service Périclès. Il cumule alors les fonctions de chef de l'AS de l'Ain, chef des Maquis de l'Ain et du Haut-Jura - Service Périclès.   

En juin 1944, il commande les FFI de l'Ain et du Haut-Jura, et participe à la libération provisoire d'une partie du département de l'Ain et du Haut-Jura, autour des villes de Nantua et Oyonnax, territoire qu'il contribue à administrer durant près de six semaines tout en poursuivant sa mission armée. La puissante contre-offensive allemande de juillet 1944 l'oblige à reprendre le maquis à Giron où il établit son poste de commandement. De fin août à début septembre 1944, l'ensemble des forces FFI contribue aux côtés des Alliés à la libération définitive du département de l'Ain et du Haut-Jura. 

 Dans la ville de Bourg-en-Bresse, abandonnée sans combat par les troupes allemandes dans la nuit du 4 au 5 septembre, le colonel Romans-Petit arrive à la préfecture accompagné de Richard Heslop vers 8 heures. Le préfet Léon Blanchard nommé par le GPRF (Gouvernement provisoire de la République française) venu toutes affaires cessantes de Paris, et qui a pris ses fonctions à l'aube, l'accueille courtoisement mais lui signifie que sa présence n'est pas indispensable et qu'il peut rejoindre ses troupes. Le pouvoir politique a repris ses droits et le démontre avec fracas dans les semaines qui suivent.  

En effet, dans les jours qui suivent la Libération, l'opposition entre "Romans" et le CDL (Comité départemental de libération) éclate au grand jour lorsque "Romans" revenant de Londres est mis aux arrêts au Fort Lamothe à Lyon. Le CDL lui reproche d'avoir cumulé les pouvoirs en négligeant le pouvoir politique de l'Ain et d'avoir usurpé les fonctions de préfet lors de la constitution de la IVe république dans le Bugey. "Romans" reste sept semaines en prison au grand dam de "ses petits" qui ne comprennent pas cette injustice et menacent même de venir le libérer par la force s'il le faut. "Romans" est libéré sans jugement mais avec l'interdiction de revenir dans l'Ain, interdiction levée à la fin du mois de décembre 1944. "Xavier", son fidèle agent du SOE a été, lui, sommé de quitter l'Ain et de rentrer dans son pays.Cette "méchante affaire" ternit la joie de la Libération pour ceux qui ont combattu courageusement aux côtés de "Romans", chef charismatique et aimé par ses hommes.  

Le colonel Henri Romans-Petit qui garde son pseudonyme après-guerre, continue le combat pour la reconnaissance de la Résistance Intérieure. Il dirige en 1945 la Maison du Maquis à Paris, fonde en 1946 l'association AMA ainsi que La Voix du Maquis, bulletin trimestriel de liaison entre les anciens résistants et maquisards qui parait encore de nos jours. Il est également président de l'ANRA (Association nationale des Résistants de l'Air) et membre du Comité directeur de la Licra (Ligue contre le racisme). En 1964, suite à une scission au sein de l'AMA, il fonde Le Groupement des Amicales de Résistants de l'Ain et du Haut-Jura qui possède son propre bulletin de liaison Le Crêt de Chalam. Cette association s'est éteinte avec la mort de son dernier président, Noël Fillardet en 2008.   

Sur le plan professionnel, Henri Romans-Petit reprend son métier de publicitaire et crée la société d'import-export COMINOR. Il travaille également pour les sociétés SINTRA et SECRE qui construisent du matériel électronique.   

Candidat malheureux aux élections législatives en 1958 sous l'étiquette gaulliste de gauche, il donne des conférences à l'Ecole de Guerre au château de Vincennes, particulièrement sur la guérilla, participe à de nombreuses émissions radiophoniques et télévisuelles et publie plusieurs livres et articles sur les maquis de l'Ain et des Glières, notamment Les Obstinés, Editions Janicot, Lille, 1945; L'Appel de l'aventure, Editions Dorian, Saint-Etienne 1947;  Les Maquis de l'Ain, Hachette, Paris 1974

 Le colonel Henri Romans-Petit s'éteint le 1er novembre 1980 dans sa propriété de Ceignes, petit village proche du monument du Val d'Enfer près de Cerdon dans l'Ain. Ses obsèques se sont déroulées devant ce monument qu'il a contribué à faire construire et qui est l'un des plus hauts et des plus majestueux dédiés à la mémoire de la Résistance. Il est inhumé au cimetière d'Oyonnax près du monument aux Morts dit "Le Vieux François" au pied duquel il avait déposé le 11 novembre 1943 une croix de Lorraine avec l'inscription "Les Vainqueurs de demain à ceux de 14-18".

 Fait Compagnon de la Libération le 16 juin 1944, il est l'un des premiers résistants de l'Intérieur à recevoir cette haute distinction du général de Gaulle. Grand officier de la Légion d'honneur, il est aussi titulaire de la Distinguished Service Order décernée par le roi George VI d'Angleterre, et la Legion of Merit accordée par Harry Truman, président des USA. Il a également reçu de nombreuses autres décorations :   Croix de Guerre 14/18 ; Croix de Guerre 39/45 ; Médaille de la Résistance ; Officier de l'Ordre de Léopold (Belgique) ; Croix de Guerre (Belgique) ; Grand Officier du Nicham Iftikhar ; Commandeur de l'Ordre du Mérite (Congo).


D'après Claude Morel, ""Romans-Petit Henri "Tor", "Moulin" puis "Romans"", extrait du DVD-ROM La Résistance dans l'Ain et le Haut Jura, Département AERI de la Fondation de la Résistance, novembre 2013.