Plaque apposée sur la prison de Fresnes

Légende :

Plaque apposée sur la prison de Fresnes, en mémoire des milliers de patriotes internés, fusillés et/ou déportés, Val-de-Marne

Genre : Image

Type : Plaque

Source : © Wikimedia Commons Libre de droits

Détails techniques :

Photographies numériques en couleur (voir album).

Date document : 2011

Lieu : France - Ile-de-France - Val-de-Marne - Fresnes

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Contexte historique

Au moment de la guerre, Fresnes occupe une place à part au sein de l'Administration pénitentiaire : c'est la plus grande, la plus moderne, la plus prestigieuse des grandes prisons françaises. Pendant l'Occupation, l'établissement prend une dimension nouvelle, hautement symbolique, avec la présence dans ses murs de grandes figures de la Résistance : le lieutenant de vaisseau d'Estienne d'Orves, le général Delestraint, Edmond Michelet, Pierre Brossolette, Missak Manouchian, Geneviève Anthonioz-de Gaulle… et bien d'autres encore, connus ou inconnus, communistes ou gaullistes... Pour tous ces détenus, Fresnes n'est qu'une étape, ils doivent y séjourner quelques mois seulement, le temps de l'instruction de leur affaire, puis la plupart partiront en Allemagne (Buchenwald, Ravensbrück…) ou seront conduits devant un peloton d'exécution au Mont-Valérien. C'est dire si ce haut lieu de mémoire qu'est Fresnes est chargé d'émotion, comme l'a écrit R. Closset : "Pour les Français à l'époque de l'Occupation, cette prison désignait un lieu d'horreur, de larmes, de mort. On a dit qu'elle était "l'antichambre de la mort", la "filiale de l'Enfer"".

Les Allemands arrivent à l'établissement le 15 juin 1940, le lendemain de leur entrée à Paris. Ils viennent y chercher un jeune détenu, Herschel Grünspan qui a, en novembre 1938, abattu Von Rath, le conseiller d'ambassade allemand à Paris. Le meurtre avait déclenché un vaste pogrom en Allemagne dans la nuit du 9 au 10 novembre 1938 (Nuit de cristal). Mais Grünspan n'est plus à Fresnes : devant l'avancée ennemie, il a été évacué quelques jours auparavant dans le sud de la France. A défaut de Grünspan, les Allemands exigent la libération de détenus arrêtés pour "propos défaitistes" ou pour "propagande communiste". Au total , 320 hommes et 93 femmes sont libérés du 17 juin au 9 juillet, soit 17% de l'effectif pénal total de la prison. Acte éminemment politique : en libérant les Communistes, les Allemands cherchent à se concilier les classes populaires, nombreuses et influentes dans le pays. Les ingérences allemandes continuent avec la libération de détenus de droit commun : de juillet à octobre 1940, vingt-deux truands sont élargis à la demande des Autorités allemandes. C'est Henri Chamberlin dit Lafont, un petit escroc multirécidiviste, libéré de la Santé, et qui s'est mis au service des Allemands, qui vient en personne à Fresnes en compagnie d'un officier allemand pour faire libérer d'anciens comparses : ils constitueront les futurs cadres de la sinistre Gestapo française de la rue Lauriston à Paris chargée de traquer les Résistants.

La mainmise allemande sur la prison est quasi totale à partir de 1943. Jusqu'alors, deux quartiers de détention coexistaient, un quartier français pour les détenus relevant de la Justice française et un quartier allemand pour ceux relevant de la Justice allemande. Mais avec la répression qui s'intensifie au fil des années, les Allemands ont besoin de toujours plus de place. Aussi finissent-ils par réquisitionner la totalité du quartier français qui disparaît. Ils exigent aussi que les surveillants français, qui n'ont plus de détenus relevant des tribunaux français à garder, surveillent désormais une partie des détenus relevant de la Justice allemande. Ces détenus sont appelés, dans les registres de la prison, "détenus AA"  (Autorités Allemandes). Ce sont pour l'essentiel des détenus politiques. Le plus souvent les surveillants français se montrent bienveillants à leur égard, appliquant le règlement sans zèle excessif. Un petit nombre accepte même de faire sortir des messages, des lettres à destination des familles ou d'introduire du courrier clandestin dans l'établissement, mais il ne s'agit pas toujours d'actes désintéressés.

C'est le 24 août 1944 que la prison de Fresnes est libérée par les hommes du Groupement Billotte de l'armée Leclerc. Comme 1.800 détenus ont été déportés en Allemagne une semaine auparavant devant l'avancée des troupes alliées, il ne reste plus qu'une dizaine de détenus, qui recouvrent alors la liberté. Une page se tourne, la légalité républicaine est rétablie à Fresnes.


Patrice Périllat-Mercerot in DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004