Stèle à la mémoire de M. Laurent, R. Degert et C. Guy
Légende :
Stèle située au 107 rue Maurice Arnoux à Montrouge en hommage à Marcel Laurent, 23 ans, Robert Degert, 21 ans, et Claude Guy, 20 ans, fusillés le 1er août 1944 (et non le 31 juillet comme mentionné sur l'inscription). Elle a été apposée par le comité local de libération le 1er novembre 1944.
Genre : Image
Type : Stèle
Producteur : Claude Richard
Source : © Collection Claude Richard Droits réservés
Détails techniques :
Photographie numérique en couleur
Lieu : France - Ile-de-France - Hauts-de-Seine - Montrouge
Contexte historique
Le 1er août 1944, trois jeunes résistants sont exécutés par les Allemands devant le 107 rue Maurice Arnoux à Montrouge (Seine-et-Oise, Hauts-de-Seine).
Né le 13 septembre 1921 à Paris XVe arr. (Seine), serrurier, Marcel Laurent demeurait depuis mars 1942 16, rue de Champagne à Vitry-sur-Seine (Seine, Val-de-Marne). En mars 1943, craignant d’être requis pour travailler en Allemagne. Il partit à Brest où il travailla pour l’organisation Todt jusqu’à la mi-juin 1943. Il redoutait la réquisition, fit un aller et retour de Vitry-sur-Seine, puis loua ses bras dans une ferme du Morbihan, il fit connaissance avec Jean Ollivier et Robert Degert. En raison de sa situation de réfractaire, il revint. À Paris, Marcel Laurent eut au cours du mois de février 1944, plusieurs contacts avec Jean Ollivier et plusieurs de ses compagnons. Il eut la proposition de travailler à temps plein pour l’organisation à raison de deux mille cinq cents francs par mois, plus deux cent francs par enfant. Il était désormais membre du bataillon Vengeance des FTP (région P 6).
Né le 14 février 1923 à Paris XIVe (Seine), Robert Degert, courtier en assurances, chez sa mère Gabrielle, née Lavallée 7, avenue de la République à Ivry-sur-Seine (Seine, Val-de-Marne). Il quitta son travail en mars 1943. Il partit à Brest en Bretagne où il travailla pour l’organisation Todt. Là, il fit la connaissance de Marcel Laurent, un Ivryen qu’il connaissait de vue, habitant à côté de chez lui. Ils travaillèrent dans plusieurs fermes du pays breton et rentrèrent en janvier 1944. À la fin février ou au début mars 1944, Robert Degert dit désormais Falot, entrait dans l’organisation en même temps que Marcel Laurent, tous les deux deviennent membre du bataillon Vengeance des FTP (région P 6). Marcel Laurent, chef de groupe transmettait les ordres.
Né le 28 janvier 1924 à Arnac-Pompadour (Corrèze), Claude Guy, célibataire, travaillait dans l’entreprise de son père, un industriel, qui dirigeait une entreprise de mécanique. La famille habitait 61, rue Parmentier à Ivry-sur-Seine (Seine, Val-de-Marne). Au début du mois de mai 1944, Claude Guy rencontra un ancien camarade de classe, Robert Degert. Celui-ci lui apprenait qu’il faisait partie d’une organisation de résistance luttant contre les Allemands. Il lui proposa d’y adhérer. Claude Guy accepta par patriotisme. Robert Degert lui affirma qu’il recevrait de quoi subvenir à ses besoins. Il ne fut pas question qu’il soit payé mensuellement. Marcel Laurent transmettait les directives, il lui demanda de ne parler de rien à ses parents et de prendre un pseudonyme, Claude Guy choisit Martin. Ce choix n’était peut-être pas un hasard, Claude Guy était catholique et Saint-Martin fut celui qui remit à un pauvre frigorifié la doublure de son manteau.
Le 26 juin 1944 à Montrouge, quatre membres du groupe croisèrent un militaire allemand dans une rue où il y avait peu de monde. Claude Guy et Marcel Laurent étaient sur le trottoir d’en face. Il était 15 heures 45, Robert Degert et Balan tirèrent, Frédérick Zavetzke, un sous-officier allemand membre d’une formation de chars de combat s’effondra, touché de deux balles dans la tête, une à l’abdomen et une à la main droite. Marcel Laurent ramassa l’arme, tous réussirent à prendre la fuite sans être inquiété. Un gardien d’une usine toute proche, aperçu un corps humain allongé, il pensa qu’une personne avait eu un malaise. Ayant constaté qu’il s’agissait d’un meurtre, il alerta des cheminots allemands. La Feldgendarmerie fut prévenue, les services de la police allemande confièrent l’enquête à la Brigade spéciale n° 2. La police municipale organisait régulièrement des contrôles d’identité dans les stations du métropolitain, particulièrement celles ayant plusieurs correspondances.
Ce 3 juillet 1944, à la station de métro Bastille, une dizaine de gardiens de la paix en civils, étaient dirigés par un inspecteur de la brigade spéciale n°2. Dans l’un des couloirs de correspondance, un policier demanda à Marcel Laurent : « Avez-vous vos papiers ? ». Il était adossé à la paroi du couloir, lisait un journal, il le lâcha, écarta son veston et sortit un pistolet automatique Mauser de 9 m/m. Le policier se jeta sur lui, un autre vint en renfort, puis d’autres. L’arme était chargée, une balle dans le canon. Dans sa serviette, les policiers trouvèrent une grenade Mills, dans le chargeur de l’arme, dix balles. Fouillé au corps, Marcel Laurent déclara : « Vous avez eu de la chance, j’aurais pu vous descendre tous les deux ». Il fut emmené au commissariat des Quinze-Vingt. Marcel Laurent fut livré à la Brigade spéciale n° 2. Une perquisition effectuée dans un local 1, avenue de Chanzy à Vitry-sur-Seine, permit aux policiers de découvrir : une mitraillette Sten, sept chargeurs, une grenade Mills, un pistolet automatique Savage calibre 7,65 m/m, un revolver à barillet, modèle Colt de calibre 12 m/m, un lot de cartouches de mitraillette de calibre 9 m/m, une matraque en caoutchouc, une fausse carte d’identité au nom de Marcel Tetiot avec le cachet de la préfecture du Morbihan et sa photographie, un carnet sur lequel étaient notés les frais de l’équipe.
Six policiers de la Brigade spéciale n° 2 arrêtèrent Robert Degert le 5 juillet 1944, au matin, alors qu’il était rue de Lancry, Paris Xe arr. en compagnie de Roger Salomon, employé à la SNCF. Salomon dit Rochard, était l’un des responsables aux appointements mensuels de trois mille francs. Robert Degert était porteur d’une fausse carte d’identité au nom de Robert Kerviles. Les policiers perquisitionnèrent son domicile, situé dans un hôtel meublé, 18, rue Raspail à Ivry-sur-Seine (Seine, Val-de-Marne). La chambre était louée sous sa fausse identité depuis le 3 juillet. Un pistolet automatique 7,65 m/m de marque Teuf-Teuf fut saisi. Robert Degert fut interrogé dans les locaux des brigades spéciales. Le même jour, quatre policiers de la brigade spéciale n° 2 interpellèrent Claude Guy, la perquisition chez ses parents, là où il habitait, n’apporta guère de preuves matérielles. Le couteau à cran d’arrêt saisi était un souvenir de guerre de son oncle. Le seul élément nouveau, concernait une mission qui lui fut confié par Roger Salomon, suivre un inspecteur de police qualifié de « tortionnaire » qui habitait Ivry-sur-Seine. Claude Guy ignorait le nom de ce policier, le repérage ne débuta pas.
Selon un rapport de la police, Marcel Laurent, Claude Guy et Robert Degert auraient été membres d’un groupe clandestin « Les Aiglons d’Ivry ». Outre Robert Degert et Claude Guy d’Ivry-sur-Seine, Marcel Laurent, de Vitry-sur-Seine, d’autres membres de l’organisation furent arrêtés : Georges Schlepp d’Argenteuil (Seine-et-Oise, Val-d’Oise) et Raymond Jozon de Puteaux (Seine, Hauts-de-Seine).
Incarcérés, mis à la disposition des Allemands, Marcel Laurent, Robert Degert et Claude Guy furent exécutés le 1er août 1944, à l'angle de la rue Fontenay et Marcel Sembat, à Montrouge, là où le sous-officier allemand avait été abattu. Une fiche était épinglée sur Robert Degert, elle portait ces mots : « Ici, j’ai tué un soldat allemand, voilà pourquoi j’ai été exécuté ». Le 2 août, plusieurs bouquets de fleurs furent déposés par des passants là où furent trouvés les trois corps. Une infirmière en tenue déposa une gerbe. Devant ces manifestations de sympathie à l’égard des trois résistants, la police municipale se déploya et invita les passants à circuler. À 17 heures, plusieurs personnes déposèrent une gerbe au Monument aux Morts de la ville, distant d’un kilomètre. Un ruban portait l’inscription : « Hommage aux fusillés de ce matin ».
Le 27 juillet 1945, le conseil municipal d’Ivry-sur-Seine décidait de donner à la rue de Gournay, le nom de Robert Degert et à la rue Nocard celui de Claude Guy. Le 30 juillet 1945, le conseil municipal attribua le nom de Robert Degert a une rue de Vitry-sur-Seine. Dans sa séance du 14 juin 1946, le conseil municipal de Vitry-sur-Seine décida de donner à la rue de Champagne où habitait le couple le nom de Marcel Laurent.
Daniel Grason pour le Maitron-en-ligne