La machine Enigma durant la campagne de 1940

Genre : Image

Type : Photographie

Source : © Archives fédérales allemandes (Deutsches Bundesarchiv) Libre de droits

Détails techniques :

Photographie analogique en noir et blanc

Lieu : France

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Analyse média

Cette photographie, prise en France en mai 1940, montre, au premier plan, la machine ENIGMA installée dans le véhicule de commandement du général Guderian (debout, avec ses jumelles). Un opérateur tape le message clair ; un second note le texte codé. Le message est ensuite expédié grâce à l'émetteur radio visible au centre. Chaque Panzerdivizion possédait un bataillon complet de transmissions chargé des communications radio et du traitement des messages ENIGMA.


Contexte historique

La reconnaissance internationale de la contribution polonaise capitale pour casser le chiffre de l'Enigma

En septembre 1939, les crypto analystes polonais qui ont cassé le chiffre de l'Enigma allemande parviennent à quitter la Pologne et à rejoindre la France via la Roumanie avec leur précieux savoir et matériel. Ils sont incorporés au PC Bruno, le centre français de cryptanalyse installé au château de Vignolles, près de Paris, où ils contribuent très largement, au cours des mois qui suivent, au décryptement de plusieurs milliers de messages Enigma, émanant pour la plupart de la Luftwaffe.

Quand la France est défaite, la plupart des crypto analystes polonais et quelques-uns de leurs collègues français sont regroupés au PC Cadix, qui s'installe en zone libre, au château de Fouzes près d'Uzès. Entre octobre 1940 et novembre 1942, plusieurs milliers de messages de l'occupant sont décryptés, et les informations transmises à Londres. Le 8 novembre 1942, les Allemands occupent la zone libre. La plupart des crypto analystes polonais rejoignent Londres et travaillent jusqu'à la fin de la guerre au sein d'une unité polonaise et britannique. L'organisation cryptologique britannique, la Government Code and Cypher School (GCCS) est installée dans un domaine, Bletchley Park, à moins de cent kilomètres de Londres. Les maîtres polonais trouvent là des élèves et des collègues qui sont " une extraordinaire concentration de matière grise ". " Il y avait là Alan Turing, véritable génie des mathématiques et précurseur dans le domaine des ordinateurs, Hugh Alexander et Harry Golombek, tous deux champions d'échecs, Roy Jenkins, futur chancelier de l'Echiquier et une pléiade d'universitaires appartenant à toutes les disciplines ". A bonne école, les as britanniques peuvent ainsi approfondir leur recherche sur l' "Enigma " qui, sans cela, avançait péniblement.

Le professeur F.H. Hinsley, qui est le seul historien à avoir eu accès à des documents à ce sujet, écrit que "le service de décryptement britannique, en 1939, avait peu d'espoir d'arriver à un résultat. La contribution polonaise est donc capitale jusqu'à la fin, permettant le démarrage du système "Ultra" à la fin de 1942. Certains spécialistes et historiens, tel l'Américain David Kahn, ou le professeur de l'Université de Bruxelles, Jean Stengers, tiennent à nuancer l'attribution au système britannique "Ultra" des succès du système de décryptement polonais "Enigma", qui donne "la base sur laquelle les Anglais, à leur tour, ont pu construire". Le professeur Jean Stengers enseigne et écrit en 1981 : "On mesure dès lors ce qu'a été le rôle, immense, de la Pologne. Celle-ci a certes été la grande vaincue du début de la guerre, mais elle avait, dans les années précédant le conflit, et secrètement, remporté sur l'Allemagne un succès scientifique qui allait, pour la suite de la guerre, avoir des effets décisifs. Son grand geste de juillet 1939, où elle partage tout avec ses amis de l'Occident, a été, a-t-on dit, le geste du guerrier passant le glaive à ses alliés avant de mourir. Ce glaive avait un poids qui allait aider à écraser son vainqueur".

Le capitaine, avancé au grade de général, Gustave Bertrand, organisateur méritant de la coopération franco-polono-britannique de décryptement, écrit dans ses mémoires intitulés Enigma : "En ce qui concerne les cryptographes polonais, il leur revient essentiellement tout le mérite et toute la gloire d'avoir fait aboutir à un résultat au sens technique cette incroyable aventure, et cela grâce à leur savoir et à leur persévérance, sans égales dans aucun pays du monde ". Explicitant son affirmation, le général Bertrand déclare au professeur Stengers, à la radio belge, en 1977 : "La possession seule des documents ne suffisait pas à la maîtrise du système ; il fallait du génie mathématique".


Alexandra Viatteau in DVD-ROM La Résistance polonaise en France, AERI, 2013