Plaque en hommage au militant communiste Félix Cadras
Légende :
Plaque en hommage au militant communiste Félix Cadras, l’un des principaux organisateurs et dirigeants du Parti communiste clandestin pendant l’Occupation, fusillé par les nazis au mont Valérien le 30 mai 1942, située 119, boulevard Davout, Paris XXe
Genre : Image
Type : Plaque
Source : © Wikimedia Commons Libre de droits
Détails techniques :
Photographie numérique en couleur.
Lieu : France - Ile-de-France - Paris - Paris
Contexte historique
Félix Cadras est né le 4 mars 1906 dans une famille d’ouvriers tullistes de Calais. Son père, lui aussi dessinateur industriel, était avant 1914 d’idées socialistes : il avait souscrit à la fondation de l’Humanité par Jean Jaurès (le journal sera toujours présent à la maison), mais non inscrit au Parti socialiste, il était, par anti-opportunisme, d’inspiration libertaire. Il fut tué, étant sergent, à la guerre en octobre 1915 ; sa veuve, ouvrière textile, éleva ses enfants, Félix et Georgette, dans des idées pacifistes et socialistes.
Félix Cadras fut élève à l’école primaire puis, pupille de la nation, à l’EPS de la place-de-la-République à Calais jusqu’à quatorze ans. Il s’inscrivit aux cours du soir de l’école d’arts décoratifs de Calais où il obtint le diplôme d’esquisseur (dessinateur) en dentelles. Il entra en apprentissage dès 1919 et travailla de 1923 à 1926 dans une petite entreprise (Beaugrand) avant de partir au service militaire. Il avait adhéré en 1924 à la Jeunesse communiste de Calais qui venait de se créer avec trois adhérents. Il effectua son service militaire comme maréchal des logis au 40e régiment d’artillerie à Châlons-sur-Marne. Il connut à son retour six mois de chômage pendant lesquels il milita peu, trop occupé à rechercher un emploi.
De 1928 à 1933, il travailla dans deux entreprises de Calais comme brodeur puis dessinateur avant de connaître de nouveau le chômage de 1933 à 1935. Il épousa Georgette Becquet qui était brodeuse à la machine et dont les parents étaient devenus concierges au théâtre municipal de Calais. Le père, qui avait auparavant été conducteur de camions, était trésorier du syndicat des communaux de Calais et adhérait à la SFIO. Au début de 1935, Cadras eut une petite fille.
Licencié en raison de son action politique, il connut souvent la misère. L’action militante de Cadras commença aux JC, essentiellement dans les campagnes antimilitaristes contre l’occupation de la Ruhr et la guerre du Maroc.
En novembre-décembre, Félix Cadras demanda son adhésion au Parti communiste et il reçut sa carte le 1er janvier 1932. Il devint rapidement secrétaire de cellule et d’une section du Secours rouge. Le chômage et les difficultés matérielles n’entamèrent en rien sa détermination et contribuèrent même à développer une sorte de rage de l’action. Pendant ces dures années, il lut énormément et se dota de solides bases théoriques. Réfléchissant plus particulièrement sur la crise de l’industrie de la dentelle, il en étudia les causes, proposa des solutions pour tenter de la surmonter et, en 1934, fit paraître les conclusions de sa longue recherche dans une brochure intitulée Union pour sauver Calais de la misère qui eut pour double effet de faire connaître Cadras à ses concitoyens et de le faire remarquer par les responsables régionaux du PC. Il fut immédiatement nommé rédacteur à l’Enchaîné, l’organe de presse communiste dans le Pas-de-Calais et le Nord, et devint l’un des secrétaires de la 1re Région du PC (qui correspondait aux départements du Pas-de-Calais et du Nord), fonction qu’il assuma pendant plusieurs années. Il participa à la conférence nationale d’Ivry en juin 1934. Le 1er mars 1935, il était devenu secrétaire régional du parti pour la région Nord. Les remarquables dons d’orateur de Cadras, le caractère méthodique de son intervention firent forte impression, l’intégrant de facto dans le groupe des responsables de la nouvelle génération de communistes dont Maurice Thorez avait besoin à la tête du PC. En 1936, Félix Cadras fut chargé de mettre en place une fédération départementale pour le Pas-de-Calais.
Au début de l’année 1937, il quitta Lens où il s’était établi afin d’assumer ses fonctions de secrétaire fédéral et s’installa à Arcueil (Seine, Val-de-Marne) où il suivit pendant six mois, de février à août, les cours de « l’Université ouvrière », école de formation du PC. Considéré par Fajon comme « le meilleur élève de l’école », il fut chargé au bout de quelques mois de la direction du travail politique quotidien du centre de formation d’Arcueil. Peu après sa nomination au comité central, Cadras fut appelé à Paris par Maurice Thorez auquel l’unissait une profonde amitié, et il fut dès lors chargé « d’importantes fonctions » au sein du comité central.
Mobilisé le 4 septembre 1939 en tant que sous-officier d’artillerie, il resta en garnison à Boulogne-sur-Mer jusqu’à l’invasion de mai 1940 au cours de laquelle son unité dut se replier sur Les Sables-d’Olonne (Vendée). Pour éviter d’être fait prisonnier par la Wehrmacht, il parcourut près de 400 kilomètres à pied. Démobilisé de fait, il chercha à renouer le contact avec les dirigeants du PC passés à la clandestinité. Avant la fin de l’année 1940, il parvint à établir de multiples liaisons en zone Sud et se chargea en particulier de l’édification des structures clandestines dans la région lyonnaise. Responsable de l’ensemble de la zone Sud avec Victor Michaut et Jean Chaintron, il fut appelé à Paris au début de l’année 1941 auprès de Jacques Duclos pour reprendre au sein de la direction clandestine du PC les fonctions qui étaient les siennes jusqu’à la déclaration de guerre. Secrétaire à l’organisation, en rapport étroit avec Jacques Duclos et Benoît Frachon, Félix Cadras fut chargé d’une tâche essentielle, la liaison entre les différentes unités de l’appareil du Parti (inter-régions, régions) en mettant sur pied des groupes d’imprimeries, des dépôts de matériel, des chaînes de diffusion. Ce fut lui qui orienta, en 1941, les premières grandes actions auxquelles prit part le PC clandestin, que ce soient les premières manifestations de rue à Paris ou la grève des mineurs du Nord-Pas-de-Calais. Traqué par toutes les polices, il parvint cependant à sillonner la région parisienne pour participer aux premières réunions qui devaient aboutir à la constitution du « Front national ». En fournissant les moyens matériels nécessaires aux groupes d’action et de sabotage, il fut l’un des créateurs des unités qui allaient par la suite devenir les Francs Tireurs et Partisans.
Mais cette intense activité fut brutalement interrompue. Le 15 février 1942, une brigade spéciale de la police française arrêtait dans un petit appartement au 119 boulevard Davout, dans le XXe arrondissement de Paris, un homme que ses voisins connaissaient sous le nom de "Georges Dauvergne" et qui n’était autre que Félix Cadras. L’importance du personnage, connue par la police vichyste, se traduisit par une longue série d’interrogatoires destinés à obtenir les identités véritables des dirigeants du PC clandestin, dont Cadras connaissait de surcroît certains des domiciles. Il se pourrait que le ministre de l’Intérieur de l’État français, Pucheu, ait assisté à certains de ces interrogatoires. Ayant échoué dans leurs tentatives pour faire parler Félix Cadras, les policiers français le livrèrent à leurs homologues tortionnaires de la Gestapo qui lui firent subir de nouveaux sévices, sans plus de résultat en raison du courage et de la résistance extrêmes de l’homme.
Condamné à la peine de mort après un simulacre de procès, il fut incarcéré à la prison de la Santé, puis dans les quartiers de haute-sécurité de Fresnes où il fut placé seul dans une cellule, menottes aux poignets, enchaîné jour et nuit. Le 30 mai 1942, Félix Cadras, entouré de plusieurs autres militants, fut fusillé par des soldats nazis dans les fossés du fort du Mont-Valérien ; ils chantaient la Marseillaise.
Félix Cadras a été fait chevalier de la Légion d’honneur, à titre posthume, par un décret paru au Journal Officiel du 17 janvier 1961.
AUTEUR : D'après Yves Le Maner pour le Dictionnaire MAITRON.
SOURCES : Arch. Nat. F7/13084. — Arch. Dép. Pas-de-Calais, M 182, M 5099 et M 5221. — RGASPI, Moscou, 495 270 1776 : autobiographies du 20 juillet 1935 et du 13 décembre 1937 (consultées par Claude Pennetier, reportées par René Lemarquis). — Brochure éditée par la municipalité de Calais le 9 septembre 1973 à l’occasion de l’inauguration de l’école Félix Cadras. — Cahiers Maurice Thorez, n° 27, mai-juillet 1972. — J.-M. Fossier, Zone Interdite, op. cit. — J. Duclos, Mémoires, op. cit. — Ét. Fajon, Ma vie s’appelle liberté. — Renseignements fournis par la mairie de Calais.