Fiche pénale de Stéphane Fuchs, maison centrale d'Eysses
Légende :
Cette fiche constitue le premier élément du dossier pénitentiaire de Stéphane Fuchs ; elle a été établie lors de son arrivée à la maison centrale d'Eysses.
Genre : Image
Type : Fiche pénale
Source : © Archives départementales de Lot-et-Garonne, 940W56 Droits réservés
Détails techniques :
Fiche préimprimée et manuscrite
Date document : 16 octobre 1943
Lieu : France - Nouvelle-Aquitaine (Aquitaine) - Lot-et-Garonne - Villeneuve-sur-Lot
Analyse média
Cette fiche pénale retrace le parcours judiciaire et pénitentiaire de la personne incarcérée, ici Stéphane Fuchs. Outre les renseignements d'état-civil et la domiciliation, elle énumère les éléments suivants :
Condamné le 10 mars 1942 par la section spéciale près la cour d'appel d'Aix à 3 ans de prison pour atteinte à la sûreté extérieure de l'Etat.
Date d'entrée dans la maison [Eysses] : 16 octobre 1943
Date du commencement de la peine : 18 décembre 1941
Date de libération [prévisionnelle] : 18 décembre 1944
Dans les renseignements divers, figure la mention de rejet d'une demande de liberté conditionelle par décision ministérielle en date du 7 décembre 1943 et un recours en grâce rejeté le 6 mai 1944.
Fabrice Bourrée
Contexte historique
Né le 1er octobre 1906 à Lagny-sur-Marne (Seine-et-Marne), Stéphane Fuchs est issu d’une famille aisée d’origine alsacienne et protestante, apparentée à la famille Boegner. Stéphane choisit, comme son père, d’épouser la carrière médicale et sa formation intellectuelle doit beaucoup au pasteur Boegner, ainsi qu’à son frère, André, pasteur à Strasbourg. Marié et père d’un enfant, externe aux hôpitaux de Paris de 1928 à 1932, il exerce durant cette période successivement dans plusieurs hôpitaux : Saint-Antoine (1928), La Rochefoucauld (1929), Charité puis Enfants malades (1930), Laennec (1931), Saint-Louis (1931 et 1932). Il soutient sa thèse et obtient son diplôme de docteur en médecine le 7 juillet 1932. Il est également diplômé en biologie.
Mobilisé le 12 septembre 1939 à l’ambulance médicale d’armée n°93 de Marseille, il est ensuite transféré comme médecin-lieutenant au 6e régiment de tirailleurs marocains le 11 janvier 1940. Démobilisé le 5 septembre 1940 à Bourg, il rejoint la Résistance dès la fin de l’année 1940. Officier des FFL, il s’engage comme agent de renseignement au sein du réseau franco-polonais F2 sous le pseudonyme « Gynécologue ».
Ses activités clandestines le conduisent alors à Nice où il est arrêté le 22 décembre 1941. Jugé par la section spéciale de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, il est condamné à trois ans de prison le 10 mars 1942. Il arrive à Eysses le 15 octobre 1943 après avoir été incarcéré à Aix , au fort Monluc à Lyon puis à Nîmes.
A Eysses, une organisation se met en place au sein des internés. Le directeur de la prison accepte de rencontrer régulièrement les deux délégués désignés par les détenus politiques : Stéphane Fuchs et Henri Auzias. Ceux-ci lui présentent les doléances des détenus. Auzias et Fuchs s'imposent alors comme les leaders du collectif d'Eysses. Après la tentative d’insurrection collective du 19 février 1944, Stéphane Fuchs est retenu comme otage au quartier cellulaire de la centrale. De tendance gaulliste, il théorise l'esprit de résistance qui l'anime dans un texte qu’il écrit alors qu’il est détenu au quartier cellulaire d’Eysses, intitulé "perdons-nous notre temps en prison ?".
Le 30 mai 1944, il est livré aux Allemands avec ses co-détenus puis déporté le 2 juillet 1944 de Compiègne à Dachau dans le convoi dit « train de la mort ». Au moment du départ pour l'Allemagne, les anciens d'Eysses parviennent à rester groupés (une trentaine dans un wagon, une vingtaine dans un autre). Ils organisent la répartition des vivres et de l'eau, se préoccupent de l'hygiène, grâce notamment à l'autorité des deux médecins du groupe, Paul Weil et Stéphane Fuchs. Les deux hommes réussissent à imposer la discipline entre les déportés. La solidarité entre les Eyssois a sans nul doute joué et elle explique, en partie, une relative sous-mortalité à l'intérieur de ce groupe. Arrivé à Dachau le 5 juillet 1944, Stéphane Fuchs est transféré à Natzweiler le 22 juillet 1944 puis dans les camps du Neckar où il restera jusqu’en mai 1945.
Il a été homologué chargé de mission de 3e classe avec le grade de sous-lieutenant au titre du réseau F2. A son retour de déportation, Stéphane Fuchs devient le premier président de l’amicale des anciens d’Eysses. Spécialisé dans la médecine du Travail et l’hygiène industrielle, il devient expert et chargé de mission au Bureau international du Travail à Genève. Décédé le 4 octobre 1970 à Paris, il fut incinéré au crématorium du cimetière du Père-Lachaise.
Auteur : Fabrice Bourrée
Sources : Assistance publique hôpitaux de Paris : fiche de scolarité
Service historique de la Défense, dossier individuel d’officier (médecin lieutenant)
Bureau des archives des victimes des conflits contemporains
Archives départementales Bouches du Rhône : arrêt condamnant Stéphane Fuchs
Archives départementales Lot-et-Garonne : registre d’écrou et dossier individuel de détention
SIR Arolsen
FNDIRP
Archives de l’Association nationale pour la mémoire des résistants et patriotes emprisonnés à Eysses