Wilhelm Keitel signant la capitulation sans condition de la Wehrmacht

Légende :

Wilhelm Keitel signant la capitulation sans condition de la Wehrmacht au quartier général de l'Union Sovietique à Karlshorst, Berlin.

Genre : Image

Type : Photographie

Producteur : Lt. Moore (US Army)

Source : © National Archives and Records Administration, Washington Libre de droits

Détails techniques :

Photographie analogique en noir et blanc

Date document : 8 mai 1945

Lieu : Allemagne

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Contexte historique

Chaque année, les journalistes, et parfois même des hommes politiques parlent de « l’Armistice du 8 mai 1945 ». Or, non seulement il n’y a pas eu « armistice », mais la date elle-même est ambiguë. Pourquoi ?

Le 24 janvier 1943, à Casablanca, Roosevelt et Churchill se mettent d’accord pour exiger de l’Allemagne nazie une capitulation sans condition, sans possibilité de discussion, jusqu’à la destruction totale des forces militaires du Reich. Il s’agit simplement d’éviter un armistice (simple suspension des combats pendant des négociations aboutissant à un traité de paix) comme en 1918, afin de ne pas fournir aux Allemands des arguments pour nier leur défaite.

Dans les derniers combats d’avril-mai 1945, les troupes allemandes d’Italie du Nord capitulent le 29 avril ( entrée en vigueur le 2 mai ) devant les seuls Anglo-Américains. La fureur de Staline éclate alors car il craint que les dernières troupes allemandes n’essaient de se rendre aux occidentaux et que ceux-ci en profitent pour pousser leur avantage territorial en Allemagne. Il rappelle alors les projets d’acte de capitulation unique, et Einsenhower joue totalement le jeu et refusant des capitulations séparées, notamment le projet envoyé par Himmler aux Alliés occidentaux par l’intermédiaire de la Suède.

Le 5 mai 1945, l’amiral von Friedeburg, nouveau chef de la marine de guerre allemande, arrive à Reims, où est installé le quartier général d’Eisenhower et du SHAEF (Supreme Headquarter Allied Expeditionnary Forces). Il commence à discuter avec le général Bedell-Smith, chef d’état-major d’Eisenhower. Les discussions achoppent sur plusieurs points, notamment le principe d’une reddition simultanée de toutes les forces allemandes à l’endroit où elles se trouvent alors. Le 6 mai, le général Jodl, chef d’état-major allemand, arrive à son tour à Reims. Le 7 mai, en pleine nuit, à 2h41 du matin, les Allemands acceptent la capitulation et signent l’acte. Ils ont obtenu une seule concession : les hostilités doivent cesser le 8 mai à 23h01 sur tous les fronts, ce qui leur laisse le temps d’évacuer certaines troupes vers l’Ouest afin qu’elles ne tombent pas prisonnières des Soviétiques mais des Anglo-Américains. C’est la fin de la guerre en Europe.

Mais Staline entend bien qu’une autre signature de capitulation soit organisée à Berlin, « d’où est partie l’agression fasciste ». Il faut aussi qu’un général soviétique plus prestigieux que Susloparoff, signataire à Reims, entérine la décision. Ce sera Joukov. Pour la cérémonie de Berlin, Eisenhower envoie son adjoint le maréchal de l’air Tedder, les généraux Spaatz, Strong, Bull, et l’amiral Burrough. Coté français, le général de Lattre de Tassigny remplace le général Sevez, signataire à Reims à titre de témoin seulement. La délégation allemande est dirigée par le maréchal Keitel. Selon des témoignages, qui divergent sur le point de l’horaire, la signature a lieu entre 23h15 et 0h45. cela signifie que la deuxième cérémonie de signature voulue par Staline se termine le 9 mai. Les soviétiques, qui n’avaient pas parlé de la signature de Reims, alors que les Alliés l’avaient annoncée, attendent jusqu’9 mai à 2 heures du matin avant de rendre publique la capitulation. Ni le 7 mai ( jugé par les Soviétiques comme une manifestation trop « occidentale » ), ni le 9 mai ( considéré par les Occidentaux comme sous influence soviétique ) ne faisant l’unanimité, c’est la date médiane, au vrai peu significative, qui a pourtant été retenue au titre de la commémoration. Ces avatars de date et d’heure montrent, à tout le moins que la guerre froide existe déjà en germe dès la fin du second conflit mondial.


François Cochet, 40 thèmes pour comprendre la Seconde Guerre mondiale, Jeunes Editions Studyrama, 2001
Maurice Vaisse ( sous-dir. ), 8 mai 1945, la victoire en Europe, Editions de la manufacture, Lyon, 1985, Réédition, Editions Complexe, Bruxelles, 1994