Jean-Paul Le Chanois
Légende :
Carte d'identité professionnelle de Jean-Paul Le Chanois
Genre : Image
Type : Carte professionnelle
Source : © Musée de la Résistance nationale, Champigny-sur-Marne Droits réservés
Date document : sans date
Lieu : France - Ile-de-France - Paris - Paris
Contexte historique
Jean-Paul Le Chanois, de son vrai nom Dreyfus, est né le 25 octobre 1909 à Paris d'une mère catholique irlandaise et d'un père de confession juive.
Licencié en droit et en philosophie, il poursuit un temps des études de médecine qu'il abandonne pour exercer divers petits métiers : marin, manoeuvre, ouvrier typographe. En 1930, il entre à La Revue du Cinéma puis joue dans les films de la société Pathé avant de devenir attaché de direction de la société. Il quitte son poste et travaille comme assistant aux côtés de Julien Duvivier, Alexandre Korda, Maurice Tourneur et Jean Renoir avant d'exercer le métier de monteur. Dans les années Trente, il est l'un des animateurs du Groupe Octobre, groupe artistique lié au Front populaire. En 1933, il adhère au Parti communiste.
Jean-Paul Le Chanois réalise ses premiers films avant la guerre (Le Temps des cerises en 1936 et L'Irrésistible rebelle en 1940) mais se voit très tôt obligé d'interrompre ses activités. En tant que cinéaste d'origine juive, bien que titulaire d'un certificat de "non-appartenance à la race juive", le Comité d'organisation de l'industrie cinématographique, organisme créé par le gouvernement de Vichy en décembre 1940, lui refusa l'obtention d'une carte professionnelle d'assistant-réalisateur et de chef monteur. Il dut alors pratiquer clandestinement sa profession en devant le "nègre" de Jean Aurenche en écrivant le scénario de Huit hommes dans un château.
En décembre 1940, il rejoint les rangs de la Résistance en fondant le "Réseau de défense du cinéma" aux côtés de Nicolas Hayer (chef opérateur), Jacques Lemare (cadreur), Etienne Laroche (assistant opérateur), Max Douy (décorateur), Marc Maurette (assistant réalisateur), René Houdet (ouvrier électricien) et Jean Painlevé (réalisateur). Ce dernier appartenait aussi au groupe du Musée de l'Homme. Les réunions du Réseau de défense du cinéma se faisait généralement au domicile de Max Douy, rue des Bourdonnais. Le Réseau se spécialisa en premier lieu dans la propagande et le renseignement à usage interne. Les tracts étaient en effet avant tout destinés aux membres de la profession.
En 1942, Jean Aurenche , qui était entrée à la firme allemande Continental lui proposa de travailler sur le scénario de La Main du diable. Le Chanois accepta et fut intégré officiellement dans l'équipe de scénaristes de la Continental. Mais au début de 1943, une dénonciation l'obligea à interrompre ses activités et à entrer dans une totale clandestinité. Ce passage à la Continental lui valut à la Libération des reproches parfois virulents. A partir de 1943, le Réseau de défense du cinéma reçut l'ordre de préparer activement la mobilisation de la profession. Le Chanois fut alors chargé par la CGT de reconstituer clandestinement les syndicats du cinéma. Malgré la rivalité qui l'opposait à la section cinéma du Front national dirigée par René Blech, les deux organismes fusionnèrent en 1944 pour former le Comité de libération du cinéma français (CLCF).
En juin 1944, un opérateur du CLCF, Félix Forestier, est envoyé dans le Vercors pour y filmer la vie des maquisards. Le plateau de Vercors ayant été attaqué par les Allemands le 21 juillet 1944, les maquisards furent contraints de se replier. Forestier cache alors ses bobines dans un couvent franciscain. Celles-ci furent récupérées après la Libération. Chargé entre-temps de la réalisation du projet, Le Chanois retourna dans le Vercors pour compléter le film à l'aide de reconstitutions. C'est durant son séjour dans le Vercors que Pierre Blanchar fut élu président du CLCF.
Après la guerre, Le Chanois écrit quelques scénarios et dialogues pour d'autres cinéastes avant de réaliser en 1945 Messieurs Ludovic. En 1948, L'Ecole buissonnière (Grand Prix du festival de Knokke-le-Zoute), révèle un auteur complet et généreux. Après La Belle que voilà (1949), il allie le populisme traditionnel du cinéma français au néoréalisme italien d'après-guerre avec Sans laisser d'adresse (1950, Ours d'or au festival de Berlin en 1951) et retrouve le ton chaleureux qui a fait son succès.
Jean-Paul Le Chanois se tourne ensuite vers un cinéma moins élaboré, exploitant une veine souriante et comique. C'est en 1953, Le Village magique avec Robert Lamoureux et Lucia Bose, et en 1954, son plus grand succès, Papa, maman, la bonne et moi, une comédie de moeurs sur la famille française type.
Cinéaste engagé, ses films portent un regard sur les avatars contemporains : la crise du logement pour Papa, maman, la bonne et moi, l'accouchement sans douleur pour Le Cas du docteur Laurent (1956) ou l'éducation permissive des enfants avec Par-dessus le mur (1960).
Si sa mise en scène semble parfois convenue, Jean-Paul Le Chanois révèle des talents de conteur notamment dans Les Misérables (1958), une des productions les plus coûteuses du cinéma français, avec Jean Gabin dans le rôle de Jean Valjean, Bourvil dans celui de Thénardier et Bernard Blier en inspecteur Javert. En 1964 et 1966 il réalise encore deux films avec Jean Gabin, devenu son acteur fétiche, Monsieur et Le Jardinier d'Argenteuil, avant de mettre un terme à sa carrière cinématographique.
Le Chanois a également écrit quelques chansons pour Edith Piaf et Yves Montand et a mis en scène au théâtre plusieurs pièces dont Phèdre et Don Quichotte.
En 1972, il est élu vice président du syndicat des auteurs et des compositeurs français.
En 1984, il rédige un nouveau carton d'introduction au film sur la Libération de Paris vraisemblablement pour légitimer l'action de son groupe de résistants.
Jean-Paul le Chanois est décédé le 8 juillet 1985 à Paris.
Fabrice Bourrée in DVD-ROM La Résistance en Ile-de-France, AERI, 2004
Sources et bibliographie :
Bibliothèque du Film - BIFI (éléments biographiques sur Jean-Paul Le Chanois).
Sylvie Lindeperg, Les écrans de l'ombre. La Seconde guerre mondiale dans le cinéma français (1944-1969), Paris, CNRS éditions, 2001.
Jean-Pierre Bertin-Maghit, Le Cinéma français sous l'Occupation, Paris, Orban 1989, réédité chez Plon, Paris, 2002.