Le Comité départemental de Libération (CDL) des Alpes-Maritimes

Légende :

Transcription d'une affiche du CDL clandestin appelant au combat pour la libération de Nice, 27 août 1944

Type : Transcription

Source : © Musée de la Résistance Azuréenne Libre de droits

Date document : 27 août 1944

Lieu : France - Provence-Alpes-Côte-d'Azur - Alpes-Maritimes - Nice

Ajouter au bloc-notes

Contexte historique

Le Comité départemental de Libération des Alpes-Maritimes

C’est à l’initiative des MUR que naquit le CDL, entre les mois de décembre 1943 et de février 1944, officiellement installé à Nice par Francis Leenhardt-Lionel, délégué général adjoint pour la zone Sud du CFLN d’Alger. Cet organisme clandestin était à l’origine plus proche de la constitution de l’assemblée consultative d’Alger que de celle du CNR  institué par Jean Moulin : deux MUR (Alex Roubert-Hyacinthe, Jacques Cotta), un socialiste (Aimé Bermond), un communiste (Jean Orbello-Olivier), un CGT confédéré (Flaminius Bianchi), un CFTC (André Pruvost), un démocrate-populaire (Marcel Mouterde), un catholique résistant (abbé Girault). Le Front national fut représenté par Roland Claudel-Serge au mois d’avril, en même temps que le siège de la CGT revint à l’unitaire Charles Andrieu-Thibaut. Jugés trop tièdes et compréhensifs à l’égard de HyacintheSerge et Olivier furent remplacés au début du mois de juin par Louis Maccagno-Martin et Henri Paoli-Léon. Le CDL mit en place des commissions chargées de préparer l’insurrection aussi bien que l’installation des nouveaux pouvoirs publics (Epuration, Municipalités et CLL, Presse, Aide aux victimes de l’ennemi, Ravitaillement, Santé).

Une crise apparut à l’issue de la réunion du 6 juin à propos du déclenchement de la grève générale, repoussée comme prématurée. Les relations s’envenimèrent rapidement entre la mouvance gaulliste et la mouvance communiste, Hyacinthe décidant de ne plus convoquer le CDL à partir du 15 juin malgré les sollicitations répétées du FN, de la CGT et du PCF. Au moment du débarquement en Provence, la mouvance communiste ayant constaté l’absence de Hyacinthe (monté à Valberg accueillir la mission alliée parachutée et participer à la refonte de l’état-major FFI) décida de reprendre en mains le CDL, y associant le Mouvement Combat (docteur Lanchier-Pinon) et le Mouvement prisonnier (Joseph Collignon) tout en l’élargissant aux organisations sœurs du FN : FUJP (Gabrielle Roux), Femmes de France (Edith Bergondi), Intellectuels (Denise Delmon), Comité national des médecins (docteur Donat), la Résistance chrétienne étant représentée désormais par l’abbé Daumas, membre du comité directeur du FN, et le nouveau président étant Sénèque Brunet (FN), remplaçant Martin arrêté le 28 juillet et fusillé le 15 août. Le CDL lança plusieurs appels à la population, l’invitant à rejoindre les FFI et les Milices patriotiques, à saboter les voies de communication et à déclencher la grève générale.

Après la réussite de l’insurrection niçoise du 28 août, le CDL s’installa à la Préfecture dès le lendemain, siégeant dans la salle du Conseil général. Afin d’écarter des mouvements ou des personnes qui le rebutaient, il décida de doubler la représentation du FN, de la CGT, du PCF et du mouvement Combat avec l’entrée de Pierre Brandon, Jean Robert, Marcel Ricci et de Marcel Bousquet. Des incidents eurent lieu lorsque se présentèrent des délégués de la première assemblée (Jacques Cotta le 29, Alex Roubert le 30, Aimé Bermond, l’abbé Girault et Marcel Mouterde le 31), le CDL n’acceptant d’intégrer que le représentant du Parti socialiste, une commission d’enquête étant mise en place pour juger le cas du premier président. Le CDL s’opposa au préfet nommé par le CNR, Maurice Moyon, obtenant du commissaire régional de la République Raymond Aubrac son remplacement le 2 septembre par son adjoint Paul Escande. Des commissions permanentes furent mises en place (Epuration, Ravitaillement, Travail, Presse, FFI). La fréquence des réunions fut de une par jour jusqu’au 16 septembre, de trois par semaine jusqu’en janvier 1945, de une par semaine jusqu’en avril, enfin de une par mois jusqu’à la dissolution du comité en avril 1947. Des quotidiens furent autorisés à paraître : L’Aurore pour le PCF, Le Patriote pour le FN et Combat pour le mouvement éponyme, tandis que les quotidiens socialiste (L’Espoir) et démocrate-chrétien (La Liberté) n’obtinrent pas l’agrément de la commission de la Presse mais furent autorisés à paraître par le Préfet le 11 septembre 1944 et le 6 avril 1945. La composition du CDL ayant donné lieu à des interprétations diverses parmi la population, notamment sur le nombre de communistes, un élargissement intervint le 26 janvier avec une assemblée regroupant désormais trente-deux membres : deux représentants pour le PCF, le FN, la CGT, la SFIO (avec le retour d’Alex Roubert), le mouvement Combat et le Mouvement prisonnier, un pour la CFTC, le MRP, le Parti radical, l’Union paysanne, les FUJOP, le CNM, les Intellectuels et la Résistance chrétienne, plus dix personnalités (l’abbé Daumas, l’inspecteur du Travail Gatet, le député communiste Henri Pourtalet, les maires de Cannes, Antibes, Grasse, Cagnes, Vence, Menton, Puget-Théniers). Sénèque Brunet fut confirmé président, Bermond et l’abbé Daumas devinrent vice-présidents et Robert secrétaire général. Deux mois plus tard, le MLN fit son entrée avec Alphonse Lauron et Jacques Cotta si bien que la mouvance communiste (douze membres) perdit de son influence, la mouvance socialiste parvenant à huit membres comme les modérés, la mouvance gaulliste comptant six délégués. Signalons que la présence féminine fut nulle jusqu’au 15 août 1944, atteignit trois déléguées à l’automne 1944 puis seulement deux avec l’élargissement.

Le CDL rencontra de nombreux problèmes avec le ravitaillement et l’épuration mais aussi avec la constitution des comités locaux de libération (CLL) ; il réunit, le 26 novembre 1944, une assemblée générale des CLL au cours de laquelle on incita les comités à rédiger des cahiers de doléances. Son impulsion politique fut active mais elle ne fut pas suffisante, en avril 1945, pour imposer partout la liste unique de la Résistance aux élections municipales. Les relations avec le préfet Escande furent bonnes. Enfin, le CDL se préoccupa des questions militaires puisque le département était encore partiellement occupé par l’ennemi : il œuvra pour que les FFI disposassent de fournitures conséquentes en vêtements chauds comme en armes, tout en tentant d’obtenir le rapatriement des villageois de la Bévéra et de la Roya, transférés de force au Piémont par les troupes allemandes. Son poids politique diminua sensiblement après les élections municipales des 29 avril et 13 mai 1945 et encore plus après les cantonales des 23 et 30 septembre. Il échoua, comme tant d’autres CDL, dans la tentative d’impulser la Renaissance française, qui ne fut pas perçue par une opinion plutôt modérée, obnubilée par les problèmes quotidiens. Il crut évoluer dans une situation révolutionnaire devant déboucher sur de nouveaux rapports sociaux dans une France débarrassée des trusts alors qu’il était de plus en plus coupé de la base et éclipsé par le renouveau des partis traditionnels.


Auteur : Jean-Louis Panicacci

Sources : 

Jean-Louis Panicacci, « Le comité départemental de Libération des Alpes-Maritimes (1944-1947) », in Revue d’Histoire de la Deuxième Guerre Mondiale, n° 127, juillet 1982, pp.77-107 et La Résistance azuréenne, Nice, Editions Serre, 1994.

Site Internet du Musée de la Résistance azuréenne : http://www.musee-resistance-azureenne.fr/

Blog du Musée de la Résistance azuréenne : http://resistance.azur.free.fr/dossier/escande.htm#23.