Première assemblée du Mouvement républicain populaire à Marseille

Légende :

Article intitulé « Hier, à Marseille, le Mouvement républicain populaire a tenu sa première assemblée », paru dans Dernière Heure, édition des 3 et 4 décembre 1944

Genre : Image

Type : Article de presse

Source : © Collection Robert Mencherini Droits réservés

Détails techniques :

Document imprimé sur papier journal [Voir l'album photos lié].

Date document : 3 et 4 décembre 1944

Lieu : France - Provence-Alpes-Côte-d'Azur - Bouches-du-Rhône - Marseille

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Analyse média

Dernière Heure, supplément vespéral du Méridional, rend compte, dans son édition du 3 décembre 1944, de la première assemblée du Mouvement républicain populaire (MRP), tenue au cinéma de La Plaine, à Marseille, le dimanche 3 décembre 1944. L’article qui commence à la une sur trois colonnes se poursuit page 2.

Cette réunion fait suite au congrès constitutif du MRP à Paris, les 25 et 26 novembre 1944 auquel ont participé les trois orateurs qui se succèdent. Raymond Caillol, membre du CDL, rappelle l’action des résistants chrétiens sous l’Occupation et leur refus de l’idéologie nazie, contraire à la fois à la spiritualité chrétienne et aux droits de l’Homme.
Alexandre Chazeaux, membre de la délégation municipale de Marseille et du comité directeur du MRP, rédacteur en chef du Méridional, se prononce pour la défense de toutes les libertés et en appelle à la mobilisation de tous, en particulier les femmes et les jeunes, pour reconstruire le pays et rétablir la légalité républicaine.

André Colin, membre du CNR, insiste sur la volonté du MRP de transformer la société en libérant la personne humaine de la tyrannie de l’argent, en associant l’ouvrier aux bénéfices et aux responsabilités et en nationalisant les richesses collectives. « La liberté syndicale, dit-il, doit s’épanouir sur les ruines de la Charte du Travail ». C’est ainsi que le pays retrouvera sa grandeur. Le meeting se termine aux cris de « Vive la France, Vive la République, Vive de Gaulle ! » et aux accents de La Marseillaise.

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Robert Mencherini

Contexte historique

Les créateurs du MRP dans les Bouches-du-Rhône se réclament de la Résistance chrétienne et du Comité de coordination des organisations chrétiennes. Ils sont partisans, ainsi que le montrent leurs déclarations, d’une transformation de la société. Mais celle-ci doit se faire dans l’ordre, et, pour tout dire, par la loi. Par ailleurs, il est à noter que le manifeste adopté par le congrès du MRP ne comporte aucune référence confessionnelle explicite, catholique ou même chrétienne. Il est sous-tendu en revanche par une philosophie spiritualiste et personnaliste.

Cet aspect contestataire, sinon « révolutionnaire », constitue un frein pour l’adhésion d’un certain nombre d’anciens membres du Parti démocrate populaire (PDP) à la nouvelle organisation. C’est le cas, par exemple de Germaine Poinso-Chapuis, membre de la délégation municipale au titre du MLN, qui témoigne, ultérieurement, de la méfiance qui existait entre les militants des deux organisations. Le programme du MRP, dit-elle, était un peu trop révolutionnaire pour des anciens du PDP. De leur côté, les militants de l’Action catholique ouvrière trouvaient parfois les démocrates-populaires un peu trop « bourgeois ».  

C’est peut-être la crise provoquée, en décembre 1944, par la suppression de la subvention municipale accordée à Marseille aux écoles privées qui facilite les rapprochements. Les protestations menées au nom de la liberté scolaire se combinent inévitablement à la question religieuse. Jusqu’alors, les liens entre l’église et la délégation municipale n’avaient pas défrayé la chronique. On avait même assisté, le 26 novembre, à l’inauguration conjointe, par les autorités laïques et ecclésiastiques, de la statue de Mgr Belsunce, replacée sur son socle. Mais le 17 décembre 1944, cinq mille Marseillais (selon les organisateurs), réunis encore au cinéma La Plaine, votent une motion protestant contre la mise en cause de la subvention de six cent mille francs allouée aux écoles privées. Le texte insiste sur le respect de la liberté de choix pour les familles.


Auteur : Robert Mencherini

Sources :

Archives Départementales (AD) des Bouches-du-Rhône 149 W ; presse régionale ;

Laurent Ducerf, « Le congrès fondateur du MRP des 25 et 26 novembre 1944 », Chrétiens et sociétés, n° 12, 2005, pp. 97-107 ;

Pierre-Henri Teitgen, « Faites entrer le témoin suivant ». 1940-1958. De la Résistance à la Ve République, Rennes, Ouest France, 1988 ;

Yvonne Knibielher (dir.), Germaine Poinso-Chapuis, femme d’ État (1901-1981), Aix-en-Provence, Édisud, 1998 ;

Mencherini Robert, La Libération et les années tricolores (1944-1947). Midi Rouge, ombres et lumières, tome 4, Paris, Syllepse, 2014.