La mémoire des représailles consécutives aux attaque de maquis

Légende :

En même temps qu'ils attaquaient le maquis Horteur, qui n'avait que quelques jours d'existence, les Allemands terrorisaient la population du village voisin de Chailley, arrêtant une quinzaine d'otages (dont l'un mourut en déportation) et faisant quatre morts. L'événement, qui s'inscrivait dans une stratégie visant à terroriser les populations civiles afin qu'elles ne fournissent aucune aide aux maquis, est resté très prégnant dans la mémoire du village

Genre : Image

Type : Plaque

Source : © Cliché Joël Drogland Droits réservés

Détails techniques :

Photographies numériques en couleur (voir aussi l'album photo lié).

Date document : 2002

Lieu : France - Bourgogne - Franche-Comté (Bourgogne) - Yonne - Chailley

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Analyse média

Plaque de marbre blanc, gravée de lettres rouges et fixée sur le mur d'une maison située rue du Faubourg, à l'entrée du village de Chailley par la route venant d'Arces.
Le texte ne se réfère pas explicitement à l'attaque du maquis, mais cite les noms de ceux qui furent les victimes de l'attaque du maquis et des représailles consécutives sur la population du village.

La plaque a été posée au milieu des années 1980. Curieusement, une double faute d'orthographe a été commise relative à Raymond Chambrellant. Il s'agit en réalité de Raymond Chambrelan, boulanger à Chailley, né le 1er février 1908, décédé lors du transport de Compiègne vers Buchenwald, le 2 juillet 1944.


Auteur : Joël Drogland

Sources :

CD-ROM La Résistance dans l'Yonne, AERI - ARORY, 2004.

C. Delasselle, J. Drogland, F. Gand, T. Roblin, J. Rolley, Un département dans la guerre. Occupation, Collaboration et Résistance dans l’Yonne, Paris, éd. Tirésias, 2007.

Contexte historique

À partir du 8 juin 1944, la Wehrmacht, engagée à fond dans la bataille de Normandie, cherche à assurer ses arrières et la sécurité de ses communications. Elle déclenche contre les maquis une série d’attaques avec de gros effectifs et un armement important, en particulier contre ceux de la forêt d'Othe qui pourraient gêner ses lignes de communication avec la Normandie. Le 20 juin, de puissantes forces sont engagées contre le maquis BOA de Saint-Mards-en-Othe, premier acte du ratissage programmé de toute la forêt d’Othe. Le combat est violent, 27 maquisards sont tués ; plusieurs habitants du hameau de la Rue Chèvre (Sormery) sont massacrés.

Verneuil, chef militaire de Libération-Nord dans l'Yonne et fondateur de plusieurs maquis, décide immédiatement d’évacuer le petit maquis Horteur, qu'il venait juste de décider d'implanter à proximité du village. Il n’en a pas le temps. Le 23 juin, le village de Chailley est investi par les forces allemandes qui attaquent simultanément le maquis, dont elles surestiment les forces. Le but de cette opération conjointe - attaque du maquis et opération de police dans le village - est d’anéantir le maquis, de capturer les maquisards rescapés de Saint-Mards-en-Othe qui se cachent dans la région et de terroriser une population considérée comme largement acquise à la Résistance locale.

Au matin du 23 juin, les Allemands investissent le village de Chailley. Tous les hommes sont rassemblés sur la place. Ils y demeurent jusqu’au soir sous un soleil accablant. Le village de Chailley doit apparaître aux Allemands comme une base de « terroristes » : ils y ont arrêté, le 22 septembre 1943, Maurice Mulot, qui y ravitaillait un maquis ; ils ont attaqué le maquis de Saint-Mards-en-Othe et pensent que des rescapés se cachent à Chailley ; ils savent qu’un autre maquis est installé à proximité mais n’en connaissent pas les effectifs. Ils sont renforcés dans cette opinion par le maire du village, qui a proféré à l’égard de plusieurs résistants du village de violentes menaces dans les jours précédents, et qui ne cache pas ses sentiments collaborationnistes depuis qu’il a fait l’objet d’une réquisition de paille de la part des maquisards. Les Allemands et les Russes blancs qu’ils encadrent ont perdu plusieurs hommes dans le combat de Saint-Mards-en-Othe ; ils ont horriblement mutilé les maquisards qu’ils ont fait prisonniers et massacré toute une famille de la Rue Chèvre. La population du village court donc les plus grands risques.

Vers 13 h 30, des camions de la Wehrmacht montent vers le maquis par la route de Chailley. Le maquis n’a d’autre choix que de décrocher au plus vite. Les engagements sont violents. Blessé, le lieutenant Cormeau est traîné jusqu’au village où il est achevé. Deux autres maquisards sont tués. Verneuil, ses adjoints et les autres maquisards parviennent à se replier. Le camp est investi le soir ; tout ce qui en reste est brûlé.

Au village, 29 otages ont été rassemblés. Tous les postes de radio sont confisqués. Quatre résistants faits prisonniers sont massacrés, dont deux étudiants récemment arrivés au maquis Horteur, un rescapé des combats de Saint-Mards-en-Othe et le lieutenant Cormeau. L’épicière Marcelle Guillemot est frappée sauvagement.

Seize otages sont transférés à Auxerre. Parmi eux, quatre femmes, le coiffeur, le boucher, un cafetier, un épicier, la charcutière et deux personnes de passage.

Des perquisitions ont encore lieu le 30 juin et le 11 juillet dans les bois de Saint-Mards-en-Othe et les hameaux environnants.

Toute la population du hameau de la Lisière des Bois est rassemblée sur la place du village en qualité d'otage. En instituant ce climat de terreur, les Allemands veulent réduire les possibilités de reformer un maquis.


Auteur : Joël Drogland

Sources :

CD-ROM La Résistance dans l'Yonne, AERI - ARORY, 2004.

C. Delasselle, J. Drogland, F. Gand, T. Roblin, J. Rolley, Un département dans la guerre. Occupation, Collaboration et Résistance dans l’Yonne, Paris, éd. Tirésias, 2007.