Les chemins de la Résistance : la forêt d'Othe
Légende :
Plan général de trois randonnées pédestres au départ des villages de Dixmont et Les Bordes, permettant de découvrir ce que furent la vie et les combats des maquis de ce département - ces randonnées figurent dans le dépliant intitulé «Sur les pas des maquis Bourgogne», édité en 2012 par l'ARORY avec le soutien du Conseil général de l'Yonne, de l'Association Musée Mémorial Résistance Yonne et des municipalités des Bordes et de Dixmont
Genre : Image
Type : Carte
Producteur : Frédéric Joffre
Source : © Carte : Frédéric Joffre pour l'ARORY Droits réservés
Détails techniques :
Carte en couleur établie selon un fond de carte de l'IGN. Dimensions 21 cm x 30 cm. Échelle 1/25 000e.
Date document : Octobre 2012
Lieu : France - Bourgogne - Franche-Comté (Bourgogne) - Yonne - Dixmont
Analyse média
Ce plan se trouve sur un dépliant couleur gratuit proposé aux randonneurs pédestres. Les itinéraires ont été tracés sur la carte IGN au 1/25 000e, ce qui permet une parfaite lisibilité. On peut le trouver dans les offices du tourisme et les mairies des villages concernés et des villes environnantes (Villeneuve-sur-Yonne, Sens). Il a été édité dans le cadre d'un projet initié par Jean-Luc Prieur (Association Musée Mémorial Résistance Yonne) et les municipalités des Bordes et de Dixmont, avec le soutien financier du Conseil général de l'Yonne et l'appui scientifique de l'ARORY.
Ce projet était la seconde étape d'une plus vaste opération visant à mieux faire connaître le passé maquisard de cette région de la forêt d'Othe, et à promouvoir l'esprit et les valeurs de la Résistance auxquels les deux municipalités des Bordes et de Dixmont sont très attachées. Le projet a nécessité trois ans de travail, fondé sur une coopération entre les municipalités, les historiens, un club local de randonnée et la Fédération française de randonnée pédestre (FFRP).
Les itinéraires ont été balisés par des bénévoles, dans le respect de la signalétique de la FFRP. Neuf panneaux ont été conçus par les historiens de l'ARORY, avec des textes simples et quelques illustrations photographiques, permettant aux randonneurs (et aux automobilistes, quand le panneau se situe au débouché d'un chemin et au bord d'une petite route), de découvrir ce que fut la vie des maquisards, les combats qu'ils livrèrent, les armes qu'ils utilisèrent et les parachutages qu'ils réceptionnèrent, etc.
Les chemins relient des sites où séjournèrent et combattirent les deux maquis Bourgogne (deux maquis successifs et différents portant le même nom car des rescapés du premier se réfugièrent dans le second). Trois itinéraires sont proposés, mais le randonneur a le loisir de construire le sien propre, compte tenu de la qualité du plan.
Un itinéraire de 7 km, balisé en vert et ayant pour titre « Circuit de l'attaque du 15 mai 1944 », permet, au départ de Dixmont, de gagner les bois du Chalonge et, par l'Allée Jack-Marsden, de se rendre sur le lieu exact de l'attaque du maquis FTP Bourgogne, le 15 mai 1944.
Un itinéraire de 9 km, au départ des Bordes, a pour titre « Circuit de l'attaque du 3 août 1944 ». Au départ des Bordes, il permet de gagner le hameau de La Grange-aux-Malades et, dans le bois des Rayons, le site de l'attaque du gros maquis Bourgogne, Service national maquis n° 6, le 3 août 1944.
Le « circuit des deux maquis » est, quant à lui, long de 20 km et peut être parcouru au départ de l'un ou de l'autre des deux villages. Il passe dans l'ensemble des sites historiques et offre aux randonneurs la lecture des neuf panneaux d'information.
Auteur : Joël Drogland
Sources :
« Sur les pas des maquis Bourgogne », dépliant édité par l’ARORY avec le soutien du Conseil général de l’Yonne, de l'Association Musée Mémorial Résistance Yonne et des municipalités des Bordes et de Dixmont, 2012.
Contexte historique
Au nord-est du Jovinien, le Pays d’Othe apparaît comme un plateau élevé de 100 à 200 mètres au-dessus des vallées de l’Armançon, de l’Yonne et de la Vanne, qui en constituent les limites naturelles. Il se prolonge sur le département de l’Aube. Précipitations abondantes et fraîcheur estivale, mêlées à l'argile à silex sur le sous-sol crayeux ont favorisé un vaste domaine forestier avec de belles futaies de chênes. Son allure de bastion en a détourné les axes ferroviaires et routiers qui, à l’exception de la route nationale 5 (Paris-Genève), empruntent les vallées périphériques. Par son relief, son couvert forestier et sa faible densité de population, c'est une région qui se prête particulièrement à la randonnée pédestre.
Resté à l’écart des axes de communication, le Pays d’Othe est à la fin des années 1930 un territoire peu densément peuplé, abritant une population essentiellement rurale et agricole qui pratique une polyculture où les labours céréaliers s’accompagnent de vergers de pommiers à cidre et d’élevage bovin. La forêt n’a plus l’importance économique qui fut la sienne aux siècles précédents, mais son exploitation est d’autant plus forte sous l’Occupation que la demande de bois s’accroît, tant pour le chauffage que pour le charbon de bois, nécessaire aux véhicules équipés de gazogènes. Les chantiers d’exploitation se multiplient, des prisonniers de guerre coloniaux y sont occupés à Arces et à Dixmont. Les activités traditionnelles, tuileries, tanneries, ont entamé leur déclin. La vogue des résidences secondaires n’atteindra le Pays d’Othe qu’à partir des années 1960.
La Résistance est bien présente dans ce pays rural, boisé et enclavé. Son organisation se caractérise par la présence d’un dense réseau de résistants sédentaires en liaison étroite avec des maquis. Il s’agit d’abord de petits maquis FTP mobiles au printemps 1944, tel le maquis Bourgogne. En juin et en juillet se structurent de plus grosses unités, tel le maquis Bourgogne, affilié au Service National Maquis.
Début janvier 1944, Henri Mittay, son frère, son épouse, ainsi qu'un couple d'amis s’installaient chez les époux Préau au hameau de Villefroide, sur la commune des Bordes. C’était le noyau fondateur d’un maquis que Robert Loffroy, recruteur régional des FTP, allait baptiser du nom de « Bourgogne », et dont il exigea qu’il s’installe dans le bois des Rayons, à proximité du hameau de la Grange-aux-Malades. Commandé d’une main ferme par Henri Mittay, soutenu par la famille Solmon, le maquis s’étoffa au début du printemps et réalisa quelques sabotages. Repéré et donc menacé, le maquis se vit imposer un ordre de déplacement de la part de l’état-major FTP. Mittay refusa ; il partit avec ses proches dans la région de Fournaudin, tandis que ses maquisards, obéissant à l’ordre qu’ils avaient reçu, s’installaient dans les bois du Chapitre (ou plus exactement dans les bois de Chalonge), sur la commune de Dixmont. Ils y furent attaqués par les Allemands le 15 mai 1944 et les maquisards se dispersèrent.
En avril 1944, un autre maquis fondé par Louis Priault, cultivateur et marchand de bestiaux à Dixmont, avait été créé dans la vallée des Fourches, entre les Bordes et Dixmont et avait été intégré dans le Service national maquis, qui lui avait attribué le numéro 6.
Fin mai 1944, ce maquis se déplaça et vint s’installer dans le bois des Rayons, sur l’emplacement qui avait été celui du maquis de Mittay quelques mois plus tôt. Quelques rescapés du maquis Bourgogne vinrent d’ailleurs s’y réfugier pour continuer la lutte. Quand ils apprirent la mort de Mittay, le 24 mai 1944, ils proposèrent que le Maquis 6 reprenne le nom de maquis Bourgogne, ce qui fut accepté. Il y eut donc deux maquis Bourgogne, l’un fut un maquis FTP et l’autre un maquis du Service national maquis, dont tous les autres maquis étaient implantés en Puisaye ou dans l’Auxerrois. Le maquis Bourgogne fut attaqué le 3 août 1944 et dut se disperser. La ferme de la famille Solmon, toute proche, fut incendiée. M. Solmon et son fils furent arrêtés. Dans les deux semaines qui suivirent, la répression qui s’abattit sur la région fut intense et une douzaine de maquisards furent tués.
On comprend que de tels événements sur un si petit espace aient fortement marqué la mémoire collective locale.
Auteur : Joël Drogland
Sources :
CD-ROM La Résistance dans l'Yonne, AERI - ARORY, 2004.
C. Delasselle, J. Drogland, F. Gand, T. Roblin, J. Rolley, Un département dans la guerre. Occupation, Collaboration et Résistance dans l’Yonne, Paris, éd. Tirésias, 2007.