Jacques Picard, chef du réseau évasion Sultan
Légende :
Photographie d'identité d'Emile Jacques Picard, chef du réseau évasion Sultan, adjoint au délégué militaire régional R3
Genre : Image
Type : Photographie d'identité
Source : © Service historique de la Défense, 16 P 295617 Droits réservés
Détails techniques :
Photographie analogique en noir et blanc
Date document : Sans date
Lieu : France
Contexte historique
Né le 26 juillet 1914 à Nilvange (Moselle), Emile Jacques Picard effectue son service militaire en 1935-37 au 7e régiment de tirailleurs marocains à Meknès. Mobilisé en septembre 1939 au 160e régiment d’infanterie de forteresse, il est chef de casemate et chef de bloc ouvrage de la ligne Maginot (ouvrage de Coume près de Boulay en Moselle). Fait prisonnier et interné à Moosburg, il est libéré en qualité de Lorrain le 13 septembre 1940 et se retire à Courcelles (Moselle). Picard débute son action résistante fin 1940 avec de la propagande et surtout l’organisation de filières d’évasion de prisonniers de guerre. Il tente de fuir vers la France mais cette tentative se solde par un échec. Il poursuit alors et développe son action en Lorraine jusque fin 1942.
Mobilisé de force dans l’armée allemande par suite de la mobilisation des Alsaciens-Lorrains le 6 janvier 1943, il est encaserné avec 200 Lorrains au camp de Longeville-les-Saint Avold (Moselle). Il y organise immédiatement la résistance : maintien et usage de la langue française, chants français au cours des déplacements, propagande pour la France libre, noyautage de sous-officiers et de certains officiers allemands, préparation de désertions… Le 12 avril 1943, il est arrêté par la Gestapo à Saint-Avold pour avoir tenu des propos anti-allemands. Grâce à l’intervention d’un officier allemand compromis, il est rapidement relâché. Il commence alors à prendre de nouveaux contacts et à organiser une filière de passage de la frontière à Bitche (Moselle).
Le 22 juin 1943, il est envoyé avec ses camarades lorrains mobilisés de force à Fraustadt (Silésie). Il y poursuit sa mission de renseignement et de préparation de la désertion d’un nombre maximum de camarades. Il prend contact à Fraustadt avec des prisonniers de guerre français du stalag de Sagan, les aide par tous ses moyens et prépare une antenne d’évasion. Le 13 août 1943, il apprend son affectation pour la Russie. Deux jours plus tard, il déserte avec une vingtaine de camarades. Le 17 août, il passe par Berlin pour simuler une disparition dans un bombardement (et ainsi dégager la responsabilité de ses parents considérés comme responsables des actes de leur fils mobilisé). De là, il rejoint Metz le 19 août où il est hébergé par des agents de sa filière d’évasion puis passe la frontière de la zone interdite à Amanvillers (Moselle) le 1er septembre 1943. Il rejoint Nancy le lendemain et prend contact avec M. Bertin, directeur de la Maison des Prisonniers de Nancy, rattaché au mouvement de résistance des prisonniers de guerre, qui le dirige sur le département de la Loire où il est nommé chef départemental du mouvement de résistance des prisonniers de guerre le 15 octobre 1943.
Recruté par Pierre Rateau, chargé de mission du service des atterrissages et parachutages pour les régions R3 et R4 (Toulouse et Montpellier), il souscrit un engagement volontaire au titre des FFC le 1er novembre 1943 en qualité de chef régional en R3 des opérations de parachutage. Il est immatriculé au BCRA de Londres en qualité d’agent P2, pseudo "Sultan", pour compter du 1er septembre 1943. Emile Jacques Picard devient chef régional SAP en R3 et R4 le 1er janvier 1944 à la suite du rappel à Londres de Pierre Rateau.
En même temps, il est chargé d’un service clandestin de passage par l’Espagne qui fonctionne sous son commandement à partir de janvier 1944 (rapatriement de pilotes alliés, d’agents français du BCRA et de personnalités). Il regroupe pour le compte du BCRA les différentes filières d’évasion qu’il a contactées et en forme un réseau qui prend l'appellation Evasion Sultan. Les filières de cette organisation s’étendent de la Pologne à l’Espagne. Un service faux-papiers fonctionne à Lyon et un service social est mis en place à Toulouse pour apporter aide et assistance aux familles des agents arrêtés.
Après la désagrégation de la Délégation militaire de R3, due à de nombreuses arrestations, il devient Délégué militaire régional par intérim. A l’arrivée de Lucien Cambas, "Trapèze", le 1er juin 1944, il devient son adjoint pour le nord de la R3 tout en devenant délégué militaire pour les opérations du littoral (Gard, Hérault, Aude, Pyrénées-Orientales). Il entreprend et réussit le regroupement et la formation du maquis de l’Aigoual-Cévennes, le plus important maquis de la région, et organise la mise en place puis le déclenchement des plans d’opération prévus en synchronisation avec le débarquement dans le Sud-Est.
Affecté à la Direction générale des Etudes et Recherches à compter du 1er octobre 1944, il est maintenu en R3 en qualité de chef d’antenne de la Direction des services de documentation. Affecté à l’Office de recherche des crimes de guerre (DGER) le 20 mai 1945 en qualité de chef de mission de 1ère classe, assimilé au grade de lieutenant-colonel, il est démobilisé le 23 juillet 1946.
Liquidateur national du réseau des FFC Action R3, colonel de réserve par décret du 28 janvier 1969, admis à l’honorariat le 11 décembre 1974, Emile Jacques Picard est titulaire de nombreuses décorations françaises et étrangères :
- Légion d’Honneur (chevalier par décret du 1er juin 1945, officier le 14 juin 1951, commandeur le 10 juillet 1964)
- Croix de guerre avec 4 palmes et une étoile d’argent
- Croix de la valeur militaire avec étoile d'argent (17/10/1946)
- Médaille de la Résistance avec rosette (11/03/1947)
- Médaille des évadés (23/03/1949)
- Croix du combattant volontaire de la guerre 1939-1945 (25/06/1958)
- Croix du combattant volontaire de la Résistance (11/03/1954)
- Croix du combattant au titre de la guerre 39-45 et de l’Afrique du Nord
- Médaille commémorative des opérations de sécurité et de maintien de l’ordre en Afrique du Nord (01/04/1959)
- Officer of the Military division of the Most Excellent Order of the British Empire (15/01/1947)
- Croix de guerre belge avec palme (14/4/1949)
Fabrice Bourrée
Sources :
Service historique de la Défense, 16 P 295 617 (dossier d'homologation d'Emile Jacques Picard)
Archives nationales, 72 AJ 38 dossier n°1 : témoignage d'Émile-Jacques Picard, alias Sultan, recueilli par Yvette Gouineau (en ligne)