Les journées sanglantes du printemps et de l'été 1944 en Corrèze ont entraîné un traumatisme violent. Le département tout entier garde les traces de ce passé brûlant, et la mémoire divisée, omniprésente et toujours à vif, résiste au travail des historiens. Pourtant on constate des absences et des silences sur un nombre de sujets importants. L’épisode du 9 juin 1944 à Tulle ne serait-il pas une façade tragique mais commode pour occulter, en focalisant l’attention sur cet acte sanglant, tout ce qui l’entoure et le suit? Pour y répondre Nathalie Roussarie-Sicard prend en compte un temps plus long, allant des années Trente jusqu’à la Libération, dans une approche centrée sur le thème général de l’exclusion et de la répression: contre les étrangers et les communistes, avant et pendant la période de la guerre, puis, à partir de 1940, contre les francs-maçons et contre les juifs, présents dans la région, contrairement aux idées reçues. En s’appuyant sur les Archives régionales et nationales, sur la presse locale et sur les témoignages, dans une étude détaillée, enrichie de portraits des principaux protagonistes, elle replace l’histoire de cette région dans une perspective élargie, sans se détourner des questions délicates. Sans juger, elle essaie de dénouer les incertitudes et les complexités de cette période et d’analyser les conséquences: une histoire confrontée au deuil, à la violence, et au ressentiment.