Grand-Mère (matricule KLB 42 522) de Christian Boitelet

Légende :

Couverture de la 3e édition de Grand-Mère (matricule KLB 42 522) du résistant déporté Christian Boitelet, collection "Carnets de vie", Montmélian, édition La Fontaine de Siloé, 2008

Genre : Image

Type : Livre

Source : © Collection A. Martinot Droits réservés

Date document : 2008

Lieu : France - Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes) - Ardèche

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Analyse média

Cet intitulé mérite deux explications :

Grand-Mère, en référence à son allure courbée, est le surnom dont l'a affublé Ferdinand, son chef au block 12 à Dora, qui oscille entre amabilité et crises de nerf, dont Christian Boitelet fait les frais.

KLB signifie Konzentration Lager Buchenwald (camp de concentration de Buchenwald, région de Thuringe, près de la ville de Weimar).

Publié, dans la série "Carnets de Vie", par les éditions Fontaine de Siloé en 2003, ce petit ouvrage, par son format et son nombre de pages : 70, dont 12 de documents, en est à sa 3e édition en 2008 (soit 10 000). Il convient d'y ajouter une 4e édition à compte d'auteur intitulée Récit d'un Résistant Déporté.

Le style direct, sans fioriture, de cet opuscule, caractérise son auteur, simple et chaleureux.

Quelques pages de l'ouvrage sont consacrées à la Résistance (ici, une attitude familiale) et aux missions confiées à Christian Boitelet malgré son jeune âge : collecte de renseignements, aide aux réfractaires au STO, acheminement de prisonniers de guerre évadés, récupération de cartes d'alimentation, élimination du collaborateur responsable des arrestations dans sa famille et de bien d'autres camarades.

L'essentiel du livre porte sur sa déportation avec les différents camps où il a été déporté : Buchenwald, Dora, Ellrich gare, Heinkel, Sachsenhausen (Oranienburg). Il décrit le quotidien d'un camp : la violence, la faim, la soif, la promiscuité, la vermine, les problèmes de santé : typhus, gale et ses solutions contre la toux (escargot), l'infection (urinaire). Il n'oublie pas le travail dans les kommandos malgré la fatigue, l'épuisement. À deux reprises, il est classé "musulman", c'est-à-dire inapte au travail. Un "musulman" est un mort vivant, un déporté que l'on ne peut plus utiliser, d'où une ration de nourriture divisée par deux.

Le 22 avril 1945, le camp d'Heinkel (nord de Berlin) où il se trouve, est libéré par les Russes. Il est évacué par ses libérateurs vers Sachsenhausen, d'où il s'évade pour arriver à Oranienburg. Là, il est récupéré par un civil allemand. Ce n'est que le 25 juin qu'il est rapatrié en train et en avion jusqu'à Villacoublay, puis dirigé vers l'hôtel Lutétia. La visite médicale révèle son piteux état : sévères traces de typhus, multiples œdèmes, décalcification générale et il ne pèse plus que 38 kg pour 1,68 m. Manger est son obsession.

Il a des difficultés à reprendre une vie normale, à s'insérer dans la vie active avant de devenir maître-tailleur militaire, métier qu'il a exercé jusqu'à sa retraite.

[voir l'album lié.]


Alain Martinot

Contexte historique

Né le 2 décembre 1924 à Givet (Ardennes), Christian Boitelet appartient à une famille qui refuse l'occupation allemande et la collaboration. Son père, résistant dès 1942, est arrêté le 27 février 1943 et déporté à Sachsenhausen d'où il ne revient pas. Son frère aîné, emprisonné en juillet 1943, est déporté à Dachau. Les deux frères se retrouvent à leur retour de déportation.

Dès le mois de juillet 1943, Christian Boitelet appartient au mouvement Libération-Nord et se voit confier différentes missions. Convoqué par la police le 27 novembre 1943, il est arrêté, livré aux Allemands, torturé, transféré en camion à Compiègne le 19 janvier 1944 puis envoyé, en wagons à bestiaux, à Buchenwald le 24 janvier 1944.

Retraité et désormais ardéchois, pendant des années, il a témoigné auprès des collégiens et des lycéens de son passé de résistant et de déporté. 
Il s'est éteint en juillet 2014.


Alain Martinot